MISSIONS DIPLOMATIQUES ACCREDITEES EN REPUBLIQUE
DEMOCRETIQUE DU CONGO AU SUJET DE L’APPUI DE LA COMMUNAUTE
INTERNATIONALE AU PROCESSUS ELECTORAL
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et Chefs des missions diplomatiques,
1.- Au nom de l’Institut Alternatives et Initiatives Citoyennes pour la Gouvernance
Démocratique (I-AICGD), nous avons l’honneur de vous saluer et soumettre à votre
bienveillante attention le présent mémorandum au sujet de l’appui de la communauté
internationale au processus électoral en République Démocratique du Congo (RDC).
Pour y parvenir, qu’il vous plaise de nous laisser exposer d’abord notre position en ce qui
concerne le calendrier électoral (1), le fichier électoral en cours de finalisation, et son audit (2),
avant de nous appesantir sur le rôle de la communauté internationale (3).
I. A PROPOS DU CALENDRIER ELECTORAL
2.- La première question que notre organisation (de la société civile) s’est posée, comme bien
d’autres organisations de la société civile, était celle de savoir s’il fallait soutenir ou non le
calendrier électoral publié par la CENI le 5 novembre 2017 ? Ledit calendrier prévoit, non sans
remous, la tenue des élections, alors initialement prévue au plus tard le 31 décembre 2017 par
l’Accord politique global et inclusif (APGI), le 23 décembre 2018. Certains partis politiques et
organisations de la société s’étant livrés aux projections dans le même sens n’ont pas hésité à
relever les faiblesses et incohérences de ce calendrier et même à trouver possible la tenue des
élections au plus tard entre les mois de juillet et de septembre 2018. Cependant, mettant au profit
son monopole dans ce domaine, la CENI, a décidé discrétionnairement de la date des élections au
23 décembre 2017. Pourtant, l’exercice aurait dû se faire conformément au cadre juridique, lequel
est constitué non seulement de la Constitution et des lois pertinentes, mais aussi et surtout de
l’APGI sus-évoqué qui demeure le socle, véritable feuille de route à même de conduire à
l’alternance politique et la passation civilisée du pouvoir en RDC.
3.- C’est ainsi que le leadership de l’I-AICGD est resté fort contrasté face à la question ci-dessus
posée, la seule préoccupation étant d’avoir de « bonnes » élections le plus tôt possible afin de
tourner la page d’un régime porté par une Majorité présidentielle intolérante face à une opposition
émiettée et incapable de faire valoir une position commune sur des questions fondamentales de la
vie nationale. L’expérience de la tournure prise par la signature de l’engagement particulier
devant préciser les modalités de la mise en oeuvre de l’APGI conseille la prudence. Portant, l’idéal
aurait été que le calendrier électoral publié fut d’abord proposé aux parties prenantes comme
document d’échanges inclusifs afin de dégager un consensus électoral à même d’asseoir l’action
de la CENI en dehors de toute controverse.
4.- Avec 17 contraintes, qui en fait constituent le nombre de fois que les élections peuvent encore
être reportées si elles ne sont véritablement pris en charge, le calendrier publié mérite appelle
l’engagement de tous pour sa mise en oeuvre effective.
II. LE FICHIER ELECTORAL EN COURS DE FINALISATION ET SON AUDIT
5.- A en croire les missions d’observation de cette opération électorale, principalement la
SYMOCEL et la JPC/CENCO, le choix stratégique opéré par la CENI, évoquant sans raison le
I-AICGD
Institut Alternatives & Initiatives
Citoyennes pour la Gouvernance démocratique
« CONSTRUIRE LA DEMOCRATIE AU COEUR DE L’AFRIQUE PAR LA RECHERCHE, L’EXPERTISE ET L’ENGAGEMENT CITOYEN »
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rapport de l’OIF pour procéder à la refonte totalement du fichier électoral, a servi d’alibi à
l’enlisement du processus électoral. Le temps a été manipulé de telle sorte que cette opération a
pris le temps qu’elle a pu sans être achevé à ce jour. Même si la sécurité a posé quelques
difficultés pour sa poursuite dans certaines zones du Kasaï, les choses sont faites sans qu’elles ne
donnent l’impression de quelques leçons tirées des processus antérieurs en 2006, 2011, 2015 à ces
jours.
6.- Le fichier qui en sort ne sera pas indemne des critiques : il y aura toujours les jeunes majeurs
non-inscrits, des personnes déplacées, des personnes décédées, des mineurs et autres personnes
non éligibles à l’enregistrement sur le fichier électoral. Le calendrier électoral prévoit un audit du
fichier après toutes les activités de dédoublonnage qui permettent de le fiabiliser. Tout en sachant
que l’audit a essentiellement qu’effet constatatif et non curatif, l’I-AICGD s’est demandé à quoi
servirait cet audit ? Au cas où il révélait des faiblesses et incohérences, devrait-on le remettre en
cause puis reprendre l’opération ou bien aller aux élections sans désemparer ? Dans la première
hypothèse, il serait utile. Tandis que dans la seconde, il est souhaitable que l’on s’interroge sur sa
pertinence surtout qu’il est prévu d’intervenir avant même l’enrôlement des congolais vivant à
l’étranger.
7.- A propos de l’enrôlement des congolais vivant à l’étranger, de l’avis même du Président de la
CENI exprimé au cours de l’atelier d’évaluation citoyenne de l’APGI du 31 décembre 2016
organisé par l’I-AICGD du 8 au 9 novembre 2017 à Kinshasa, cette opération n’est pas facile à
réaliser. C’est pour cette raison que les participants à cette activité avaient recommandé à la CENI
d’initier des concertations avec les organisations de la diaspora pour avoir leur avis sur cette
opération qui risque d’être à la base de l’enlisement du processus électoral.
III. LE ROLE DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE
8.- Le rôle de la Communauté internationale est à situer aussi bien politique que de l’appui au
processus électoral.
9.- 1°. Du point de vue strictement politique, l’I-AICGD est anticipativement préoccupé par
plusieurs questions qui, en principe, méritent dès à présent une réflexion de toutes les parties
prenantes. En effet, selon l’APGI du 31 décembre 2016, les parties ont convenu que les élections
aient lieu au plus tard le 31 décembre 2017 ? A ce jour, il serait bien utopique de croire que
lesdites élections puissent avoir lieu à cette date. Le calendrier électoral en fait foi. Dès lors,
qu’est-ce qui arriverait à la date du 31 décembre 2017 en ce qui concerne la gestion des
institutions ? Passé cette date, qu’est-ce qui pourrait désormais rassurer toutes les parties
prenantes du respect scrupuleux du calendrier et de la tenue des élections dans le délai proposé par
le calendrier ? Comment empêcher que nul facteur ne vienne perturber la poursuite normale du
processus électoral ? Et qu’adviendrait-il si les élections n’ont pas lieu encore une troisième fois à
la date du 23 décembre 2018 ?
10.- Ces questions trouveraient bien des réponses crédibles si l’APGI avait été mise en application
de manière effective. Ce qui n’est pas le cas pour l’instant et qui appelle une implication de la
communauté internationale, notamment via le mandat de bons offices de la Monusco, pour la
construction d’un consensus devant apaiser le contexte préélectoral.
11.- 2°. Au sujet de l’appui proprement dit, l’I-AICGD invite la communauté internationale à
s’investir dans le soutien au processus électoral. Cela revient à définir des référentiels pour la
CENI qui détermineraient cette aide financière.
12.- En effet, dans l’APGI, les parties prenantes recommandent « à la communauté internationale
à accompagner et à assister la CENI par les moyens logistiques, financiers et techniques pour une
bonne réalisation des opérations électorales », en même temps qu’ « elles exigent de la CENI la
transparence dans la passation des marchés et l’encouragent à produire un budget rationnel pour
l’ensemble des opérations préélectorales, électorales et postélectorales conformément à l’option
levée et assorti d’un plan de mise en oeuvre opérationnel crédible et réaliste » (Point IV.4).
13.- Pour concrétiser cette exigence, l’I-AICGD souhaite que les choses soient faites dans la
transparence maximale. C’est-à-dire que, tablant sur le calendrier et ses contraintes, la CENI
devrait mettre à disposition des parties prenantes le plan de mise en oeuvre opérationnel et le coût
détaillé de chaque opération sur la base desquels la communauté internationale, de manière
coordonnée, devrait se prononcer clairement sur les lignes budgétaires qu’elle devrait prendre en
charge. Une fois cela fait, un plan de décaissement devrait être convenu entre la CENI et les
partenaires d’appui en présence de la société civile congolaise et le Groupe d’experts
internationaux dédiés au suivi du processus électoral. Par ailleurs, des mécanismes rapides de
décaissement des fonds dans le panier de fonds devraient être mis en place.
14.- Il va ainsi sans dire que l’appui logistique assuré par la Monusco conformément à son mandat
découlant de la Résolution 2348 du Conseil de Sécurité devrait également être quantifié et intégré
dans ledit budget pour permettre une évaluation précise du coût global et déterminer l’apport de
chaque partie prenante au budget des élections.
15.- C’est dans ce même cadre que devraient être institué le Groupes d’experts envisagé par
l’Assemblée Générale des Nations Unies. Ce groupe à mettre en place a besoin d’un mandat clair,
précis pour l’épargner des limites des simples observateurs ne disposant d’aucun pouvoir
d’initiative, d’action, ni de contre-expertise ainsi que la liberté de collecte de données d’analyses.
16.- Pour terminer, l’I-AICGD réitère sa demande à la communauté internationale de poursuivre
et renforcer son appui direct aux organisations de la société civile pour des campagnes accrues
d’éducation civique et électorale au profit de la population et des activités d’observation citoyenne
des élections à long terme et à court terme couvrant l’ensemble du territoire nationale en vue de
renforcer la crédibilité du processus électoral.
17.- Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et Chefs des missions diplomatiques, l’IAICGD vous exprime toute sa gratitude par avance et vous assure en même temps de sa
disponibilité à échanger avec vous davantage sur l’avenir politique et les perspectives
électorales en RDC à présent qu’un calendrier électoral a été rendu public.
Veuillez agréer l’expression de notre ferme engagement citoyen.
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