Jean-Jacques Wondo Omanyundu
DÉFENSE & SÉCURITÉ GLOBALE | 18-02-2015 02:00
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L’opération Sokola 2 contre les FDLR : Quand le bluff tactique tourne au ridicule – JJ Wondo

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

L’opération Sokola 2 contre les FDLR : Quand le bluff tactique tourne au ridicule

Par Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Un effet d’annonce chaotique, dépourvu de toute rationalité, juste pour faire diversion

Alors que Kinshasa se remet à peine du traumatisme causé par les FARDC et la PNC suite à leur répression brutale des manifestations contre la loi électorale les 19, 20 et 21 janvier 2015, voilà que l’opinion nationale et internationale a été surprise par l’annonce le 29 janvier 2015 du lancement de l’opération Sokola 2 contre les rebelles Hutus rwandais des FDLR.

Comme on le sait, cette annonce a suscité plusieurs réactions de scepticisme. C’est le cas de Patrick Vanhees, Colonel belge en retraite et conseiller militaire de la mission européenne d’assistance à la réforme des FARDC, l’EUSEC-RDC. « Jean-Jacques, il s’agit juste d’une annonce du déclenchement… Une opération s’accompagne de bruits de bottes, etc……Une déclaration à la presse ne fait pas encore partie prenante d’une opération militaire réelle…

Un analyste de DESC s’interroge en ce sens : « J’essaie de comprendre les motivations du « Raïs » derrière l’opération contre les FDLR. Je continue de croire que cette opération n’a aucune justification rationnelle. Ces Hutu étaient en train de se regrouper (Kisangani, Walikale,…) en vue de leur rapatriement au Rwanda. Pourquoi leur faire la guerre ? Quelque chose me dit que Kabila, confronté à une contestation interne, essaie de se rendre utile aux yeux de la communauté internationale et de ses parrains rwando-ougandais. Sur le dos de ces malheureux Hutus. Le pauvre… »

Comme nous avons eu à le dire dans nos différentes interventions, les autorités congolaises, au plus haut niveau des responsabilités, ne manifestent aucune volonté politique réelle de mener une vraie guerre contre les FDLR. La guerre étant aussi médiatique ou psychologique à des fins politiques, alors les déclarations tapageuses remplacent les bruits des bottes… Question de détourner l’actualité politique polarisée autour des manifestations citoyennes qui ont failli emporter le régime Kabila vers la périphérie orientale du pays. Il s’agit là d’une manœuvre de diversion propre aux régimes décadents dans le but de détourner l’attention de l’opinion publique sur les massacres et les graves violations des droits de l’Homme ainsi les répressions des opposants et des activistes des droits de l’homme par les escadrons de la mort du régime durant les trois jours qui ont marqué le début de la fin de Kabila.

Précédentes actions infructueuses malgré plus de 5000 soldats rwandais

Pour traquer les rebelles Hutus rwandais RDC, le Rwanda a fait recours à la guerre de l’AFDL, aux rébellions du RCD, du CNDP et du M23 en y injectant ses troupes sans succès. En 2009, l’armée Rwandaise (RDF) et les FARDC ont lancé une opération conjointe dénommée Umoja wetu (notre unité). On a estimé à 5.000 hommes le nombre de soldats rwandais qui sont venus intervenir sur le territoire congolais. L’intervention militaire (Umoja Wetu) va durer 35 jours au Nord Kivu et aboutit à des résultats mitigés en termes de désarmement et de rapatriement des FDLR, malgré le succès politique et diplomatique qu’elle a consacré. En pratique, elles n’ont exercé qu’une pression passagère contre un ennemi dont le temps et l’espace ont joué en sa faveur.

Selon le général John Numbi, commandant de ces opérations conjointes, alors policier en lieu et place du général d’apparat Etumba, le même que Kabila envoie de nouveau pour annoncer le lancement de Sokola 2, le bilan de Umoja wetu était de 153 FDLR tués, 13 blessés, 37 capturés, 103 rendus et rapatriés au Rwanda par le biais de la DDRRR de la MONUC. Le général de Brigade Jérôme Ngenda Imana, représentant l’état-major de l’armée rwandaise, a déclaré que son pays considère comme terminée sa mission à l’Est de la RDC. Il a ajouté que « le Rwanda n’a plus de raison de retourner au Congo[1] » A l’issue d’un entretien en tête-à-tête le 6 août 2009 à Goma entre les présidents Paul Kagame et Joseph Kabila, le chef de l’Etat rwandais avait cyniquement déclaré à la presse que « le problème de l’Est du Congo est le problème du Congo[2] ».

Une opération imaginaire, jamais planifiée par la RDC, qui suscite scepticisme
Genéral de brigade Bruno Mandevu - Commandant opération Sokola 2 Contre les FDLR
Gen de Bde Bruno Mandevu – Commandant opération Sokola 2 Contre les FDLR
Général de brigade Sikabwe Fall - Commandant de la 34è Région militaire au Nord-Kivu
Gen de Bde Sikabwe Fall – Commandant de la 34è Région militaire au Nord-Kivu

L’annonce du lancement de l’opération Sokola2 se présente comme un énième flop stratégique des autorités congolaises. Une opération qui ne débute pas sous les meilleurs auspices, à en croire l’AFP du 04 février 2015, avec des nominations des généraux Bruno Mandevu et Fall Sikabwe, soupçonnés de graves violations des droits de l’homme et compliquant la collaboration avec la MONUSCO qui a fini par jeter l’éponge alors qu’un plan d’opérations conjoint semble avoir été préparé par la MONUSCO et FARDC, le président Joseph Kabila a refusé de valider ce projet et a donné l’ordre à l’armée d’attaquer elle-même selon son propre plan inexistant.

Faisant part de leur scepticisme sur l’opération, plusieurs observateurs et experts militaires étrangers notent une absence de préparation de l’armée. Et à l’état-major « Sokola 2 » chargé de la traque contre les FDLR, une source reconnaît que les directives d’attaque ne sont pas encore arrêtées.

L’offensive n’a « pas encore commencé« , avait déclaré Martin Kobler, le chef de la MONUSCO, répétant que celle-ci fournirait un soutien multiforme aux FARDC: partage de renseignement, aide à la planification, soutien logistique (fourniture de rations, approvisionnement en carburant, évacuation des blessés), et soutien opérationnel avec des hélicoptères d’attaque, par exemple. Martin Kobler, a déclaré sur la Radio Okapi le 3 février 2015 : « J’étais à Beni avec le général Etumba [chef d’Etat-major des FARDC] avant le lancement des opérations contre les FDLR. Il a dit que les opérations contre les FDLR ont commencé. Maintenant sur le terrain on ne voit pas encore beaucoup. C’est une action qui est gérée par les FARDC mais soutenue par la Monusco sur le plan de la stratégie, de la planification des opérations, de la logistique ».

Un responsable de l’ONU à Kinshasa note cependant que cet appui, indispensable selon lui pour espérer une réussite de l’offensive, n’ira pas de soi et dépendra de la tournure que prendront les opérations: « on ne va pas cautionner n’importe quoi ». Pour un diplomate occidental, l’annonce de l’opération contre les FDLR pourrait n’être qu’un « effet de manche ». D’autant qu’une certaine grogne gagne l’armée au Nord-Kivu. Un commandant d’une unité d’élite y confiait récemment à l’AFP que le budget qui lui était alloué pour nourrir ses hommes avait baissé de moitié depuis plusieurs mois et qu’il se voyait mal, dans ces conditions, accepter de partir en opération contre les FDLR. Sept militaires d’un bataillon commando sont actuellement jugés en urgence après avoir tiré des coups de feu fin janvier en signe de protestation pour n’avoir toujours pas reçu leur solde pour décembre et pour janvier. A l’état-major régional, on reconnaît que cette unité est loin d’être la seule touchée par des retards de solde…, selon l’agence Belga du 4 février 2015.

Le même scepticisme a été émis par un expert congolais des milieux diplomatiques

Il n’y a pas d’opération, juste une promenade en brousse avec tirs en l’air, nous explique le 30 janvier 2015 un expert congolais en contact avec les milieux diplomatiques et la MONUSCO à Kinshasa : « Qui pensez-vous que sont les fameux rebelles inconnus qui ont quitté la RDC en date du 30 Décembre 2014, c’est-à-dire à deux jours de l’ultimatum donné aux FDLR?[3].

Pour cet expert : « La Monusco soutiendra les FARDC juste avec la logistique dans cette promenade de santé. Elle n’a pas de choix car de toutes les façons les troupes d’élites tanzaniennes, sud-africaines et malawites de la FIB (Brigade d’intervention de la MONUSCO) qui répondent à leurs pays ne bougeront pas. Les autres Indiens, Pakistanais, Uruguayens, Népalais, Egyptiens, Béninois, Bangladeshi, etc. adorent juste se prendre en photos PEACE KEEPING et se cachent derrière le mandat et accord de leurs pays conclus avec les Nations Unies car leurs gouvernements respectifs ont affaire à leur opinion publique avant tout. Pourquoi ne se contenteraient-ils pas des pactoles qu’ils reçoivent mensuellement comme paiement car déjà que les Nations Unies paient 1000 dollars sur chaque militaire, louent selon les contrats avec chaque pays contributeurs chaque véhicule administratif ou militaire, matériel de communication, matériel médical, etc. le tout allant a des millions mensuels? Le Force Commander brésilien n’a que la SAMBA de Rio à exécuter. Il n’a de troupes que celle africaines de la FIB mais hélas ».

Enfin, l’opinion ne doit il ne pas s’attendre à grand-chose de la part des FARDC qui ne traqueront pas leurs alliés FDLR. Après le renoncement incongru de Kinshasa de mener les actions avec la MONUSCO alors que cette dernière était la première à retirer sa collaboration avec les FARDC, on peut définitivement oublier le lancement de la honteuse opération Sukola 2. D’ailleurs, comment les FARDC pouvaient-elles mener une opération au lendemain de la nomination d’un nouveau commandant des opérations Sokola 2.

Dans l’opératique et la tactique militaires, préparer un plan de manœuvre d’une opération militaire de telle envergure exige beaucoup de temps en termes de reconnaissance du terrain des opérations, d’évaluation de la capacité des troupes et de leur mise en condition, de cantonnement des troupes, de préparatifs logistiques, de l’évaluation de la force ennemie, etc. Or le nouveau commandant de Sokola 2 n’a pas eu le temps de réaliser tout cela. En effet, c’est le commandant de la zone d’opération qui est le point focal de qui dépendront toutes les actions menées par toutes les forces déployées sur les zones de combat du théâtre d’opération concernée. Le commandant de la zone d’opération n’a pas seulement un rôle de concepteur, il doit aussi se rendre sur le terrain pour s’assurer du bon déroulement des opérations, apprécier la situation, s’inquiéter du moral des troupes et donner verbalement des consignes à ses subordonnés. Or le généraux Fall Sikabwe et Mandevu, n’ont eu que deux jours, après leur nomination, pour se rendre sur le terrain. Ce qui prouve à suffisance qu’ils n’ont pas eu le temps de préparer l’opération Sokola 2.

Appliquer l’accord-cadre d’Addis-Abeba dans son intégralité

La question des FDLR ne peut pas se résoudre que militairement, il faut aussi des volets politique, diplomatique et judiciaire. A l’instar de la position du président tanzanien, Jakaya Kikwete, appelant le Rwanda à ouvrir des négociations avec les rebelles Hutus des FDLR, Kagame doit absolument organiser un dialogue inclusif avec tous ses opposants afin d’ouvrir l’espace politique rwandais transformé à une prison à ciel ouvert. En effet, l’action militaire doit faire partie d’une stratégie globale qui intègre une série de mesures non militaires visant notamment à couper les sources de financement du groupe, à isoler la direction des FDLR de sa base par des actions ciblées contre leurs chefs et en mettant en place des incitations visant à favoriser des défections et des redditions volontaires.

L’Accord-cadre d’Addis-Abeba reste à ce jour une bonne base qui octroie un cadre d’actions élargi pour non seulement mettre fin aux FDLR, mais aussi résoudre la problématique sécuritaire de la région dans sa globalité. Un des éléments positifs que l’on peut relever dans l’Accord-cadre est le fait que cet accord apparaît comme un début d’amorce globale et multilatérale de solution à la crise régionale qui nécessite que des solutions soient prises dans un cadre systémique géopolitique régionale mais aussi ailleurs, au Rwanda et en Ouganda principalement[4].On a parlé des divergences de vue au sein du SADC (Angola – Afrique du Sud) et le clash entre Rwanda et Tanzanie sur l’approche armée contre les FDLR.

Les FDLR sont un fonds de commerce pour tous les acteurs nationaux, régionaux et la MONUSCO

Nous rapportons ici des réponses données à une série de questions que nous a posées un journaliste de l’Agence Bloomberg.

1) Est ce que les FDLR sont plus difficiles à combattre, comparativement aux autres groupes rebelles? Pourquoi?

JJW: Je ne pense pas qu’il est plus difficile de combattre les FDLR mais bien plus complexe parce que malgré les déclarations émises par la communauté internationale et le Gouvernement congolais, il n’y a pas vraiment de volonté politique pour combattre réellement les FDLR. Aujourd’hui, la présence des FDLR arrange un peu tout le monde (Les autorités congolaises principalement, le Rwanda et même la MONUSCO dans une certaine mesure).

L’autre complexité de combattre les FDLR est qu’elles ne forment pas une cible (un groupe unique). Les FDLR, contrairement au M23, sont éparpillées un peu partout au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et dans le Nord-Katanga. Or, il n’est pas aisé de mener une opération unique contre ces groupes qui sont aussi hétérogènes et ne dépendent pas d’un seul chef comme le M23.

Une autre difficulté est que les FDLR, comme l’ont démontré plusieurs rapports du groupe d’experts de la l’ONU sur la RDC, ont tissé des liens très étroits avec certaines autorités militaires des FARDC, notamment dans l’exploitation illicite des matières premières qu’ils écoulent au Rwanda. D’autre part, les FDLR se sont mêlées avec les populations locales congolaises (mariage, commerces…). Cela rend difficile leurs localisations précises et leurs identifications. Plusieurs se sont même intégrées dans les communautés locales.

Les effectifs des FDLR originelles sont estimés entre 1500 à 2500 combattants, sans compter leur progéniture[5]. Les autres groupuscules rebelles locaux (Maï-Maï) encore actifs à l’est de la RDC sont estimés à quelques centaines d’hommes par groupe et ne sont pas dispersés comme les FDLR, donc faciles à fixer et à éradiquer.

2) Est ce que ce moment, le moment de combattre le FDLR, est plus important pour Monusco et les FARDC pour gagner la confiance de la population?

JJW: Je pense que depuis la défaite du M23, la population attend que la MONUSCO et les FARDC s’attaquent aux FDLR. Cela donnerait un signal positif et permettrait d’augmenter le sentiment de sécurité auprès des populations de l’est. Or, il semble que ni la MONUSCO ni les FARDC ne s’empressent à combattre les FDLR. Je ne pense pas que la réunion prévue le 15 janvier à Luanda aboutisse à une décision ferme pour attaquer les FDLR. Je répète, il n’y a aucune volonté politique de toutes parts pour mener les opérations contre les FDLR et on ira d’ultimatum en ultimatum sans qu’une réelle opération ne soit lancée sur le terrain.

3) Avant, lorsque la Monusco et les FARDC ont combattu les FDLR, il y avait beaucoup de déplacements de personnes dans la région. Pourquoi ? C’est un phénomène associé aux FDLR, et est-ce que vous croyez qu’on va voir la même chose cette fois?

JJW : Lors des opérations Umoja Wetu (Janvier – mars 2009), Kimia 2 (Mai 2009) et Amani Leo (janvier 2010), on a effectivement constaté des déplacements des populations. Cela s’explique par des raisons que j’ai évoquées plus haut (intégration de plusieurs FDLR dans la société congolaise) et ces familles avaient également peur d’être attaquées par les FARDC et la MONUC mais aussi, les FDLR prenaient des congolais en otage ou menaient des actions de représailles (attaques, incendies,…) contre les populations congolaises qui signalaient aux militaires les endroits où elles se trouvaient. Je pense qu’une bonne préparation des opérations et une sensibilisation des populations avant et pendant des opérations, les actions judiciaires et une tactique appropriée faisant recours aux techniques antiguérillas[6] et non aux techniques de guerre conventionnelle, peuvent considérablement restreindre ces effets collatéraux.

Pourquoi Kabila ne veut pas combattre les FDLR ?

D’abord, des sources diplomatiques évoquent des divergences de vue au sein du SADC, entre l’Angola et l’Afrique du Sud.  Les FARDC ont décidé de lancer l’opération contre les FDLR juste après la rencontre du président angolais, président en exercice de la SADC, Dos Santos à Kinshasa, devenu depuis un temps un allié opportuniste et de circonstance du Rwanda. Il y a ensuite le clash entre le Rwanda et la Tanzanie sur l’approche armée contre les FDLR qui a empoisonné les relations entre les deux pays. La Tanzanie, l’Afrique du Sud et le Malawi (ce dernier est tout simplement un surplus Sud-Africain car ayant tout le soutien logistique sud-africain) sont totalement hostiles au pouvoir de Kigali à cause des actions d’hégémonie rwandaise dans la région. Ces pays veulent se servir des FDLR comme une épée de Damoclès contre Kagame.

Un analyste congolais qui a traité la question des FDLR va dans le même sens : « Kabila est sous pression de la Tanzanie qui ne peut pas combattre les FDLR. Il n’y a pas que la Tanzanie qui continue à laisser les FDLR transiter par son territoire, l’Afrique du Sud et même l’Ouganda le font également. De l’autre côté, il y a un contentieux sérieux entre Kabila et les FDLR. Le président congolais n’a pas encore payé la totalité des primes de combats réclamées par les FDLR depuis qu’ils combattent aux côtés de la RDC du temps de Laurent-Désiré Kabila en 1998. Joseph Kabila a à plusieurs reprises tenté de convaincre en vain les FDLR de récupérer les armes et munitions pour compenser la somme réclamée par les FDLR qui avoisineraient les 5 millions de dollars, si je me rappelle bien« .

Conclusion : Tout est sciemment mis en place pour maintenir une insécurité de basse intensité et détruire ce qui reste encore de l’armée congolaise

Voici un témoignage reçu d’un contact au Nord-Kivu qui a travaillé avec la MONUSCO sur ce dossier il y a quelques années : « M. Wondo, je pense que les FDLR restent un mal nécessaire tant pour la soi-disant Communauté internationale que pour les autorités du pays, car leur état de belligérance profite à beaucoup d’acteurs/individus, Etats, ou composantes régionales (Cfr les ressources naturelles et/ou trafic d’armes et autres intérêts stratégiques, qu’importent les affaires aux populations ou autres aspects humanitaires) ».

Le jeu de dupes auquel nous livrent le gouvernement congolais et la MONUSCO illustre jour après jour que ni les uns, encore moins les autres, montrent à suffisance leur manque de détermination de mettre en œuvre une stratégie globale visant à instaurer durablement la paix et la sécurité en RDC. Chacun semble œuvrer en RDC pour ses propres agendas cachés. Autant pour Kabila et son gouvernement dont la sécurité est la priorité des priorités alors que l’armée ne dispose pas de loi de programmation militaire devant améliorer la condition de vie des militaires. Nous ne cessons de recevoir des messages alarmants des militaires au front et des jeunes officiers en stage à Kitona dont la prime de 50$ promis par Kabila[7] ne sont plus payés et ne mangent que 4 jours par semaine. Leurs collègues formés en Tanzanie ne sont plus payés depuis leur prestation de serment en novembre 2014[8].

L’académie militaire de Kananga va tout droit vers sa fin, selon plusieurs témoignages recueillis : « Il y a un groupe d’officiers rescapés de la retraite autour du Général Tabu qui l’encouragent à prendre des décisions idiotes. Il vient même de renvoyer 21 élèves officiers pendant que notre armée souffre du manque des cadres compétents, voire lettrés pour sa réforme. Malgré un faible nombre de femmes dans les rangs, ils viennent de chasser 4 collègues féminins sur 12. Je cite la personne du capitaine Lenge qui devant tous les élèves-officiers avait promis à une des filles expulsées de la chasser de l’école pour avoir refusé d’être sa concubine. Après le renvoi de la fille, il s’est permis de crier tout haut chose promise chose faite. L’Académie de Kananga vit un enfer sous l’empire du Général Tabu : Vices de procédure, anarchie dans le commandement, nous avons même perdu un collègue ici dans des conditions nébuleuses sans aucun honneur ne lui soit rendu, etc… ». Un autre de Kitona de conclure : « Quel type d’armée nos autorités veulent former. Un bataillon du centre d’instruction de Kitona vient de faire une manœuvre militaire sans entrainement, pas de fonds de ménage, etc. Notre pays va très mal ! ».

Malgré la pléiade de résolutions prises la RDC depuis 1999[9], le pays est très loin d’être pacifié et stabilisé. La MONUSCO se contente d’y maintenir situation de guerre de basse intensité pour l’obliger à s’y maintenir jusqu’en 2035[10] à des fins autres que la recherche d’une paix durable, avec l’aide d’un gouvernement congolais irresponsable, incapable d’exercer son devoir régalien et son autorité sur l’ensemble du territoire.

Jean-Jacques Wondo Omanyundu / Exclusivité DESC

 

[1] Jean-Jacques Wondo Omanuyndu, Les Armées au Congo-Kinshasa. De la Force publique aux FARDC. RD Congo : une armée irréformable ; 2015. pp.280-282.

[2] Jean-Jacques Wondo Omanyundu, Les Forces armées de la RD Congo : une armée irréformable ?, Décembre 2014. P.33.

[3] Burundi: combats entre l’armée et des assaillants venus de RDC – Afrique – RFI. http://www.rfi.fr/afrique/20141230-burundi-violente-attaque-lancee-groupe-arme-venu-rdc/.

[4] JJ Wondo : Le Potentiel – Accord-cadre d’Addis-Abeba : un accord attrape-nigaud ou un aveu d’impuissance ?, 23/03/2013. http://www.congoforum.be/fr/nieuwsdetail.asp?subitem=1&newsid=192944&Actualiteit=selected.

[5] Selon une source anonyme en contact avec les FDLR.

[6] Du point de vue purement militaire, les techniques de contre-insurrection ou antiguérillas sont des moyens adéquats pour lutter contre les mouvements rebelles comme les FDLR utilisant les méthodes asymétriques. Elles se basent sur certaines règles principales au cœur desquelles le renseignement occupe une place centrale. DESC a élaboré une fiche opératique et tactique appropriée et des éléments de recherche approfondis à mettre à disposition aux professionnels intéressés dans le cadre de son volet de consultance.

[7] http://afridesk.org/vers-la-regularisation-de-la-situation-des-officiers-de-la-26-eme-prom-acamil-desc/.

[8] http://afridesk.org/le-calvaire-des-soldats-congolais-formes-en-tanzanie-jj-wondo/. http://afridesk.org/les-militaires-congolais-et-lacademie-de-kananga-toujours-a-labandon-jj-wondo/.

[9] Résolutions 1325 (2000), 1820 (2008), 1888 (2009), 1889 (2009) et 1960 (2010) concernant les femmes et la paix et la sécurité. Les résolutions , 1265 (1999), 1279 (1999), 1296 (2000), 1674 (2006), 1738 (2006) et 1894 (2009), 1925 (2010), 2098 (2013) , 2147 (28 mars 2014), etc. sur la protection des civils en période de conflit armé et ses résolutions 1612 (2005), 1882 (2009), 1998 (2011) et 2068 (2012) sur le sort des enfants en période de conflit armé, pour ne citer que celles-là.

[10] http://www.lalibre.be/actu/international/la-monusco-au-congo-jusqu-en-2035-54de458335700d75228f881b.

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2 Comments on “L’opération Sokola 2 contre les FDLR : Quand le bluff tactique tourne au ridicule – JJ Wondo”

  • Troll

    says:

    ¤L´AUTRE FACE DE LA DECISION?
    Mr JJ Wondo devrait verifier un aspect important de cette histoire: Le mandat de la « Brigade Africaine ». Quand le gouvernement de la RDC affirme « renoncer » á la participation de la MONUSCO dans l´offensive contre les FDLR, observez que le mandat de la brigade la plus offensive de l´ONU au Congo va prendre fin au mois de mars…dans quelques semaines.**
    Si le gouvernement juge inutile de renouveller ce mandat quand les FARDC n´ont pas besoin d´un back up des tanzaniens, malawites et sud-africains, cette brigade devrait quitter le Congo*
    La plus grande question á se poser serait de trouver les pays qui gagnent au cas où la « Brigade Africaine » quitte le Kivu. C´est l´aspect stratègique de cette decision: affaiblir la MONUSCO en refusant de renouveller le mandat des africains dont les capacités offensives depassent de très loin le reste des 20 000 hommes de la MONUSCO. Observons attentivement la decision du gouvernement congolais au mois de mars.

  • Kabasu Babu Katulondi

    says:

    Cher Compatriote Wondo,

    Je vous felicite pour vos remarquables analyses militaires. En plus des aspects pertinents que vous epinglez, je voudrais indiquer ici que le soutien du regime Rwandais a Kabila s’est un peu emousse. En effet, les autorites de Kigali sont en conflit larve avec Kabila justement a cause de ses etonnantes ambiguites sur la question de ses allies FRDL. En realite, le regime de Kinshasa recoit le soutient le plus solide du trio Mugabe-Zuma-Dos Santos. Des mines de diamant du Kasai (Tshibwe qui detient le plus gros gisement de la MIBA) attribuees aux partenaires Chinois de Mugabe (qui ont un joint-venture avec les generaux Zimbabweens dans les mines de Maranje au Zimbabwe) par le biais de l’Ambassadeur Mawampanga, aux concessions de petrole accordees au neuveu de Zuma (…et qui sont explorees par Dan Gertler) aux blocs petroliers de la Zone d’Interet Commun (ZIC) aux larges de Mwanda que Kabila laisse les Angolais exploiter allegrement, le regime donne une collossale contre-partie pour etre protege. Ces presidents de la SADC, qui ont trahi l’ideal du Panafricanisme et dont les apories face a la noble visee de la Renaissance Africaine en vue de liberer l’Afrique des despotes, sont patentees, sont les vrais enemis de la democratisation liberatrice de l’Afrique. Remarquez que c’est la bande a Zuma, dont l’ex-epouse trone sur l’administration de l’Union Africaine (…et qui a un certain moment etait exclusivement entouree que des pseudo-experts sud-africains) qui a hisse le despote Mugabe a la tete de cette organisation continentale. Les regards meritent d’etre tournes vers ces autocrates de la SADC (qui ont invente des conspirations fallacieuses contre J.Kabila pour incarcerer des Congolais innocents).

    Les FDLR servent surtout d’alibi pour les decaissements faramineux des « FONDS DE SOUVERAINETE ET DES FONDS SECRETS DE RECHERCHE ». En plus, les caciques securitaires du regime sont impliques dans le partage des dividendes de l’exploitation minieres par tous les groupes armes de l’Est. Je cerne tous ces aspects avec preuves documentaires dans mon prochain essai : « DEMOCRATIZATION IN THE CONGO AND J.KABILA’S HEGEMONIC PRESIDENCY » qui va parraitre aux USA en Juin.

    Veuillez realiser que le regime des ex CNDP, dont les elements sont armes jusqu’aux dents, est encore a Kananga. Et ce n’est pas hasard que l’on y a envoye un commandant d’academie fidele au regime. Ce regiment peut etre actionne n’importe quand afin de declarer l’Etat d’urgence, suspendre la Constitution et avoir un robuste alibi pour le glissement.

    Felicitiation et Courage.

    Hubert Kabasu Babu Katulondi

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