Sous les tirs de DESC : Colonel Kasongo ‘Kava’ (Ex-DSP) : LD Kabila avait raison de se méfier des FAZ

Mon Colonel, nous abordons dans la deuxième partie de notre entretien la situation sécuritaire du pays après la disparition des FAZ.

Qui sont les responsables de la débâcle des FAZ ?A leur place et en deux mots qu’auriez-vous fait pour éviter cela ?

Qu’aurais je fais? Rien les officiers et les troupes avaient vomi la haute hiérarchie militaire et exigeaient le changement de régime comme l’ensemble de la population zaïroise.

Les responsables? Le gouvernement de la République d’aujourd’hui ou celui de 2016 a le devoir impérieux de constituer une commission d’enquête composée des généraux et officiers supérieurs qui n’étaient pas en service actif en 1996-1997 pour entendre tous les responsables militaires de l’époque afin de déterminer les responsabilités individuelles. Ceux qui seront reconnus responsables de cette débâcle devront être rayés des effectifs et listes passés, présents et futurs des forces armées. Ils devront remettre les insignes de grade et tous les titres honorifiques reçus à l’autorité compétente. Les générations futures apprendront à ne jamais trahir la nation.

A la disparition des FAZ, LD Kabila crée les FAC (Forces Armées Congolaises) au départ de plusieurs groupes armés composites. Avait-il autre choix au regard de la situation des FAZ qui dit-on n’inspiraient plus confiance ?

Photo 1989, Le général Etienne Nzimbi Ngbale Kongo wa Basa passe les troupes en revue. Le Lt -col Antoine KASONGO MUKONKOLE,  Commandant de troupes.

LD Kabila avait raison de se méfier des Faz parce que qui a trahi trahira dit-on. Si les Faz s’étaient rendues en bon ordre (capitulation) peut être que Kabila aurait agi autrement. Ce qui conforte mes sentiments négatifs sur la haute hiérarchie des Faz. La plupart des généraux sont partis en exil le 16 Mai 1997 et garder le reste intact.

Vous savez même parmi ceux qui réclament l’avènement d’un état de droit en RDC, il y en a plusieurs qui se comporteront de la même manière que Mobutu, LD Kabila et J Kabila. L’armée à leurs ordres. Le congolais aime le pouvoir et aime le conserver à tout prix. Jetez un coup d’œil autour de nous. Hormis la Zambie et la Tanzanie quel pays a une armée républicaine? LD Kabila avait signé des accords avec les envahisseurs, d’ailleurs James n’était il pas Chef EMG des FAC? Il s’était mis lui même dans cette situation à cause de sa soif du pouvoir sans tenir compte des intérêts du pays. Vous êtes sans ignorez que chez les militaires l’intelligence précède l’action c’est le contraire chez les civils surtout chez les politiciens. En RDC il y a trop d’hommes et de femmes politiques peu d’hommes et de femmes d’état, trop de militaires et peu de stratèges.

En 2003, les FAC vont céder  la place aux FARDC à la suite des accords de Pretoria en décembre 2002, dans les conditions politiques du moment (logique d’inclusivité 1+4) via le brassage. Il y a eu un faisceau de critiques à ce sujet. Quel est votre point de vue ?

Sun City fut un désastre pour l’armée congolaise. Une rébellion on l’écrase ou elle vous écrase. Les gendarmes Katangais et ceux du Sud Kasaï  garderont toujours en mémoire leurs intégrations dans l’ANC. Fils de soldat que je suis, je sais de quoi je parle. Accepter qu’un ancien trafiquant ou seigneur de guerre garde son grade acquis dans des conditions qui ne respectent pas les lois du pays, les traditions, coutumes et us militaires en inventant des concepts non maîtrisés et venir verser deslarmes de crocodile c’est se moquer de la patrie. Vous avez compris le sens de ma réponse.

Dix ans après, les FARDC se distinguent par leur dysfonctionnement. On parle d’une armée des milices aux objectifs contradictoires. Tous les rapports d’évaluation et les résolutions de l’ONU pointent l’échec de leur réforme ? Selon vous, où se situe le problème ?

De quelle réforme parlez-vous? Depuis ANC, FAZ, FAC et FARDC, l’armée congolaise n’a jamais eu à respecter le tableau d’organisation et le tableau de dotation.

Je ne comprends pas les différentes réformes opérées depuis 1960. Le problème se situe au niveau de la volonté politique. Allez poser cette question au ministre congolais de la Défense ou au Chef EMG Fardc: Quel est le rapport entre les combattants et les administratifs au sein des Fardc? L’auditeur militaire vous poursuivra pour atteinte à la sécurité intérieure de l’état congolais. A quoi sert une armée de cent mille hommes où mille sont équipés à combattre et le reste se dissimule pour assister en spectateur le déroulement des combats sur le théâtre des opérations? Le système de défense de la RDC doit être revu. Je ne pense pas que c’est meilleur endroit pour en parler.

Comment y remédier ? Avec qui et quels moyens ou par quel processus ?

Des projets sur la mise en œuvre d’une armée républicaine existent. Comme ils sont établis par des congolais, ils ne valent rien. Vous êtes diplômé de l’ERM. Pourriez vous accepter de bon cœur qu’un officier belge, votre cadet à l’ERM devienne votre conseiller technique dans votre armée et toucher un salaire dix à vingt fois de plus que vous? Voilà comment nos autorités nous ont réservé une telle humiliation.

La situation sécuritaire instable permanente à l’est du Congo s’explique en grande partie par la faiblesse de l’armée congolaise incapable d’éradiquer les groupes armés (pas seulement le M23), pensez-vous que cette partie pourra un jour se stabiliser ?

La situation sécuritaire à l’Est? Ah ah ! « la stratégie militaire c’est l’art de mouvoir des armées sur un théâtre d’opérations en vue d’augmenter les chances de succès des combattants, de rendre des victoires certaines et une défaite moins coûteuse » Une méditation pour la haute hiérarchie militaire des Fardc. Quant à la stabilisation de la situation, à qui profite cette situation?

Quel est votre regard sur la Monusco et l’assistance militaire internationale en RDC dont on pointe également l’inefficacité ? Sont-elles vraiment incontournables pour la mise sur pied d’une armée républicaine et professionnelle ?

La Monusco inefficace? Où sont les Fardc? Rien que des honneurs et vous voulez que les étrangers meurent pour votre pays? La RDC depuis Lusaka a été mise sous tutelle de cette communauté dite internationale. Ceux qui avaient négocié la paix à Lusaka devront vous éclaircir. Personnellement je n’avais pas adhéré à ces accords.

Les Fardc manquent elles 3000 hommes pour remplir la mission confiée à la brigade d’intervention de la Monusco? La même politique que celle de Mobutu envers l’armée. Après, ils diront que l’armée congolaise n’a jamais gagné une guerre. Il y a un chef, une mission et des moyens. En RDC depuis l’indépendance, il y a un chef, pas de mission (pas d’ordre clair) pas de moyens.

L’actualité politique au Congo tourne autour des concertations convoquées par le président Kabila. La raison d’être de ces concertations est en lien avec la situation sécuritaire fragile à l’est du Congo. Pensez-vous que ces concertations parviendront à stopper  l’hémorragie sécuritaire à l’est ?

J’évite de donner mon point de vue sur l’actualité politique congolaise. Mais compte tenu de l’importance de l’événement, je le ferai.

Le ventre mou du pays c’est notre armée. Dans les thèmes retenus à ces concertations nationales, il n’est pas prévu les états généraux de l’armée. Vous savez, en réalité chaque congolais doit revoir ses ambitions à la baisse. « Faire ce que l’on doit faire et en avoir les aptitudes pour bien le faire est la meilleur définition de la compétence, son contraire l’incompétence se traduit souvent par la jalousie, les intrigues, la méchanceté, le découragement systématique des autres et la méconnaissance des frontières sûres de sa zone d’action » Le MPR n’avait pas toujours mauvais car c’est à l’institut Makanda Kabobi que j’ai attendu cette citation.

Lorsque les listes seront publiées vous serez édifié sur la qualité des participants. Rien que des chasseurs de Perdiem. Je cois que ces concertations ont été convoquées pour un autre objectif. Les politiciens le savent.

Depuis juillet 2013, on assiste à une bonne performance des unités combattantes des FARDC contre le M23, peut-on croire que cela va aboutir à une victoire finale imminente contre le M23  et que les FARDC sont dans une pente ascendante de leur réforme ?

Je suis incapable d’émettre un jugement de valeur sur ce qui se passe depuis Juillet 2013 à l’Est. Le ministère de la défense devrait organiser des points de presse en lieu et place du ministre de l’information qui ne fait que de la propagande. Je n’ai rien à dire à ce sujet.

Comment jugez-vous le jeune colonel Ndala et le général Olenga le nouveau chef d’état-major de l’armée de terre ? Avez-vous connu le Général Etumba du temps des FAZ, comment le jugez-vous en tant que chef d’EMG des FAZ ? Un mot sur le commandant en chef des armées, le président Kabila ?

Le Colonel Ndala je ne connais pas, Je ne suis pas au courant de la composition et articulation des forces qu’il commande sur le terrain. Je vérifie l’identité de Mamadou Ndala. A suivre. En RDC, tout fait partie du ‘secret défense’ même la juxtaposition des forces sur le terrain. Existe-t-il une armée de terre, une armée de l’air et une marine en RDC? Celui qui a fait de Olenga général d’armée et le chef de l’armée de terre, je lui fais confiance. Je ne connais rien sur son passé militaire.

Je n’ai pas connu personnellement le général Etumba mais j’ai entendu dire qu’il était capitaine en 1994. Je ne suis pas honnêtement capable de juger son rendement.

Mais demain lorsqu’il faudra réformer l’armée, il faudra respecter les traditions militaires. Par exemple, tenir compte que les anciens doivent se comporter en tant qu’aînés face à leurs cadets ne fut ce que d’un jour.

Que les subalternes n’entretiennent pas des relations privilégiées avec les supérieurs de leurs chefs hiérarchiques, et que les officiers cessent de regarder leurs hommes la tête baissée. Sinon ils ne mèneront jamais leurs hommes au combat.

Je trouve Kabila aphone comme commandant suprême des Fardc. A mon avis, il pouvait installer un quartier général avancé à Kisangani ou à Bukavu et effectuer des visites d’inspection régulièrement. Les nominations des généraux n’étaient pas une priorité. D’ailleurs cela constitue une raison de démotivation pour les hommes qui se trouvent au front.

Fin de la deuxième partie (A suivre)

Propos recueillis par Jean-Jacques Wondo / Exclusivité Desc-Wondo.org