Opinion : L’utopie d’une guerre entre la Russie et les Etats-Unis en Ukraine !
Par Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Continuer à développer des thèses infantiles faisant croire que les loups vont se manger, c’est enfoncer davantage l’Afrique dans le rôle d’otage des enjeux géostratégiques des puissances du monde, qui n’ont jamais agi, qui n’agissent et n’agiront jamais en faveur du bien-être des populations africaines. Ce ne sont pas les théories de Malthus, Karl Marx, Hans Morgenthau, Samuel Huntington, Zbignew Zebrzensky, Chomsky, Michel Collon ou Jean Ziegler, fondées toutes sur des bases idéologiques de type dogmatique, qui sauveront l’Afrique.
Une troisième voie, ne privilégiant ni les uns ni les autres, s’impose. Cette voie doit absolument être écrite par les Africains pour les Africains, pas par Chomsky ni par Zebrzensky, dont bon nombre d’intellectuels africains deviennent des disciples inconditionnels. Sinon, on sera toujours à la traine, en tant que nègres intellectuels de service servant de porte-voix évangéliques des théories non conçues par les Africains. Il n’y a pas pure aliénation (ou colonisation) intellectuelle que relayer et croire aveuglement, de manière dogmatique, à toutes les théories populistes néolibérales ou antiimpérialistes orientées pour nous endormir, sans prendre du recul méthodologique et ni adopter un sens critique axiologiquement neutre, objectif et rationnel.
Dans le domaine des relations internationales (africaines), j’ai rarement lu des intellectuels africains se référer par exemple au congolais de Brazza Etanislas Ngodi, auteur de Pétrole et Géopolitique en Afrique centrale, L’Harmattan, 2008, 256p. ; L’Afrique centrale face à la convoitise des puissances : De la conférence de Berlin à la crise de la région des Grands Lacs, L’Harmattan, 2010, 256p; ou le camerounais Luc Sindjoun avec son livre référence : Sociologie des relations internationales africaines, Karthala Editions, 2002 , 243 pages.
Je m’insurge à constater, avec dépit que ces derniers temps, plusieurs personnalités dites de l’intelligentsia africaine, s’enfermer émotionnellement dans cette thèse qui consiste à uniquement imputer tous les maux du continent africain à une sorte de complot néocolonial savamment et minutieusement réfléchi par les Occidentaux. De la sorte, TOUT serait explicable par cette seule grille de lecture, comme si on affranchissait les Africains de la tutelle de ces prédateurs, tout irait mieux pour le bonheur des Africains. Je vise dans cette analyse cette intelligentsia africaine, bardée de diplômes, parfaitement maîtres des codes lexicaux et culturels occidentaux, mais qui se laisse entrainer dans un dogmatisme intellectuel qui leur ôte parfois tout sens critique objectif car la passion a envahi leur cerveau. Nous comprenons leur révolte, certes légitime, mais estimons que cette façon de penser le monde et les relations internationales est méthodologiquement biaisée et relève, selon nous, d’un déficit intellectuel flagrant qui ne conçoit pas le monde et les relations internationales dans leur globalité systémique interactionnelle.
Il n’y aura pas d’affrontement direct entre les russes et les américains en Ukraine
Dans le même ordre d’idée, ceux qui pensent que le monde tendrait vers un affrontement militaire entre les Etats-Unis et la Russie ou la Chine se trompent peut-être d’analyse. C’est en quelque sorte réduire l’analyse stratégique et le système des relations internationales à la seule grille de lecture politico-militaire (hard power et high politics). C’est oublier de tenir compte des enjeux géoéconomiques des relations internationales qui fondent ce qu’on appelle aujourd’hui le nouvel ordre international.
C’est une conception erronée de penser que les relations internationales contemporaines trouvent leur source à Washington, à Kremlin ou à Beijing. Ce ne sont ni Obama qu’on oppose à tort ou à raison à Poutine, ni ce dernier et encore moins Hu Jintao qui dictent l’ordre mondial contemporain. Ce sont les oligarques néolibéraux agressifs autour de Poutine, en collusion avec les nouveaux riches mafieux néolibéraux chinois protégés par le parti communiste et les multinationales prédatrices Anglo-saxons et occidentaux qui dirigent le monde.
Certaines élites africaines font preuve d’un défaut de formatage intellectuel du fait d’une conception dogmatique manichéenne, binaire et dichotomique du fonctionnement du monde. Il s’agit là d’une conséquence des effets (dévastateurs) théologiques de la colonisation qui leur appris à voir et à analyser le monde sous un prisme de bichromie où les choses ne sont exclusivement que noires ou blanches. Ces intellectuels, encore enfermés dans les théories idéologiques du monde bipolaire du 20ème siècle, pensent que l’Ukraine sera le théâtre de confrontation armée directe entre les États-Unis et la Russie, n’ont peut-être pas compris ni tiré la leçon de la fin de la guerre froide. Ils se laissent idéologiquement et intellectuellement manipuler par les vociférations de Poutine dont l’économie est intimement liée à l’Occident ou par la Chine qui finance la dette américaine. En conséquence, ils font une mauvaise lecture des enjeux géostratégiques actuels.
Le monde à l’ère de la néo-guerre froide entretenue par les lobbies néolibéraux de l’armement
Nous sommes d’avis que nous assistons à une nouvelle forme de « guerre froide » entre la Russie et les Etats-Unis. Et l’Ukraine sert aujourd’hui de terrain de tentative de confrontation géostratégique indirect, à l’instar de l’Angola durant l’ère bipolaire, qui a servi de terrain d’expérimentation de l’efficacité des armements soviétiques et américains. Aujourd’hui l’Ukraine est ce pays cobaye d’expérimentation des dernières trouvailles balistiques de la Russie et des Etats-Unis, point barre!
Toutes les déclarations entendues ici ou là de la part des dirigeants américains et russes font le jeu du marketing du complexe militaro-industriel tenu par les lobbies néolibéraux oligarchiques russes autour de Poutine qui prospèrent et investissent également aux Etats-Unis, et des multinationales de l’armement aux Etats-Unis qui dictent la politique économique de défense (dans le cadre de R&D : recherche et développement) du Pentagone.
Rêver utopiquement à un affrontement armé entre ces deux puissances, il n’y a que certains africains, friands des mythologies émotionnelles à la place de la raison, qui en sont théologiquement convaincus en voulant faire de leurs rêves éveillés dans lesquels ils sont endormis depuis l’assassinat de Lumumba une réalité.
En jouant le jeu de l’illuminé G. W. Bush, ils traitent les Etats-Unis et leurs alliés anglo-saxons et occidentaux de Grand Satan. C’est la conséquence de la déformation intellectuelle inculquée par la colonisation qu’ils vilipendent (3E : État – Entreprise – Église). Ils oublient que ce même Satan (le monde néolibéral qu’ils qualifient ainsi) est plus que bien implanté au cœur du Kremlin et ancré dans le pouvoir politique communiste chinois qui exploite son peuple avec une croissance à très faibles retombées sociales pour ses populations, parfois teintées d’esclavagisme moderne par les entreprises chinoises, comme cela se fait en RDC avec une croissance, exclusive, sans amélioration des conditions de vie des Congolais dont le revenu quotidien par tête d’habitant est inférieur à 2$ US.
Le monde actuel est dirigé par des acteurs néolibéraux transnationaux qui ont élu domicile dans des pays que certains africains croient (émotionnellement, hystériquement et bibliquement par naïveté) qu’ils vont s’affronter. A ceux là, nous leur posons la question: Pourquoi la Russie et la Chine n’avaient-elles pas émis leur veto pour empêcher l’invasion de la Libye et la liquidation de Kadhafi? Elles sont toutes complices ! Apprenons, pour le bien des Africains, à éviter de faire des analyses binaires et manichéennes, tronquées axiologiquement, orientées idéologiquement et exemptes de tout sens critique objectif et neutre.
L’Etat a longtemps été le seul acteur international et possédait le monopole de la puissance suivant la conception wébérienne et réaliste des relations internationales. Si d’autres acteurs (organisations internationales, ONG, firmes multinationales, groupes terroristes, etc.) viennent le concurrencer sur la scène internationale, il en occupe toujours le centre. L’Etat a perdu le monopole de l’action internationale, il en reste cependant l’acteur central. La mondialisation, le développement des flux et des réseaux, la prolifération des acteurs non-étatiques transfrontaliers et des ONG, l’effacement des frontières sont venus remettre en cause la toute-puissance étatique. Mais s’il n’a plus le monopole de l’action internationale, l’Etat en reste l’acteur central[1].
Aux origines du nouvel ordre mondial
Depuis la fin de la guerre froide, les Etats-Unis s’imposent sans conteste comme la première puissance mondiale en tout point, Zbigniew Brzezinski considérant pour sa part « qu’aucune puissance ne peut prétendre rivaliser dans les quatre domaines clés – militaire, économique, technologique et culturel – qui font une puissance globale ». ce leadership confère donc aux Etats-Unis un rôle messianique. De ce fait, les Etats-Unis n’ont pas d’autre alternative que d’exercer leur leadership, sans quoi, le monde pourrait devenir chaotique et la sécurité menacée[2].
Lorsque George Bush est devenu, le 20 janvier 1989, le 41ème président des Etats-Unis, il était conscient qu’un « gigantesque travail l’attendait » sur la scène internationale mais il ne pouvait pas prévoir qu’un nouvel ordre mondial émergerait aussi rapidement. Ce n’est que deux ans plus tard, le 6 mars 1991, devant les deux chambres du Congrès réunies, qu’il prononce pour la première fois l’expression « nouvel ordre mondial », consécutif à l’effondrement du bloc communiste et à la guerre du Golfe. Fin de l’histoire, selon Francis Fukuyama ou nouveau concert de puissances, la victoire de l’Occident a surtout été celle des idées libérales et de Washington, son chef de file[3].
La Russie, les Etats-Unis et la Chine sont des alliés dans le néolibéralisme !
C’est ici que nous voulons interpeller sans faux-fuyants ceux qui CROIENT (comme à l’église) que la Russie de Poutine ou la Chine d’après Mao Ze Dong, pourraient apporter la solution alternative aux Etats-Unis, même en se coalisant. Que nenni ! Même si elles parvenaient à se débarrasser des Etats-Unis, ces deux géants émergents ne pourront dominer le monde, à leur tour, autrement qu’en mimant les Etats-Unis dont elles copient le modèle néolibéral de développement économique.
En effet, la Russie de Poutine, après s’être relevée des cendres de l’URSS effondrée et implosée sans avoir livré bataille avec les Etats-Unis, est la résultante ou le produit du nouvel ordre mondial libéral instauré par les Etats-Unis. Cette nouvelle Russie est bâtie autour d’une oligarchie néolibérale incarnée par Poutine et son « inner circle ». Un néolibéralisme russe agressif et sans état d’âme lié et prisonnier de ses partenaires américains. Il suffit de constater le ralentissement de son économie et la crise du rouble (qui a perdu plus de 40% de sa valeur) du fait entre autres de l’embargo qui lui est imposé par l’Occident pour se rendre compte que la Russie et l’Occident se tiennent par la barbichette.
Il en est de même de la Chine vers laquelle d’aucuns veulent crier au secours contre les Etats-Unis. Le décollage économique du dragon de l’Orient se réalise sous un néolibéralisme prédateur en Afrique[4] où elle n’a d’égards aux populations locales. Par ailleurs, la société chinoise connait des disparités sociales infrahumaines subies par ses propres populations travaillant comme des esclaves dont une majorité ne profite guère du fruit de la croissance économique fulgurante. Ce, pour la simple raison que l’économie néolibérale chinoise est prise en otage par une oligarchie politico-militaro économique qui se sert juste du communisme comme paravent pour étouffer toute éclosion démocratique et l’expression des libertés individuelles des Chinois.
Comment expliquer que ce pays encore émergent soit devenu en moins d’une décennie le principal banquier de la première économie mondiale ? La raison de cette anomalie est simple : la Chine épargne trop, les États-Unis pas assez et doivent donc faire appel à l’épargne étrangère, chinoise au premier chef. Ce déséquilibre se traduit par une contrainte symétrique pour les deux économies : l’Amérique a besoin de l’épargne chinoise, la Chine a besoin du marché américain pour absorber ses produits. Chacun est l’otage de l’autre dans une sorte de relation symbiotique qui lui est nécessaire pour soutenir sa propre croissance. L’interdépendance des deux partenaires rend peu crédible ce scénario selon lequel Pékin liquiderait une partie importante de ses placements dans la dette souveraine américaine pour imposer ses vues à Washington. Une telle initiative pourrait déclencher un chaos monétaire dont les conséquences seraient dramatiques pour la croissance mondiale, à commencer par celle de la Chine. Elle est d’autant moins probable que les marchés américains sont les seuls à pouvoir absorber des montants aussi colossaux. Ils sont de très loin les plus importants et les plus liquides au monde, face à des marchés européens et surtout asiatiques trop étroits et fragmentés. La Chine est prisonnière du stock de titres américains – bons du Trésor notamment – qu’elle a accumulés[5].
Malgré le différentiel économique en faveur de la Chine, la Chine et les Etats-Unis se tiennent par la barbichette et développent une collaboration tacite qui les appellent davantage à coopérer qu’à s’affronter, au grand dam de ceux qui veulent les opposer. Les Etats-Unis ont besoin de la Chine pour financer leur déficit ; et la chine a besoin de l’économie américaine pour que son économie tourne et achète ses produits[6]. Au cas contraire, les économies de ces deux géants risquent de s’effondrer et occasionner des bouleversements sociaux incommensurables.
Nous estimons, à titre personnel, que les autorités russes semblent oublier une dimension stratégique de l’action de la puissance qui a été à la base de l’effondrement de l’Union soviétique, celle du soft power. Ce qui n’est pas le cas pour la Chine au contraire, qui a compris l’importance du soft power en faisant la promotion de sa culture et de sa langue, par la diplomatie culturelle[7], dans ses contacts avec des pays avec lesquels elle entretient des coopérations économiques[8]. Les russes me donnent l’impression de se concentrer uniquement sur les aspects de « hard power[9] » sans rendre leur pays plus attractif comme le font ses autres partenaires du BRICS.
En conséquence, croire que l’Ukraine pourrait devenir un terrain de confrontation militaire directe entre la Russie et les USA, c’est un pas que nous ne franchirons pas avec une certaine légèreté irrationnelle.
Tout au long du 20ème siècle, des analystes-gourous ont entretenu une psychose généralisée des théories fallacieuses sur un affrontement militaire apocalyptique entre l’est et l’ouest, faisant l’affaire des lobbies et du complexe militaro-industriel qui prospèraient en Occident et dans le bloc communiste. En effet, malgré ces théories eschatologiques alarmistes des gourous stratèges de la période de la guerre froide, on peut constater que l’URSS s’est effondrée sans que les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux n’y aient lancé un missile ou tiré un coup de feu. C’est sur le « soft power », au travers de la politique du perestroïka[10] et de la Glasnost[11] introduite dès 1985 par Gorbatchev[12] que les choses se sont emballées en URSS.
En bref, c’est par les stratégies du smart power que l’Union soviétique s’est dépérie[13] et que la Chine a abandonné la politique économique communiste pour un néolibéralisme créateur des fractures sociales, pendant que les oligarques néolibéraux russes autour de Poutine pillent la Russie et se font des ‘tunes’ avec les Américains.
Ces trois pays se tiennent économiquement :
La dette américaine en Chine qui a besoin des Etats-Unis pour recouvrer son capital et vice versa.
L’embargo contre la Russie qui plombe le rouble et l’économie russe pour au-moins deux ans dans l’hypothèse la plus favorable si on croit aux propos de Poutine et qui pourrait pousser Le Kremlin à opérer des coupes budgétaires pour son armée déjà pléthorique et à revoir ses ambitions géostratégiques à la baisse.
Hélas, triste de le constater, c’est à ce niveau du smart power, sous sa forme de néolibéralisme prédateur que nous pensons que les Etats-Unis tiennent et étranglent le monde en parvenant à convaincre Beijing et Moscou à adhérer à leur politique économique. Ainsi, les loups ne se mangent pas entr’eux, dit-on, surtout pas en Ukraine. Il s’agit juste d’un remake de l’histoire géostratégique du monde qui ne se soldera pas par une confrontation militaire directe entre ces deux puissances. Dommage que bon nombre d’africains, enfermés dans une analyse géopolitique théologico-binaire et manichéenne, occulte cette lecture de l’histoire et veulent passer leurs rêves (spirituels) pour la réalité.
Absolue nécessité de bâtir une Nouvelle Afrique par les Africains sans cloner l’Occident et l’Orient
Aller chercher le salut de l’Afrique ou du Congo dans les pays du BRICS en espérant contrer les américains et leurs alliés occidentaux relève de la cécité stratégique. Les Américains, les Russes et même les Iraniens coalisent en Irak pour traquer ensemble l’Etat islamique qui représente la véritable menace universelle pour leurs intérêts géoéconomiques.
Comme DESC ne cesse de le crier dans le désert, le salut de l’Afrique ne viendra ni de l’Occident ni de l’Orient. Cessons de rêver. Réfléchissons pour bâtir un modèle anthropologique de développement propre à l’Afrique, qui tiendra compte de nos spécificités particulières sans oublier de tenir compte l’évolution inéluctable du monde de plus en plus interconnecté .
Comme dit la Bible, « le salut ne viendra ni de l’Orient ni de l’Occident ». Mais l’élévation du Congo viendra de l’apport positif des expériences et des expertises accumulées par des filles et fils de la RD Congo empreints de patriotisme comme le dit souvent le professeur Georges Nzongola Ntalaja.
Dès lors, et malgré les tentations multipolaires de la France et d’autres puissances européennes et émergentes, force est de constater qu’en termes de valeur absolue, les Etats-Unis continue d’assurer le leadership mondial.
Ainsi, dans une Afrique, où la religion fait des ravages en réduisant des pans de populations à tout gober et à dire amen, sans esprit de discernement, des analystes autoproclamés, spécialistes ès tout sauf en science politique, s’élèvent en prédicateurs et réduisent toute l’analyse systémique interactionnelle multifactorielle des relations internationales en une analyse simpliste et statique très binaire consacrant la source du mal ou des malheurs de l’Afrique aux Etats-Unis, aux Anglo-saxons et aux Occidentaux sans aller fouiller les atrocités humanitaires qui se passent sous les cieux de la Chine, de la Russie, du Brésil, du Venezuela ou de l’Afrique du Sud. Ces analystes oublient que sous d’autres siècles ce furent les Ottomans, les Perses, la Chine impériale qui dictèrent l’ « ordre mondial » et instaurèrent le chaos, que dis-je ? le désordre ordonné !
Laissons aux Russes, aux Chinois et aux Américains continuer leurs jeux de dupes qui nous endormissent. Concentrons-nous à réfléchir durement, sans eux, sur les voies et moyens pour sortir l’Afrique de la merde en construisant un modèle qui est compatible aux attentes de ses populations, non copié et collé des États-Unis, de la Russie, du Venezuela ou de la Chine. Soyons authentiques. Sinon dans 30 ans, l’Afrique sera encore en train de « tourniquer » au rond-point en ne cessant de se victimiser par des délires sensori-émotionnels sur la balkanisation et ses prétendues théories du complot qu’on voit partout, à force de rêver que le salut de l’Afrique vienne d’ailleurs ou que les autres aient pitié de nous. On a souvent tendance à oublier que les rapports entre Etats resteront invariablement des rapports d’intérêt et de force dans un monde néo-darwinien.
Jean-Jacques Wondo Omanyundu / Exclusivité DESC
[1] Pascal Boniface, La Géopolitique, Eyrolles, 2ème Ed, Paris, 2014, pp.181-182.
[2] Barthélémy Courmont et Darko Ribnikar. Les guerres asymétriques. Conflits d’hier et d’aujourdhui, terrorismes et nouvelles menaces, IRIS, Paris, 2002, p.78.
[3] Ibidem, p.79.
[4] http://afridesk.org/la-rd-congo-otage-des-enjeux-geostrategiques/.
[5] Claude Meyer, La Chine, Puissance mondiale ?, http://www.politiqueinternationale.com/revue/article.php?id_revue=143&id=1267&content=synopsis.
[6] Rui De Almeida, 2011 : la crise infernale, Ed Lulu, Paris, 2010, pp.113-114.
[7] La diplomatie culturelle chinoise opère à travers plusieurs formes d’échanges entre la Chine et l’Afrique : diffusion de la culture et de la langue chinoise, échanges académiques et entre chercheurs, formation d’étudiants et de professionnels africains qui jouent par la suite un rôle d’intermédiaire avec les acteurs chinois. L’attention portée à la diffusion de la culture chinoise vise à renforcer l’attractivité de la Chine en Afrique et à développer une image positive de son action. La multiplication des contacts directs avec la Chine et ses acteurs entend aider à contrer la vision de la Chine donnée par les médias occidentaux. David Benazeraf, « Soft power chinois en Afrique Renforcer les intérêts de la Chine au nom de l’amitié sino-africaine », Ifri Centre Asie, Septembre 2014.
[8] L’approche diplomatique de la Chine avec les pays africains est incarnée dans les principes du Forum sur la coopération sino-africaine (Focac, 中非合作论坛, zhongfei hezuo luntan), créé à l’initiative de la Chine en octobre 2000. L’objectif du Premier ministre Zhu Rongji était alors de faciliter l’établissement d’un nouvel ordre politique et économique international « juste et équilibré selon Ian Taylor ». Le Forum réunit aujourd’hui 49 pays africains, l’Union africaine et la Chine. Pour sa stratégie d’image, le ministère chinois des Affaires étrangères dispose d’un ambassadeur itinérant pour les affaires africaines, comme il en existe pour d’autres zones. Nommé au poste de représentant spécial du gouvernement chinois pour les affaires africaines après avoir été notamment ambassadeur en Afrique du Sud entre 2007 et 2012, S.E. Zhong Jianhua est connu pour ses compétences de négociateur dans les dossiers difficiles, son ouverture et une certaine liberté de ton. http://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/ifri_av71_softpowerchinoisenafrique_benazeraf.pdf.
[9] Le hard power est le pouvoir ou la capacité d’un pays de coercition par l’emploi ou la menace d’emploi de la force (militaire).
[10] La perestroïka (« перестройка » en russe, qui signifie : reconstruction, restructuration ; avec un élément novateur de péré- = re-, et stroïka = construction) est le nom donné aux réformes économiques et sociales menées par Mikhaïl Gorbatchev en URSS d’avril 1985 à décembre 1991. Au mois de juin 1985, Gorbatchev se rend à Leningrad (aujourd’hui Saint-Petersbourg) afin de défendre son programme. Dans son premier discours, il lance à Smolny : « il faut que nous nous reconstruisions » (всем нам надо перестраеваться). Pour la première fois, un leader soviétique parle si ouvertement des problèmes du pays, et le comble : pendant son dernier jour de visite, Gorbatchev sort dans la rue pour parler aux gens. La foule, non choisie, entoure très vite le leader et commence à lui parler et à lui poser des question : du jamais vu dans l’histoire soviétique. Avant de partir, une femme souhaite à Gorbatchev de rester toujours près du peuple. Gorbatchev lui répond : « comment voulez-vous que je sois encore plus proche ?» Tout le monde rigole : ça y est, la Perestroïka a commencé…
[11] La transparence.
[12] L’arrivée de Gorbatchev au pouvoir marque le début de la Perestroïka. Le nouveau leader jouit d’une grande popularité en Union soviétique. Une des premières mesures prises dès l’arrivée au pouvoir de Gorbatchev a été la libéralisation partielle de la presse, plus connue sur le nom de Glasnost. Dans son discours lors du XXVIIe Congrès du PCUS (Parti communiste de l’Union soviétique) en 1986, Gorbatchev a déclaré que « sans Glasnost, il n’est pas possible de construire la démocratie » ; ainsi les premiers journaux libres sont apparus, certains des grands journaux ont changé de rédacteurs en chef tels que Novii Mir (Nouveau monde), Argumenti i fakti (Arguments et faits) ou encore Moskovskie novosti (les Nouvelles de Moscou). En même temps, les livres interdits par la censure soviétique ont commencé à apparaître dans les magasins. Beaucoup de films censurés auparavant ont pu enfin passer sur les écrans. Déjà en 1987 avait été créées la NIKA (une chaîne indépendante d’information), ainsi que l’ATV (association de la télévision d’auteur). De nouveaux journaux d’informations apparaissent : « 12ème étage » ou encore Vzgliad (Point de vue). http://www.nouvelle-europe.eu/gorbatchev-et-la-perestroika-des-objectifs-initiaux-aux-consequences-inattendues.
[13] Nous empruntons cette terminologie chère à Karl Marx: le dépérissement de l’Etat. Le dépérissement de l’Etat entraine la victoire de la superstructure : (politique, sociale, religieuse et philosophique) sur l’infrastructure représentée par le capital (l’aliénation économique – qui est l’infrastructure de la société – est la source de toutes les autres aliénations).