Jean-Jacques Wondo Omanyundu
POLITIQUE | 18-03-2016 17:07
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Opinion : Si Etienne Tshisekedi rectifiait le tir ce 24 avril 2016 ? – JJ Wondo

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Le 24 avril 2016 : Si Etienne Tshisekedi rectifiait le tir de la démocratisation ratée des années 1990?

Une opinion de Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Cet article énonce mon opinion personnelle face aux enjeux politiques actuels en République démocratique du Congo (RDC) où tout est planifié par le président Kabila et son gouvernement, se servant de la CENI et des institutions judiciaires, pour retarder, voire bloquer, sciemment le processus électoral devant aboutir à l’alternance au pouvoir au 19 décembre 2016. Pour éviter le naufrage de la RDC et un retour en arrière vers un ordre politique dictatorial, j’invite tous les Congolais à se ranger derrière la grande figure politique et historique de Monsieur Etienne Tshisekedi, élevé en patrimoine national, pour une grande action nationale ce 24 avril 2016 dans le but de contraindre M. Kabila et son régime à l’alternance au pouvoir dans les délais constitutionnels. J’assume l’entière et unique responsabilité du contenu de mon opinion personnelle.

TSHISEKEDI-ET-PARTISANS

Le premier printemps congolais d’avril 1990

Le 24 avril 1990, le maréchal Mobutu, président du Zaïre (aujourd’hui la RDC), dans un discours pathétique à la nation, met fin au monopartisme dominé par le MPR (Mouvement populaire de la révolution-Parti-Etat) et décrète le début d’un processus de démocratisation du pays marqué par le multipartisme.

Cette décision intervient dans un double contexte sociopolitique interne et géopolitique international particulier. Alors que des stratèges autour de Mobutu, qualifiés de « colombes », partisans d’un pouvoir ouvert et conciliant, s’y étaient affairés des années auparavant pour amorcer une certaine ouverture vers les opposants au régime Mobutu. Contrairement aux faucons qui étaient pour un pouvoir pur et dur.

En effet, le discours du 24 avril 1990 est compris comme une résultante de la conjonction d’une part, de la mission de consultations populaires menées avec dextérité par deux cadres du régime de l’époque, qualifiées de colombes[1], l’ambassadeur Roger Nkema Liloo, ancien conseiller spécial de MOBUTU chargé de la sécurité (surnommé père de la perestroïka) et l’actuel sénateur Edouard Mokolo wa Mpombo. Et de l’autre part, des bouleversements politiques survenus en Europe de l’Est, la chute du mur de Berlin consécutifs à la Perestroïka soviétique initiée par le Secrétaire général et Présidente de l’Union soviétique (URSS) Mikhaïl Gorbatchev et la chute du mur de Berlin, le 9 novembre 1989. Le maréchal Mobutu, soumis aux intenses pressions diplomatiques occidentales pilotées par Washington, initie les « consultations populaires ». Pour ce faire, à partir de fin 1989, le « Président-fondateur du MPR » dit « PF », avait sillonné toutes les provinces de la RDC, à l’époque Zaïre, pour sonder les Zaïrois sur les changements sociopolitiques attendus du régime issu du 24 novembre 1965. Ces consultations avaient été clôturées par la capitale où, toutes les couches de la population étaient représentées le 24 mars 1990, à la Cité du parti à N’Sele[2]. Il faut aussi rappeler que la genèse de ce processus démocratique se situe au début des années 1980 à la suite de la lettre des « Treize parlementaires » qui a abouti à la création du parti UDPS (Union pour la Démocratie et la paix sociale) dont Tshisekedi, Nguz karl-i-Bond, Mbwankien et Kyungu étaient des figures les plus populaires.

Ce discours enclencha une période de transition politique chahutée et chaotique marquée par une bipolarisation de la vie politique entre Mobutu et son camp politique, la « Mouvance présidentielle » d’un côté et Etienne Tshisekedi autour duquel s’est constituée une l’ « Union sacrée de l’opposition » (et alliés) et quelques leaders de la société civile de l’époque dont Pierre Lumbi Okongo, Modeste Bahati, Modeste Mutinga, etc., ainsi que la puissante église catholique. L’épreuve de force entre Mobutu et Tshisekedi tourna plutôt au début, en faveur de l’opposition et des forces du changement incarnées par Etienne Tshisekedi, ancien haut cadre du MPR considéré même comme un des pères du « Manifeste de na N’sele », le livre de la doctrine du parti. C’est dans ce rapport de forces favorable à l’opposition que Mobutu, après plusieurs tentatives de récupération du jeu politique, fut contraint à convoquer la Conférence nationale souveraine (CNS) qui élit de manière triomphale Etienne Tshisekedi au poste de Premier ministre de la première transition. Mais les faucons du régime ne s’étaient pas avoués vaincus. Par le jeu d’achat et de débauchage d’opposants, de multiplication des faux partis alimentaires d’opposition dont l’UDI (Union des démocrates indépendants) de Léon Kengo wa Dondo et de durcissement de la répression – via le terrorisme d’Etat – contre l’opposition et les contestataires du régime mené particulièrement par le trio Nzimbi, Baramoto et Ngbanda, Mobutu parvint bon an mal an à récupérer la situation en sa faveur et à bloquer le processus démocratique, en neutralisant Etienne Tshisekedi, considéré par la majorité des Congolais comme étant le père du processus démocratique du pays. Le blocage ou le rétrécissement de l’espace politique va durer six ans.

Une première transition bloquée par Mobutu et son régime failli

Selon Erik Kennes, « la situation sociopolitique du Zaïre en 1996 s’achemina vers un blocage. Le parlement de transition du pays (HCR-PT), qui aurait dû préparer et approuver l’échafaudage juridique pour la tenue des élections permettant de sortir de l’époque MOBUTU, était enlisé dans des querelles politiciennes. La Commission nationale des élections, organe technique et extraparlementaire, ne bénéficiait que de peu de confiance et d’attention de la part de toute la classe politique. Les politiciens de Kinshasa n’éprouvaient pas réellement la volonté affichée d’aller aux élections. La désillusion née de l’échec probable du processus de «démocratisation» avait déjà amené, depuis 1993, des activistes politiques à prendre des contacts avec les chefs d’état des pays limitrophes, sans aboutir à quelque résultat concret. Ils ont pu établir des relations avec des groupuscules de tendance « lumumbiste » résidant en Tanzanie et en Ouganda, héritiers des différents maquis du Kivu des années 1970 et 1980, ainsi que du soutien accordé par la Libye de Kadhafi pendant les années 1980. Des contacts ont eu lieu également avec les « tigres » ou « ex-gendarmes katangais », force militaire relativement importante, opposée à Mobutu et proprement dites[3].

En conséquence, le blocage politique des années 1990, la fin de la coopération technique militaire avec la Belgique et la France, et de la réduction de l’enveloppe budgétaire de l’aide extérieure, la problématique sécuritaire et humanitaire à l’Est de la RDC avaient conduit le pays à une situation de crise sans précédent. Au cours des années 1990, alors que l’État se désagrégeait progressivement, la situation et la capacité militaire des FAZ continuaient elles aussi à se détériorer[4]. Tous les paramètres étaient donc réunis pour décrire le Zaïre des années 1990 comme un Etat en faillite : Un état en dégénérescence qui n’avait plus de puissance légitime sur son territoire. Le zaïre des années 1990, du fait de l’irresponsabilité criante des autorités politiques de l’époque (qui ne se sont jamais remises en question jusqu’à ce jour), était devenu un État déliquescent ou effondré, qui « était confronté à de sérieux problèmes qui compromettaient sa cohérence et sa continuité »[5].

En effet, la thématique de « l’Etat effondré » (collapsed state) ou « échoué » (failed state)[6] désigne en général l’incapacité des Etats à assurer un minimum de fonctions étatiques classiques (et d’abord la sécurité). Il n’y aurait plus de monopole de la violence parce que l’usure du concept d’Etat-nation ferait que les éléments de structuration clanique/tribale prendraient le dessus. Les Etats sont des entités mortelles. Dans l’histoire, le mode le plus classique de disparition est assurément la défaite militaire. Ecrasés, occupés, les vaincus sont phagocytés avec plus ou moins de succès par l’Etat victorieux qui, dans le meilleur des cas, peut progressivement obtenir le soutien des populations qu’il a vaincues. Mais un Etat peut aussi disparaître pour des motifs internes, ce qui renvoie finalement à son incapacité à contrôler sa population ou à satisfaire à ses attentes, notamment dans le domaine de la sécurité. Dans un tel cas de figure, la population refuse à la fois des symboles, son existence même, voire son droit. Les Etats connaissent ainsi des cycles de développement et de régression[7] (naissance, croissance, développement, apogée, déclin, effondrement).

Avec le blocage politique, la CNS a fini par laisser la place à un parlement de transition taillé sur mesure du « maréchal », le Haut conseil de la République-Parlement de transition (HCR-PT) dont les animateurs étaient issus de la CNS.

LD Kabila met fin à la transition politique et Joseph ouvre une nouvelle transition qui instaure le nouvel ordre politique et constitutionnel

La première transition a pris fin le 17 mai 1997. Ce jour-là, Laurent-Désiré Kabila déjà maquisard dans les années 60, met fin aux trente-deux ans de règne sans partage de Mobutu. La rébellion qu’il menait depuis octobre 1996 a bénéficié de l’appui de nombreux pays de l’Afrique des Grands Lacs et des Etats-Unis d’Amérique. Un an après son accession au pouvoir, les anciens alliés de Kabila lancent une nouvelle guerre dans l’est de la RDC en août 1998. Le pays est divisé en trois zones. Kabila meurt assassiné en janvier 2001, sans avoir eu le temps d’organiser les élections. Joseph Kabila son successeur va ranimer les négociations de paix avec les belligérants. Un autre forum, le dialogue inter congolais, est organisé en Afrique du Sud. Une nouvelle transition de trois ans, au détriment d’Etienne Tshisekedi, est entamée en juin 2003. Joseph Kabila est flanqué de quatre vice-présidents (dont deux ex-chefs rebelles, un opposant de factice, Arthur Z’ahidi Ngoma, qui prend la place de Tshisekedi et un allié). La deuxième transition aboutit à l’organisation du premier tour des élections présidentielle et législatives couplées, le 30 juillet 2006, mettant fin aux différentes transitions lancées en 1990. Malgré les irrégularités constatées, Joseph Kabila est déclaré vainqueur de la présidentielle de 2006 contre Jean-Pierre Bemba. Joseph Kabila sera à nouveau déclaré président au terme d’une des élections des plus chaotiques et absurdes du monde en 2011 contre principalement Etienne Tshisekedi qui n’a jamais reconnu la victoire de Kabila, s’autoproclamant entre-temps président élu.

Joseph Kabila en fin mandat veut ramener la RDC à l’ère politique des années Mobutu

Depuis les élections de 2006, la Constitution s’impose comme une référence légale et politique incontournable en RDC. La légitimation du pouvoir en RDC a conduit au vote en 2006 d’un référendum ayant adopté une Constitution qui a consacré l’institutionnalisation de la IIIème République. Cette Constitution a également échafaudé une nouvelle architecture du pouvoir bâti sur des structures dont les animateurs devraient être élus. D’autant qu’après 15 ans d’instabilité sociopolitique et sécuritaire, toutes les forces politiques, militaires et sociales ont convenu, de manière consensuelle, que le pouvoir devait être conquis par le biais des élections libres, démocratiques et transparentes. Ainsi ce pouvoir devait être exercé au sein d’un Etat de droit démocratique.

Les élections ont eu lieu en 2006 et 2011, même si, comme on l’a démontré plus haut, les conditions de leur organisation laissent à désirer car ayant consacré des fraudes planifiées et autres manipulations. Il faut reconnaître cependant que ce sont là des acquis et une avancée politiques majeurs et indéniables, comparativement aux blocages politiques des années Mobutu et Laurent Désiré Kabila, qu’il faille en toute honnêteté mettre sur le compte de l’actuelle classe politique (pouvoir comme opposition) de la RDC. Cela constitue une des grandes valeurs ajoutées de cette Constitution qui introduit désormais une nouvelle philosophie et culture politique d’accession ou de maintien au pouvoir par la voie des élections libres, démocratiques et transparentes et de respect de la Constitution. Mais le piège réside dans le fait que cela ne suffit pas encore pour admettre que le pays est réellement ancré dans une voie d’une réelle démocratisation. En effet, l’effet pervers de cette nouvelle philosophie démocratique est de remplacer l’accession au pouvoir par les armes par une ‘éternisation’ au pouvoir par le tripatouillage des élections et de la Constitution en la taillant sur mesure au gré du temps au profil du président sortant, Joseph Kabila[8]. Cependant, aujourd’hui, partout en RDC, les Congolais intègrent avec force et conviction l’idée qu’un régime démocratique repose sur une Constitution écrite et que la dictature de loi (Etat de droit) doit prévaloir sur le fait des gouvernants ou du Président.

Arrivé en fin mandats constitutionnels, plutôt que de mettre en place des mécanismes durables de consolidation de la démocratie, de l’Etat de droit et de la paix civile, les faits, actes et gestes de Joseph Kabila et de son camp politique montrent plutôt, par des signes apparents de durcissement de son régime, une volonté de retour en arrière vers un ordre politique dictatorial par la violation de la Constitution[9]. Comme le souligne à plusieurs fois le juriste et criminologue Jean-Bosco Kongolo, la violation de la Constitution pour un président de la république est un acte criminel passible de haute trahison et du reste imprescriptible[10].

Partant de ce fait, le glissement électoral n’est pas permis par la Constitution et malgré les tentatives visant à modifier les règles du jeu constitutionnel par un référendum, les Congolais sont invités à recourir massivement à l’application de l’article 64 de la Constitution pour faire échec à toute tentative de renversement du système constitutionnel en cours. Pour ce faire, il faut se ranger derrière une forte personnalité historique dont la constance dans le combat politique depuis les années 1980 lui octroie un leadership moral et politique capable de canaliser la volonté populaire des Congolais pour lutter en faveur l’alternance politique en 2016. Cet homme n’est autre qu’Etienne Tshisekedi wa Mulumba.

Le profil d’Etienne Tshisekedi dressé par le militant lumumbiste Nzogu bin Kyantede

Dans une sorte de lettre ouverte aux congolais, le militant lumumbiste Nzogu bin Kyantede, ancien leader de la jeunesse estudiantine contraint à l’exil forcé par le régime de Mobutu écrit ce qui suit sur le profil politique d’Etienne Tshisekedi. Nous reprenons quelques extraits de son texte :

« Il est le « Père de la démocratie » au Congo post-indépendance. En effet, en 1980, bien longtemps après que les forces réactionnaires regroupées autour de Mobutu aient réduit à PEU DE CHOSES les vieilles insurrections nationalistes des années 1960, et plus de 10 ans avant que la donne géopolitique post-Guerre froide ait permis le pluralisme politique en Afrique, c’est le Dr Etienne Tshisekedi wa Mulumba qui a personnifié la demande congolaise de démocratie. Ce fut une demande têtue et qui semblait « SUICIDAIRE », au même titre que la demande d’indépendance dont ont été porteurs nos Pères de l’indépendance (Kasavubu et Lumumba surtout, même si c’était dans des cadres partisans aux agendas différents) ».
« En réclamant la démocratie en ce temps-là (1980), Etienne Tshgisekdi wa Mulumba peut être considéré comme un citoyen qui a ouvert les voies de l’espoir à son peuple, à notre peuple. Ce dernier risquait de croire qu’un homme, Mobutu, travaillant pour des étrangers (l’Occident capitaliste) et opprimant sa nation, pouvait disposer des biens et de la dignité de millions de Congolais. »
« Le Dr Etienne Tshisekedi, en faisant dissidence au sein d’un MPR dont il fut un architecte et était un dignitaire grassement rémunéré, est un « sauveur de la dignité des intellectuels Congolais ». En effet, et cela se vérifie aujourd’hui…, l’image des intellectuels congolais est celle, méprisante, de courtisans en quête perpétuelle de postes à n’importe quel prix (et surtout à vil prix), y compris au prix de chanter les louanges de personnages objectivement nocifs comme l’a été Joseph Mobutu (tyran et mauvais gestionnaire) et l’est aujourd’hui Joseph Kabila (tyranneau, médiocre gestionnaire et très mauvais général d’armée) ».
« En exprimant ses réserves et critiques publiquement et très vite après la prise de Kinshasa par l’ex-AFDL en 1997, Etienne Tshisekedi wa Mulumba a, de l’intérieur, ouvert les yeux de notre peuple et de nos « élites » sur notre situation d’occupation par l’Ouganda et le Rwanda. Cette occupation était notamment matérialisée par la nomination inédite d’un étranger, le général James Kabarebe, à la tête de la nouvelle armée nationale. Et c’est cette funeste nomination qui a par la suite miné tout notre système de défense ; elle est une des causes des millions de morts de nos compatriotes suite à la longue guerre de prédation et de tentative de démembrement qui frappe notre nation. Même sans partager son credo politique ni s’aligner au sein de sa mouvance politique, il faut donc là reconnaître à Etienne Tshisekdi wa Mulumba des vertus de patriote intransigeant! … »
« (…) Au même titre que Nelson Mandela en Afrique du sud, bien que ce soit dans un contexte national différent (Ndlr : contexte électoral de 2001), Etienne Tshisekedi a illustré cette vieille conviction en Afrique que la vieillesse est utile car porteuse de la sagesse que bâtit l’expérience et du courage que donnent la fin de vie et la renonciation à des gains immédiats… »
« En guise de cadeau dialectique, j’ajoute à notre compatriote et « vieux » Etienne Tshisekedi wa Mulumba une sixième et très importante qualité: il est resté fidèle à ses idées et fidèle à son ancrage partisan. Il est co-fondateur de l’UDPS, et il est resté dans l’UDPS. Pendant ce temps, d’autres vagabondaient par-ci par-là, créant des sigles nouveaux sans nouveaux contenus en termes de programmes.
Face à ce comportement erratique qui donne du monde politique congolais une image d’infantilisme, de situationnisme permanent, de quêtes d’oboles et de « coups fumants », Etienne Tshisekedi a été un fidèle de son parti… tout comme Mandela dans l’ANC qui avait été fondé avant même la naissance de notre cher Madiba! L’Angola n’est-il pas aussi davantage pris au sérieux, car Eduardo Dos Santos, au lieu de se bombarder « président-fondateur » d’un nouveau et énième parti angolais, est resté dans ce MPLA dont il est un militant depuis sa jeunesse kinoise?
« Etienne Tshisekedi wa Mulumba est donc un homme de la continuité dans cet engagement qu’il a pris dès sa dissidence en 1980 du MPR, engagement pour démocratie et pour la double dignité de notre peuple et de ses élites intellectuelles. Il remplit une fonction morale capitale dans notre société désorientée, dans notre nation en formation, et dans notre Histoire qui a besoin de balises humaines fortes pour se poursuivre.

Tshisekedi peut arrêter le glissement de Joseph Kabila en rassemblant tous les Congolais le 24 avril 2016

Partant du portrait dressé par M. Nzogu, nous estimons à notre tour que la personne d’Etienne Tshisekedi, malgré ses faiblesses humaines, est un patrimoine national dont l’aura politique et moral fait autorité chez une très large majorité des Congolais. Le Grand Homme d’Etat qu’est Etienne Tshisekedi est la personne idéale qui peut aujourd’hui rassembler les Congolais du nord et du sud, de l’ouest, du centre et de l’est. Nous lui lançons l’appel de d’adresser aux forces sociales et politiques acquises au respect de la constitution, à l’armée, la police et les services de sécurité et à l’ensemble du peuple congolais et de sa diaspora, un message de mobilisation pour une grande action populaire nationale le 24 avril 2016 en faveur de l’alternance.

En effet, à propos du glissement électoral, il nous semble que la date du 24 avril 2016 soit idéale pour protester contre le blocage du processus électoral par la CENI et le régime Kabila et exiger des actes concrets en faveur de l’alternance au pouvoir. Le calendrier électoral réaliste proposé par l’Asbl APRODEC démontre la faisabilité de la tenue des élections dans les délais constitutionnels si le processus électoral reprend son cours normal en mars 2016 et que le problème n’est pas technique[11]. L’expert électoral Alain Lomandja l’a également démontré de manière académique[12], en plus de préciser que le sabordage du processus électoral est bien politique[13] du fait de l’absence de volonté politique de la CENI inféodée au pouvoir pour éviter d’organiser la présidentielle dans les délais constitutionnels. Il devient de plus en plus probable que c’est vers un glissement forcé et imposé et le refus volontaire d’organiser l’élection présidentielle dans les délais constitutionnels que le régime de Kabila veut contraindre les Congolais. L’annonce de la CENI de vouloir introduire une requête à la Cour Constitutionnelle « pour obtenir une petite extension »[14] du processus électoral, sans en préciser les détails sur la durée est un preuve supplémentaire d’imposer aux Congolais un glissement planifié à des fins politiques pour contourner le respect de la constitution. Les Congolais ne sont pas concernés par la démarche de la CENI ni par le futur arrêt de la Cour constitutionnelle prostituée du régime. Ils vont lutter par tous les moyens et à tout prix pour obliger Kabila et son régime à une alternance au pouvoir dans les délais constitutionnels. Ce n’est pas pour rien que lors de la CHAN, les populations congolaises, non concernées par des manœuvres politiciennes, ont spontanément scandé dans les rues de Kinshasa Yebela. Ce, justement pour prévenir Kabila qu’élections ou non, dialogue ou non, il ne doit plus être au pouvoir au terme de son mandat le 19 décembre 2016.

Il devient de plus en plus apparent que le président Kabila, par l’entremise de la CENI et du Gouvernement congolais, ne cesse de créer de manière ostentatoire et provocatrice des artifices politico-juridiques et diplomatiques visant à consacrer le « glissement » électoral et le faire admettre à l’opinion alors qu’il refuse ouvertement de s’investir activement l’organisation de l’élection présidentielle transparente et démocratique devant assurer l’alternance démocratique le 20 décembre 2016. Ce déni, de la part du président Kabila, de s’inscrire dans une dynamique électorale de respect des dispositions constitutionnelles prévues dans l’exposé des motifs et par les articles 70, 168 et 220 alinéa 1er de la Constitution, qui exigent qu’aucun dépassement de délai du mandat présidentiel n’est prévu, constitue en soit l’élément intentionnel et matériel constitutif de crime de haute trahison pouvant faire valoir le recours à l’application de l’article 64 de la Constitution et à une série d’actions citoyennes et populaires pacifiques ou contraignantes visant à le contraindre au respect de la Constitution dont il est le premier garant.

Si aucun acte fort d’organisation de l’élection présidentielle n’est posé avant la fin du mois de mars 2016, il faudra que les acteurs politiques et la société civile congolais ainsi que les partenaires du Congo tirent les conséquences qui s’imposent. C’est alors que du point de vue congolais, nous estimons que le leadership politique moral De M. Etienne Tshisekedi pourrait jouer un rôle crucial. Le « Père de la démocratisation de la RDC » pourra alors lancer un mot d’ordre général pour la tenue d’une grande manifestation nationale pour la réappropriation et la sauvegarde de la démocratie en péril par les Congolais, le souverain primaire et seul détenteur du pouvoir. Derrière ce mot d’ordre se rangeront les acteurs politiques, la société civile dans toute sa diversité sociale, philosophique ou confessionnelle, l’armée, la police et les services de sécurité ainsi que tous les corps de métiers sociaux professionnels du pays ainsi que la jeunesse estudiantine du Congo pour réclamer dans la rue l’alternance car à partir du mois d’avril 2016, on peut considérer que Kabila veut glisser !

Point n’est besoin de rappeler que L’histoire sociopolitique de la République démocratique du Congo nous enseigne que chaque fois que le peuple s’est aligné en front commun, derrière ses leaders politiques acquis au changement, il a gagné des batailles historiques. Qu’ensemble, les Congolais ont été capables d’écrire les plus belles pages de leur Histoire commune. Cet appel au rassemblement derrière Etienne Tshisekedi procède d’une exigence de l’Histoire car la République démocratique du Congo arrive à un tournant décisif de sa maturation politique. Ainsi, les congolais sont tous appelés à privilégier les valeurs du pacte social, citoyen et républicain qui nous lient.

Il s’agit également d’un défi voire un pari de montrer à la face du monde dont le Congo est devenu la risée qu’un « Congo Uni peut devenir un pays fort ». Paradoxalement, cette devise fut celle du Congo-Belge ! Je lance donc cet appel-défi à Monsieur Etienne Tshisekedi et à tous les Congolais que l’heure est donc venue de mettre de côté nos égos, nos différences et nos divergences pour ne privilégier que l’intérêt suprême de la nation et l’intérêt collectif, le vivre en commun et en harmonie dans cet énorme patrimoine nous légué par nos aïeux dans le but ultime de construire un Congo meilleur, une Nation forte, prospère et solidaire afin de montrer à la face du monde que les Congolais sont capables de prendre en main leur propre destin commun[15].

Avant de penser à une transition sans Joseph Kabila ou à une coalition électorale, il faut d’abord s’assurer ou contraindre au préalable Joseph Kabila à se soumettre de gré ou de force dans le schéma de l’alternance politique. C’est la plus grande priorité des actions politiques, citoyennes ou autres à mener en premier lieu. Ne rêvons surtout pas!

Une opinion personnelle de Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Références bibliographiques

[1] Parmi les colombes du régime de l’époque, on pouvait aussi compter Maître Nimy Mayidika Ngimbi, le sénateur Monda Bonza (ancien directeur de cabinet de Mobutu, Maître le feu Gérard Kamanda wa Kamanda, paix à son âme ou encore les feux généraux Mahele et Mukobo, Atende. Les faucons quant à eux, partisans d’un pouvoir pur et dur et sans partage ni ouverture avec l’opposition, se recrutaient essentiellement dans l’armée, la police et la garde civile (le feu général Nzimbi, le général Philémon Baramoto actuellement conseiller privé de Kabila chargé du maintien de l’ordre public et de la sécurité intérieur), les généraux Likulia, Eluki, Bolozi) et les services de sûreté comme M. Honoré Ngbanda.

[2] Le Forum des As. http://www.congoforum.be/fr/congodetail.asp?subitem=21&id=8158&Congofiche=selected.

[3] Erik KENNES, «La Guerre au Congo», Mars 1998 ou http://www.ua.ac.be/objs/00110992.pdf.

[4] NGBANDA NZAMBO-Ko-Atumba, Honoré, Ainsi sonne le glas ! Les derniers jours du maréchal Mobutu ; Gideppe, Paris, 1998, 447p.

[5] JJ Wondo O., Les armées au Congo-Kinshasa. Radioscopie de la Force publique aux FARDC, 2è Ed. avril 2013, p.197.

[6] Ce concept est largement expliqué par J.L MARRET et A. Didier, Etats « échoués » et Mégapoles anarchiques, Paris, PUF, novembre 2001.

[7] MARRET, Jean-Luc, Crises d’Etat et organisations non étatiques violentes : Etats « effondrés » ou « échoués», in Annuaire Stratégique 2003, Fondation pour la recherche Stratégique, Ed. Odile Jacob, Paris, Juin 2003, p.146.

[8] – See more at: http://afridesk.org/fr/la-iiieme-republique-congolaise-une-democratie-tripatouillee-dans-un-etat-defaillant-jean-jacques-wondo/#sthash.VtFGEEsR.dpuf.

[9] http://afridesk.org/fr/rdc-kabila-est-il-credible-dans-sa-proposition-de-dialogue-national-jean-jacques-omanyundu/.

[10] http://afridesk.org/fr/larticle-64-de-la-constitution-congolaise-fait-il-peur-jean-bosco-kongolo/. Lire aussi : http://afridesk.org/fr/passation-de-pouvoir-en-rdc-larticle-70-de-la-constitution-ne-prete-a-aucune-confusion-jb-kongolo/.

[11] http://afridesk.org/fr/rdc-aprodec-defie-la-ceni-et-publie-un-calendrier-electoral-complet/.

[12] http://afridesk.org/fr/rdc-la-mise-a-jour-du-fichier-electoral-et-lacquisition-des-kits-electoraux-sont-encore-possibles-dans-les-delais-constitutionnels-lomandja/.

[13] http://afridesk.org/fr/de-malumalu-a-nangaa-une-strategie-de-destabilisation-de-la-ceni-pour-saborder-le-processus-electoral-a-j-lomandja/. Lire aussi : http://afridesk.org/fr/vers-un-sabordage-du-processus-electoral-2015-2016-en-rdc-alain-joseph-lomandja/. Ou encore http://afridesk.org/fr/consequences-demission-malumalu/.

 [14]  https://7sur7.cd/new/requete-de-la-ceni-a-la-cour-constitutionnelle-pour-organiser-les-elections-au-dela-de-2016/.

 [15] Inspiré de l’exposé de JJ Wondo à Gorée, le 12 décembre 2015.

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5 Comments on “Opinion : Si Etienne Tshisekedi rectifiait le tir ce 24 avril 2016 ? – JJ Wondo”

  • GHOST

    says:

    « PÈRE DE LA DÉMOCRATIE »?

    On se demande si la démocratie au Congo ne commence qu´en 1980? Et pourtant, Tshitshi est l´un des assassins de la démocratie au Congo après l´indépendance. On retrouve son nom dans les deux coups d´État de Mobutu qui avaient mis fin á la démocratie et au multi-partisme*

    ¤ UDPS LA FILLE AINÉE DU MPR

    L´UDPS est une « dissidence » du MPR en 1980** Entre 1980 et 1965, les fondateurs de l´UDPS étaient des cadres du MPR..Au moins d´eux d´entre eux avaient participés activement aux deux coups d´État de Mobutu en étant membres des gouvernements mis en place après ces coups d´État*

    Avec tout le respect pour l´analyse, Tshitshi avec ses negociations secrétes en Italie et en Espagne a largement démontré qu´il n´est pas le « père de la démocratie » qu´on nous présente ici*
    La démocratie passe par le respect de la constitution, or Tshitshi qui s´était auto-proclamé président n´a eu aucun respect pour la constitution*
    Non, Tshitshi est un homme du passé qui a fait son temps* Le jour où il va publier ses memoires en expliquant son rôle dans l´assassinat de la démocratie dans les années ´60, les congolais vont apprecier mieux l´histoire de sa lutte.
    Place á une autre génération qui non seulement sont entrain de défendre la démocratie, mais surtout possede une vision claire de la démocratie qu´ils souhaitent instaurer au Congo.

  • kongoman

    says:

    ghost le pays est entre les mains de nos ennemis liberons le congo apres tu feras ton proces a ya tshitshi ton Kabila que tu défends emferme ces opposants pour haine raciale de quelle race vous etes ? BOYEBELA::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::

  • Makutu Lidjo

    says:

    Je souhaiterais apporter un rectificatif dans la réflexion de notre compatriote Jean Jacques Wondo. A mon entendement, le Zaïre ou Rdc aujourd’hui n’a pas cessé d’être une dictature. Ce pays a un habillage démocratique mais il ne l’est pas. Les différents faits que vous relatez dans votre texte le prouvent à suffisance.
    Concernant votre appel à ce que les congolais mettent tous leurs égos de côté et se mettent derrière monsieur Etienne Tshisekedi, père de la démocratie congolaise selon la formule consacrée, patrimoine national. Mes années d’observation des acteurs politiques m’ont appris à ne plus les suivre aveuglément mais plutôt à privilégier mon esprit critique. Je pourrai accompagner quelqu’un sur des valeurs, des principes et un projet et 100fois non sur des sentiments, des affinités tribales, linguistiques, amicales, religieuses.
    En effet, aujourd’hui quel est le projet d’Etienne Tshisekedi ? Quelles sont les valeurs et les principes d’Etienne Tshisekedi ? Si l’on se met d’accord sur cela, nous pourrions évoluer sans problème. Parce que j’estime que ce qui nous unit cette terre commune est plus fort que tout le reste. Avec le débat aujourd’hui en Europe sur l’apatridie, qui veut être apatride ?
    Est-ce que ceux qui entourent Etienne Tshisekedi pensent ils de la même manière que vous Jean-Jacques Wondo ? Et d’abord lui-même qui communique peu, que pense-t-il ?
    Les défis pour notre pays sont immenses. Ils demandent beaucoup de sagesse mais aussi des disponibilités physiques et intellectuelles intenses. Les a-t-on sur ce candidat ? A chacun de juger.

  • Foxtrot

    says:

    Je continue à me demander, pourquoi, dans toutes vos publications, vous classez Honoré N’GBANDA parmi les Faucons du Régime du Président MOBUTU, alors que beaucoup d’analystes, trouvent aujourd’hui, avec le recul, qu’il faisait plutôt partie des Colombes? Celui-ci a démontré sa perspicacité lorsqu’il a demandé au Président d’engager des négociations avec MUSEVENI et KAGAME qui étaient ceux qui ménaient laguerre contre le Zaire, sous couverture de l’AFDL, alors que TOUS les autres voulaient la guerre. Par ailleurs, comment vous pouvez dire que TOUTES les autorités de la IIème République ne se sont JAMAIS remis en question alors même qu’en lisant ces ouvrages, Sieur N’GBANDA, ci-haut cité, reconnaît SANS AMBAGES ses responsabilités dans la chute de notre Pays?

  • GHOST

    says:

    @ FOXTROT ?

    Oui, mr Nbganda était un « faucon » avant d´accepter la defaite militaire** Juste avant la Conference Nationale, il avait fait former deux unités militaires composées exclusivement des orginaires du Nord Oubangi (FAS et FIS)* dont la mission principale était la repression des manifestations politiques*
    Une fois designé ministre de la Défense après les premières pillages, il n´a rien fait de concret pour reparer les injustices qui faisaient des membres de l´armée non orginaires de l´Equateur des « parias » et des zairois de « seconde zone »* Il n´a pas fait grand chose pour changer cette configuration tribale et regionale de l´armée..ni même amelioré les conditions sociales des membres des FAZ*
    C´est un faucon qui ne souhaitait ni la démocratisation du Zaire ni la fin de la dictature..
    Il n´a jamais eu le temps de présenter le bilan de sa fonction de ministre de Défense..sinon comment explique-t-il les secondes pillages s´il avait fait un bon travaille á la tête de la Défense du Zaire?
    Tous les « autres » voulaient la « guerre »? Mais oui, ceux qui voulaient la guerre étaient surtout en faveur de la démocratie..tandis que celui qui avait peur de la defaite militaire ne faisait que defendre Mobutu et sa tribu*

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