RDC : Le patriote Général d’armée Dieudonné Kayembe Mbandakulu a tiré sa révérence
Un officier de grande qualité, au service de la nation
L’ancien chef d’état-major général des Forces armées de la République démocratique du Congo, le général d’armée Dieudonné Kayembe Mbandakulu Tshisuma est décédé dans la nuit du mardi 4 au mercredi 5 juillet 2017, à la Clinique Ngaliema à Kinshasa. La nouvelle nous est transmise par Nguma Mobundi Pe Molong.
Le général Kayembe est né le 9 avril 1945, il était originaire du Kasaï-Oriental. Il fait ses études primaires à l’Athénée de Lubumbashi et sa scolarité secondaire à Mbuji-Mayi au Kasaï Oriental.
En 1966, avec son frère d’armes le colonel Philippe Bikinkita, il est admis à la prestigieuse Ecole Spéciale Militaire française de Saint-Cyr, située à Coëtquidan en Bretagne. Une école qui a formé les grands noms de l’armée française et du monde, dont le général Charles de Gaulle. D’autres congolais, comme le feu général de brigade Célestin Ilunga Shamanga, un de mes mentors et ancien officier de sécurité au bataillon de sécurité de la brigade spéciale présidentielle (BSP), ancien commandant de la brigade de sécurité et honneur du régiment d’artillerie de la DSP, ancien chef d’état-major particulier du président Mobutu dont il était le dernier ministre de l’Intérieur, passeront également dans cette institution de renommée internationale.
En 1968, à l’issue de cette formation, il est admis à la célèbre Ecole d’application de l’arme blindée cavalerie de Saumur, en France. Cette école forme les cadres des unités blindées à 3 niveaux : commandant d’escadron, chef de peloton, chef de char et apporte sa compétence en participant à la formation dans les domaines du tir et de la manœuvre blindée. Une école qui a formé aussi l’ancien président burundais Pierre Buyoya. L’actuel Général de brigade Guillaume Baloko – Commandant adjoint chargé de l’Administration et Logistique au sein de la 1ère Zone de défense est également diplômé de Saint-Cyr et de l’École de Cavalerie de Saumur en France[1] .
Il y effectua un stage de six mois. Mais il approfondira ses connaissances militaires, après avoir réussi un concours, à l’Ecole de commandement à Fort Knox, Kentucky, aux Etats-Unis, où il obtiendra le fameux brevet d’État-major (BEM).
Au sein des FAZ (Forces armées zaïroises), le général Kayembe va s’occuper, vers la fin des années 70, de la logistique (T4) au sein de la Division Kamanyola, au Shaba (Katanga). Ayant participé aux deux guerres du Shaba en 1977 et 1978 contre les ex-gendarmes katangais appelés « Tigres », il portera également le patronyme de Tigre comme le feu Donatien Mahele Lieku.
Un riche carrière militaire semée d’embûches
Son parcours militaire connaitra un frein dans les années 1980 lorsqu’il sera « relégué » au Kasaï sur décision du président Mobutu, suite à «l’affaire Mukobo». En effet, en 1986 dans une fausse affaire de livraison d’armes belges au Zaïre, le général Paul Mukobo, originaire du Bandundu, occupait la fonction de chef d’état-major de la force terrestre au sein des FAZ, il était assisté par le colonel Dieudonné Kayembe, un luba du Kasaï-Oriental. Deux régions (provinces) connues à l’époque pour leur opposition au maréchal président. Ces postes stratégiques leur valurent la jalousie tribalo-militaire de leurs homologues originaires de l’Equateur. Un groupe d’officiers, n’appréciant pas leur zèle et leur dévouement pour les FAZ. Ainsi, pour les neutraliser, ils attribuèrent au général Mukobo, en juillet 1987 une fausse «tentative de Coup d’Etat » à la suite de la découverte d’armes, don de la Belgique, sute à une mission officielle de travail effectuée dans ce pays[2], éternellement suspecté par tous les gouvernements congolais de comploter contre les dirigeants congolais. Ils seront relégués à l’intérieur du pays, victimes de la ‘tribalisation’ des FAZ, le même fléau qui ronge les FARDC.
Après l’arrivée au pouvoir de Laurent Désiré Kabila, en mai 1997, le colonel Dieudonné Kayembe est nommé directeur de cabinet adjoint au ministère de la Défense. Il sera promu au grade de général de brigade. Il est nommé successivement vice-ministre de la Défense, puis de la Reconstruction. Il occupera également la fonction de chef d’État-major du quartier général des Forces armées congolaises en 2002, puis celle de directeur général de la Détection militaire des activités anti-patrie (DEMIAP), le service de renseignement militaire Congolais de l’époque.
Le 12 juin 2007, il est élevé au grade de lieutenant-général et nommé chef d’état-major général des FARDC par ordonnance présidentielle. Il remplace à ce poste le Lieutenant- Général Philémon Kisempia Sungilanga.
Avec le ministre de la Défense, Chikez Diemu, le lieutenant-général Dieudonné Kayembe Mbandakula vont concevoir, à l’issue de la table ronde sur le réforme du secteur de sécurité, tenue à Kinshasa du 25 et 26 février 2008, les plans spécifiques pour la réforme de l’Armée, de la Police et de la Justice. Cela leur permettra d’élaborer le Plan Directeur Global de la réforme de l’Armée (2008 – 2020)[3].
Un de ses hauts faits patriotiques dont les générations futures – notamment les militaires congolais – devront retenir en signe de devoir de mémoire, est son refus catégorique de voir les troupes – d’invasion – rwandaises revenir opérer encore au Congo dans le cadre de l’opération « Umoja wetu« [4]. Il s’agit là d’un acte très courageux qui mérite d’être souligné et rappelé et d’une posture républicaine de sa fonction d’officier dont seule la défense de la république compte. C’est ainsi que le général John Numbi, inspecteur général de la Police Nationale Congolaise de son état, sera choisi pour la mise en œuvre de l’opération militaire conjointe des troupes rwandaises et des FARDC[5]. Ce refus lui coûtera son poste. En octobre 2008, il sera remplacé à la tête de l’armée par le général d’armée Didier Etumba, l’actuel Chef d’Etat-major général des FARDC.
Le général d’armée Dieudonné Kayembe Mbandakulu aura marqué plusieurs générations de militaires congolais, par son exemple, son dévouement et son coaching et formation d’un grand nombre de militaires congolais dont certains occupent les plus hautes fonctions actuellement.
C’est l’occasion pour DESC de lui rendre un vibrant hommage patriotique en signe de reconnaissance aux loyaux services qu’il a rendus à la nation Congolaise et ce, dans un esprit d’unité de toutes les forces militaires dans une période très critique de l’évolution sociopolitique de la RDC.
Au nom de toute l’équipe de DESC, nous présentons de tout cœur nos profondes condoléances à sa famille biologique et à toute la famille militaire congolaise pour cette grande disparition pour la nation congolaise.
Que la terre de nos ancêtres lui soit clémente et douce.
Merci et adieu Mon Général!
Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Administrateur-Général de DESC
Références
[2] Jean-Jacques Wondo Omanyundu, Les armées au Congo-Kinshasa. Radioscopie de la Force publique aux FARDC, Ed Monde Nouveau/Afrique Nouvelle, Avril 2013, pp.85-86.
One Comment “RDC : Le patriote Général d’armée Dieudonné Kayembe a tiré sa révérence”
GHOST
says:¤ LA PROTESTATION D´UN GENERAL !
Un fait qui avait attiré notre attention quand le général Kayembe avait assumé les fontions de chef d´EMG des FARDC est sa « protestation » contre la politique de la « cooperation militaire » de la RDC*
Rares sont les généraux congolais qui ont pris le risque de se prononcer sur la politique de la défense de la RDC* S´il faut citer le général Mahele qui lors de la Conférence Nationale avait fait un speech politique de très haut niveau, car il s´était pratiquement projetté dans le futur en expliquant aux conférenciers que l´armée au Congo dans le futur devrait être une armée du « peuple » et au service de la démocratie*
Ce speech du général Mahele devrait servir d´inspiration á ceux des congolais qui aspirent á prendre la direction du pays en cas d´alternance dans quelques mois.
En effet, le général Mahele avait non seulement fait comprendre aux politiciens congolais que leurs compatriotes engagés dans l´armée étaient des « fils du peuple », mais surtout il avait insisté sur l´injustice sociale qui frappe tous ceux des congolais qui font le choix de servir leur pays sous les armes*
Le général Kayembe a fait encore mieux, car sa « protestation » qui denonce (encore de nos jours) le concept « cooperation militaire » où aucune évaluation critique de ces « cooperations » n´est faite, aucun critère de performance n´est visible de la part du gouvernement, oui ce général est entré dans l´histoire quand il avait dit tout haut dans les medias » ON NE FORME PAS DES BRIGADES COMME DES BEIGNETS »
Ce général avait tout simplement protesté contre la politique de la défense du gouvernement congolais. On se demande si le ministère de la défense de la RDC associe l´EMG de l´armée dans les negociations avant de signer un accord de cooperation militaire?
L´histoire nous enseigne que ces fameuses « BRIGADES » formées au rabais, sans critère de performance, sans transfert des équipements ou des connaissances, sans évaluation ect…n´existent même pas de nos jours.
Face á Laurent Nkunda qui avait pris la ville de Bukavu, ces fameuses brigades ont tout simplement implosées !
Les congolais se souviendrons de ce général qui a pris le courage de remettre en question une cooperation militaire qui en principe ne pouvait pas obtenir un tel accord avec la RDC, car ce pays qui devait former ces brigades ne possede pas assez des ressources technologiques, militaires ou financières pour former des « brigades » qu´il faut équiper, loger, dans un pays où les conditions logistiques sont horribles et les besoins en matière de défense sont si immenses*
http://www.ttu.fr/syrie-berets-verts-kurdes/
La protestation du général Kayembe est toujours d´actualité car il suffit d évaluer toutes les cooperations militaires de la RDC depuis 10 ans pour admettre que notre pays n´a jamais fait le RETEX (retour d´experience) des diverses formations dont les FARDC ont beneficiées*
Á suivre*