Jean-Jacques Wondo Omanyundu
DÉFENSE & SÉCURITÉ GLOBALE | 16-02-2014 02:22
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Retro : Le Colonel BEM Pierre Fwamba et la Gendarmerie nationale zaïroise

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Retro : Le Colonel BEM Pierre Fwamba et la Gendarmerie nationale zaïroise

Par Jean-Jacques Wondo

Dans sa tradition d’informer et d’éclairer ses lecteurs sur les aspects militaires et sécuritaires autour de la RDC, DESC s’est également donné pour mission de parler de l’une ou l’autre gloire du passée ou actuelle de la RDC. C’est dans cette perspective que ce jour du 16 février 2014, pour commémorer le 17ème anniversaire de sa disparition, nous présentons un officier que nous avons personnellement apprécié, le feu Colonel breveté d’état-major (BEM ) Pierre Fwamba Lumpungu.

Col BEM FWAMBA I (4) Le Colonel BEM Pierre Fwamba a fait partie de la crème de l’élite militaire congolaise. Né le 10 novembre 1948 à Tshiendela au Kasaï-Occidental, aîné d’une fratrie de trois enfants, il entame sa brillante carrière militaire en Belgique à l’École royale des cadets, l’école préparatoire à École royale militaire (ERM) en 1966. En 1968, il sera admis comme élève-officier à la prestigieuse académie militaire belge ERM où il sera orienté vers la section Toutes Armes pour se préparer à la spécialisation pour la gendarmerie.

A ce titre, il poursuivra en même temps une licence (master) en criminologie à l’Université d’État de Liège qui était un point de passage obligé pour tous les futurs officiers (francophones de Belgique) de gendarmerie ; les néerlandophones (flamands) étaient orientés vers l’Université de Gand. Sa licence en criminologie acquise, c’est à l’École d’Application de l’École royale de gendarmerie (ERGd) qu’il ira enfin décrocher son diplôme d’officier. A l’ERM, il sera de la même promotion que les généraux Odimula (actuellement dans la PNC) et Moya (FARDC), Lungele et Ukanda. Nous reprenons ici un document vidéo d’archives sur la vie des élèves officiers formés à l’Ecole Royale des Cadets (Loin du Congo). Dans ce document réalisé probablement entre 1967 et 1968, on peut le reconnaitre (la première personne que l’on voit en train de courir) ainsi que l’ex Colonel militaire Dr Jean-Marie Tepatondele, le Colonel BEM Fwamba, le Général Odimula et même l’ancien président burundais Jean-Baptiste Bagaza (vers la 7ème minute)
http://www.youtube.com/watch?v=cBGp8y1oDTc&feature=player_detailpage
. A l’ERM, il eut l’actuel général FARDC Kabeya Nkongolo comme parrain.

A son retour au pays, il va occuper divers postes de commandement au sein des FAZ (Forces armées zaïroises) qu’il va exercer pratiquement partout au Congo (Zaïre) en commençant par le Shaba (Katanga) en 1974, Kinshasa en 1976 et le Bandundu en 1979. Il reviendra à Kinshasa en 1981 pour suivre au Centre supérieur militaire à Kinshasa-Ngaliema (Ozone) une formation de technicien d’état-major (TEM) dont il décrochera le titre TEM. Il sera ensuite muté dans le Haut-Zaïre (Province–Orientale) à Yangambi. De 1982 à 1984, il est Commandant du bataillon territorial de la Gendarmerie à Uvira dans le Kivu (avant sa scission en trois provinces). Sa passion pour la maîtrise de la science militaire le ramènera à nouveau en Belgique en 1984 pour étoffer sa formation d’officier à l’Institut royal supérieur de la défense (IRSD), École de guerre, où il obtiendra son titre de breveté d’état-major en 1986 en même temps que le feu colonel BEM Tsheke et le major Bonga.

Son brevet d’état-major obtenu, il retourne au pays et sera nommé commandant de l’École d’Application de la Gendarmerie (EAPPLI). Il occupera par la suite la fonction de G3 comme directeur chargé d’instruction et d’organisation des FAZ lorsque l’amiral Lomponda et le général Manzembe seront successivement chefs d’état-major général des FAZ fin des années 1980 jusqu’en 1991. Il sera ensuite – Commandant en second de la région militaire de la province de l’Equateur puis Commandant Circo de la Gendarmerie nationale de la province du Maniema. Nous reviendrons plus bas sur la signification et les missions de la Circo.

Le Colonel BEM Pierre Fwamba a côtoyé d’autres valeureux officiers décédés dans les conditions nébuleuses après la victoire de l’AFDL, parmi lesquels le Colonel BEM Kajuba et les Colonels Tsheke (ancien commandant du Centre supérieur militaire sous les FAZ) et Ntondele assassinés au port de Matadi en 1998 par des soldats dépendant directement de certains chefs militaires, en connivence avec les Rwanda, qui occupent actuellement la haute hiérarchie des FARDC. Il a notamment servi sous les ordres des généraux suivant Elesse (retraité), Denis Kalume (Lt-Gen FARDC), Kisempia (Gen d’armée retraité en juillet 2013), Mukobo (Gen de corps d’armée en exil) et les généraux Shabani, Mulumba Mbote etc.

La jalousie, le tribalisme et la politisation étant devenus pratiques courantes au sein des FAZ, il mourra de suite d’empoisonnement le 16 février 1997 en pleine guerre de l’AFDL. Ses hauts faits d’armes au sein des FAZ, particulièrement dans la Gendarmerie, lui vaudront d’être honoré du titre de chevalier de l’ordre national du Léopard. En ce jour de commémoration de sa disparition, les pensées de DESC vont vers sa famille et ses deux fils, Crispin et Berne Fwamba.

La Gendarmerie nationale zaïroise

Pour rappel, en 1966, la Police Nationale de la RDC dépendait du ministère de l’intérieur. Elle comptait environ 25.000 hommes et avait pour mission d’assurer et le maintien l’ordre public et de la sécurité dans les villes et les milieux ruraux.

Par Ordonnance présidentielle du 31 juillet 1972, la Gendarmerie Nationale fut créée en remplacement de la Police Nationale (dissoute par la même Ordonnance-loi du 31 juillet 1972). Elle fut placée sous l’autorité du ministère de la défense par Ordonnance-loi du 31 juillet portant intégration des éléments de la gendarmerie nationale au sein des FAZ dont elle constituait un peu plus de la moitié de l’effectif total. Elle comptait à sa création environ 21.000 hommes et avait pour mission d’assurer également le maintien et le rétablissement de l’ordre public et des missions de police judiciaire. Elle a été très longtemps commandée par le Général Bolozi Gbudu Tanikpa, beau-frère du président MOBUTU.

Elle était subdivisée en deux composantes, suivant le modèle belge de l’époque :

         La Gendarmerie Territoriale, qui gardait les mêmes missions que l’ancienne Police Nationale et

         La Gendarmerie Mobile, qui était une force paramilitaire capable de se transformer en une unité des fantassins (force terrestre) en temps de guerre, d’où la spécificité de la gendarmerie par rapport à une simple force de police – qui devrait protéger le pays contre l’agression extérieure ; et appuyer les unités de la Gendarmerie territoriale en cas de situations majeures d’atteinte à l’ordre et la sécurité publiques.

Vers la fin des années 1970, la gendarmerie comptait environ 30.000 hommes, répartis sur neuf circonscriptions (Circo), soit une « Circo » par région (province) du pays.

Vers les années 1980, les conditions déplorables de formation, d’encadrement et de vie ainsi que la capacité opérationnelle limitée des gendarmes rendirent l’exercice de leurs missions difficile et souvent inefficace. C’est durant la même période que Mobutu va opérer un dédoublement en créant la Garde civile (GaCi) qui sera une force paramilitaire prétorienne spécialisée particulièrement pour les missions de police de frontière et naviguant entre l’armée et la gendarmerie, selon les intérêts que ses chefs pouvaient en bénéficier (Lire Les Armées au Congo-Kinshasa…)

Rappelons que la «Circo» de la gendarmerie de Kinshasa, devenue depuis 1998 l’Inspection provinciale de Kinshasa (IPK), etait située dans la commune de Lingwala, en face du Palais du Peuple. Elle disposait d’une unité spéciale de triste mémoire : la Brigade Spéciale de Recherche et de Surveillance (BSRS). La BSRS était chargée d’investigations de police criminelle dans les cas d’infractions criminelles graves de droit commun. Mais il arrivait souvent que cette section de la police judiciaire se transforme en une police politique pour traquer les opposants.

MROPLes officiers-élèves congolais (1992) en béret noir de la Gendarmerie zaïroise lors de la formation aux exercices de maintien de l’ordre public en Belgique. De g. à dr. : M. Mbaya, JJ Wondo, L. Betoko, JD Ebosiri, J. Ziambi K., J. Seke, L. Matalatala, C. Mbala et le Commissaire M. De Jong (alors Major et responsable de l’instruction à l’ERGd) et actuellement un des responsables dudu programme EUPOL-RDC.

La BSRS assurait les missions dévolues auparavant au redouté 2ème Bureau d’état-major de la Gendarmerie (B2, service de renseignement et d’action opérant au sein des 24 zones ou communes de la ville de Kinshasa. Au contraire des gendarmes de unités territoriales et mobiles  qui opéraient en uniforme avec béret noir, les agents de la BSRS agissaient toujours en tenue civile et avec des voitures banalisées.

Jean-Jacques Wondo / Exclusivité DESC

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