La stratégie militaire appliquée en politique : quand peut-on parler de victoire/défaite en politique ?
Une libre réflexion de Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Selon le récit de la mythologie grecque du cheval de Troie : « Après dix ans de siège et de combats inutiles, les Grecs, sur les conseils d’Ulysse, décident d’introduire dans la ville de Troie un énorme cheval de bois dans lequel ont été dissimulés des guerriers. Mais – et là se situe le principe du stratagème – il fallait amener les Troyens à le placer eux-mêmes dans l’enceinte de leur cité. Ce qu’Ulysse réalise par opération de désinformation : un de ses marins feignant d’avoir été abandonné, raconte aux Troyens que cet étrange objet est une offrande destinée à garantir aux Grecs la protection des dieux pendant le voyage de retour, mais il est pour cela nécessaire qu’il demeure sur la plage. Et les Troyens, installant le cheval dans leurs enceintes, activent le mécanisme fatal ayant conduit à leur invasion. Car une fois la nuit tombée, des guerriers cachés dans l’ouvrage en bois purent sortir en silence et ouvrir les portes de la ville pour l’assiéger »[1].
Pour le cas qui concerne la situation politique actuelle de la RDC, il suffit juste de remplacer les Grecs par le FCC et Kabila, Troie par l’Union Sacrée pour la Nation, le cheval par les membres du FCC ayant fait allégeance à Tshisekedi pour comprendre la supercherie qui se profile à l’horizon.
En effet, dans l’art de guerre, les stratégistes se focalisent moins sur l’éclat des batailles que sur leurs suites et impacts (politiques, diplomatiques, sociaux, économiques…) à long terme. D’autant qu’en stratégie, l’option militaire, quoique déterminante, ne suffit pas à elle seule pour déterminer la réalisation finale des objectifs poursuivis dans une guerre ; celle de prolonger la politique par d’autres moyens en contraignant l’adversaire à la soumission. L’épreuve de vérité n’est pas une bataille gagnée, aussi brillante soit-elle, mais la mise hors combat durable de l’ennemi, soit par la destruction de ses forces, soit par la maîtrise d’un espace de sécurité politiquement, économiquement et militairement suffisant ; ou encore par les dividendes diplomatiques de la défaite militaire engendrés à la suite d’une bataille militaire[2].

C’est ainsi que dans une guerre, on ne peut désigner le vainqueur qu’en considérant les fins, positives ou négatives, de la guerre ou de la campagne militaire. La méconnaissance de cette règle peut mener à des succès militaires sur le plan tactique mais qui peuvent être en même temps des échecs stratégiques. « La défaite de l’un des camps en présence est consommée lorsqu’il ne peut plus raisonnablement espérer de la continuation de la lutte un redressement politico-militaire qui lui permettrait d’obtenir de meilleures conditions de cessation des hostilités »[3]. Il en est de même en politique où une défaite ne peut être consommée que lorsque l’on neutralise complètement son ennemi et ses forces de sorte qu’elles ne soient plus capables d’agir ou de survivre politiquement. Est-ce le cas avec les transfuges du FCC ?
En politique tout comme dans l’art de guerre, on ne peut crier victoire que lorsque « l’ennemi a été totalement détruit, ou sa capacité de nuisance a été réduite au maximum ». Peut-on aujourd’hui parler de la défaite du FCC lorsqu’on voit la mutation de ses anciens membres (Bahati Lukwebo, Lambert Mende, Steve Mbikay, Ngoy Kasanji, M23, etc.) en une nouvelle force politique numériquement majoritaire au sein de l’Assemblée nationale et incontournable dans la future Union sacrée ? C’est comme si les soldats ayant collaboré avec le Troisième Reich sont réintégrés au sein de l’armée libératrice sans avoir subi la pleine force de la loi du fait de leur trahison.
La RDC a expérimenté les expériences militaires malheureuses du brassage, du mixage et de l’intégration des rebelles dans les FARDC. La même expérience est en train d’être rééditée sur le plan politique. Et ne soyons pas étonnés du résultat final d’ici à 2023 car les mêmes causes produisent souvent les mêmes effets.
Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Analyste des questions polituques et sécuritaires de l’Afrique médiane
Références
[1] Laurent Henninger et Thierry Widemann, Comprendre la guerre. Histoire et notions, Éditions Perrin, Paris, 2012, pp. 106-107. Cité par Jean-Jacques Wondo dans le livre collectif : Les Congolais rejettent le régime de Kabila, 2015, p.108.
[2] Jean-Jacques Wondo, Les Forces armées de la RD Congo, une armée irréformable ?, 2015, p. 67. Disponible en vente sur Amazon : https://www.amazon.fr/Forces-Armées-Congo-irréformable-Prospective/dp/9090287744.
[3] Hervé Coutau-Begarie, Hervé, Traité de Stratégie, Economica, 6ème édition, Paris, 2008.
[4] Hervé Coutau-Begarie, ibid.
One Comment “L’implosion du FCC ou le stratagème du cheval de Troie ? – Jean-Jacques Wondo”
Nzembele Kasongo Alphonse
says:M. Jean-Jacques pense qu’au point où le PR en est, ne disposerait pas de tous les atouts pouvant lui permettre d’avancer. Il continue à prendre le PR pour moins que rien et ça, il fait une très mauvaise analyse. Tranquillisez vs car Fatshi est dans le bon et mérite nos encouragements.