DESC Confidentiel : Des réunions sécuritaires et achats d’armes : Kabila prépare le glissement et la guerre !
Par Jean-Jacques Wondo Omanyundu
Lors de son séjour à Lubumbashi, dans le Haut-Katanga en juin 2016, la mission principale du président Kabila était d’évaluer la situation politique dans l’ancienne province du Katanga et de déterminer le niveau de soutien de l’opposition suite au départ de Katumbi et le G7. A Lubumbashi, Kabila a rencontré les quatre nouveaux gouverneurs de l’ex-province du Katanga et le premier ministre Matata Ponyo au cours de la soirée du 15 Juin. Au cours de cette réunion d’environ une heure, le gouverneur du Lualaba a demandé au Président Kabila pour qu’une unité supplémentaire des forces armées soit déployée à Kolwezi en proie aux troubles menés par des creuseurs miniers artisanaux mécontents des tracasseries policières. Le Premier ministre Matata a félicité les gouverneurs pour leurs efforts pour mobiliser le soutien financier et politique pour le PPRD de décision de sociétés minières de la province.
Durant ce même séjour à Lubumbashi, Kabila a essayé de rencontrer, sans succès, le général John Numbi. Numbi aurait décliné l’invitation de rencontrer le président Kabila. Ce refus a sonné a suscité un choc chez Kabila. Ce dernier ne cesse de l’attirer en mettant à sa disposition des moyens financiers[1].
Kabila multiplie des réunions sécuritaires pour s’assurer de la loyauté des hommes en armes et préparer une guerre contre les Congolais
Le 27 juillet 2016, Kabila a présidé une réunion du Conseil national de sécurité élargi. Cette réunion sécuritaire stratégique s’est tenue à sa résidence dite GLM, située près du Grand Hôtel de Kinshasa. Selon les sources recoupées, la réunion était plus une réunion d’évaluation du dispositif militaire et de sécurité mis en place à travers tout le pays, tout particulièrement dans les villes de Kinshasa et de Lubumbashi en cette période politique très agitée. Ils ont aussi étudié les états des besoins de différents secteurs liés à la défense en termes de moyens humains et matériels. Ils ont aussi vérifié et évalué l’impact éventuel négatif de la présence des forces spéciales militaires américaines dans les environs de la RDC, le long du Golfe de Guinée (Cameroun, Gabon, Congo-Brazza, Angola) et en Centrafrique en Ouganda ainsi qu’au Soudan du sud.
La réunion a aussi évalué les dernières acquisitions d’armements en Turquie, Chine, Biélorussie. Enfin, ils ont procédé aux évaluations du travail et des opérations de tous les services de sécurité civile et militaire nationaux et provinciaux en cette période politique très sensibles et leurs capacités de réaction ou opérationnelles + leur efficacité durant la période post-glissement. Selon nos sources, le président a donné une note de satisfaction 70% aux services de sécurité. Le président Kabila a demandé à ses « sécurocrates » de s’améliorer davantage en disant qu’ils font du bon job mais il faut plus et beaucoup plus. Et une vigilance extrême a été recommandée aux services, spécialement dans le contrôle et le suivi des réseaux sociaux qui sont devenus « un boulevard de déstabilisation très important » du régime.
Cette réunion autour du président Kabila a rassemblé tous les membres du Conseil supérieur de la défense présents à Kinshasa. La réunion a été élargie aux responsables des services de sécurité : ANR, DGM, Démiap, Services spéciaux de la PNC et Services de renseignement T2/GR.
Par ailleurs, lors de son séjour au Katanga en mi-juin 2016, Kabila avait tenu une autre réunion sécuritaire avec les principaux responsables de l’armée, de l’ANR et de la police. Il ressort de cette réunion que le général Hamuli Bahingwa, le chef d’état-major général adjoint des FARDC chargé des opérations, et le général Ilunga Kampete (Commandant de la GR at ancien des troupes blindées de la GR et ancien commandant de l’escadron blindé de la DSP sous Mobutu), ont été chargés par le président Kabila de sélectionner 4000 jeunes soldats dans les différents centres de formations des FARDC : Kitona, Kamina, Kibomango, Mura (près de Likasi au Katanga), Lokandu (au Maniema) afin de créer une nouvelle brigade blindée qui sera stationnée en permanence dans l’ex-Katanga. C’est la 37ème brigade blindée des forces de défense principale.
Cette nouvelle unité, basée sur la mobilité, va utiliser des matériels blindés qui étaient acheminés en masse au Katanga durant la première moitié de 2016 et signalés dans nos articles antérieurs. La nouvelle brigade blindée est entraînée au centre d’entrainement de Kipopo (45 km de Lubumbashi sur la route de Sakania). La formation sera dispensée par des instructeurs du corps des blindés de l’armée de terre égyptienne ainsi que les instructeurs militaires congolais. Cela explique l’intense relation diplomatique constatée ces derniers temps entre la RDC et l’Egypte qui travaille aussi en collaboration avec la Russie. Les présidents Vladimir Poutine et Al-Sissi sont très proches et entretiennent d’excellentes relations géopolitiques. Le lieu des exercices de la nouvelle brigade blindée en cours de constitution est situé dans la plaine de Kilimasimba (vaste plateaux au sud de l’aéroport de la Luano à Lubumbashi). Critères de sélection : aucun soldat de la nouvelle brigade n’est originaire des 4 provinces issue de l’éclatement du Katanga : Tanganyika, Haut-Katanga, Lualaba et Haut-Lomami. Mais le corps d’officiers en charge de l’encadrement et du commandement de la nouvelle brigade sera constitué des originaires et non-originaires de l’ex province du Katanga.
Assessment : Ceci démontre la volonté de Kabila de surarmer l’ex-province du Katanga c’est comme si Kabila se prépare à une grande guerre dans cette province. Il y a aussi cette impression que le régime qui a de moins en moins de soutien populaire dans l’ex-Katanga, cherche à y déployer des troupes qui n’en sont pas originaires pour éviter le risque de solidarisation des soldats avec la population. Il s’agit aussi d’un indice qui montre que Kabila pourrait faire du Katanga une zone de repli stratégique (militaire) en cas de perte du pouvoir à Kinshasa. D’où l’option de la tolérance zéro contre l’opposition au Katanga (Tout sauf Katumbi). Cette militarisation du Katanga illustre également la crainte du régime congolais de la naissance d’une rébellion armée dans l’ex-Katanga. En effet, depuis un temps, les services de sécurité, sans disposer de preuves tangibles, redoutent la création d’une rébellion au départ de l’Angola et de la Zambie. Les sources de DESC tentent de corroborer ces allégations. Il s’agit d’une situation très peu confortable pour Kabila qui laisse transparaître les signes de panique de son pouvoir. Toutefois, on peut malheureusement constater que l’option militaire seule, sans l’appui de la population en majorité hostile au glissement, risque de ne pas être très payante pour Kabila. D’où sa diversion autour du dialogue dont il est le seul élément de son blocage pour gagner du temps et mettre tout le monde devant un fait accompli le 1ç décembre 2016.
D’impressionnants stocks d’armes et munitions arrivés à Kinshasa
Les médias ont fait état récemment des acquisitions militaires à Kinshasa. Plusieurs sources sécuritaires nous ont effectivement confirmé l’information de la présence d’un important lot d’armes à la Base logistique. Selon ces sources, il s’agit des armes d’origine chinoise dont les cargaisons ont été débarquées au port de Boma (Bas-Congo) depuis la semaine 17 juillet 2016. Vu la grande quantité d’armes venue de la chine et la saturation des dépôts militaires de la Garde républicaine situés à Kibomango et Mbakana, une grande partie de ces armes sont désormais stockés dans les nouveaux entrepôts que l’amiral Kyabu Kaniki, l’actuel Commandant de la Base logistique, a fait rénover entièrement. L’acheminement de ces armes vers Kinshasa s’est fait via des camions militaires et par la voie ferrée.
Lieux de stockage à Kinshasa : Base logistique et le site militaire de la GR à Kibomango
Selon des sources portuaires de Boma et Matadi, ce chargement est composé d’armes individuelles et collectives ainsi que d’une quantité importante de munitions commandées et achetées en Chine depuis 2014-2015. Elles nous livrent quelques détails sur ce fameux chargement d’armes chinoises :
Il y avait dans ce chargement près 22 000 fusils d’assaut de fabrication chinoise de type 56 de 7.62mm×39mm ainsi que de fusils d’assaut de marque type 81 de 7.62×39mm. Outre les fusils d’assaut, il y avait le chargement contenait aussi un grand nombre de mitrailleuses d’appui- feux de marque chinoise de type 80 de 7.62mm×54mm et type 67 de 7.62×54mm.
Toujours dans ce chargement, figurent des centaines de mitrailleuses lourdes (appui peloton) de marque chinoise de modèles W-85 de 12.7mm et de type 77 de 12,7×108mm
Un lot spécial de ces armes est commandé pour uniquement le 14ème régiment de sécurité (ex-RSH), chargé de la protection rapprochée du président. Ce sont des fusils de précision pour tireur d’élite de marque QBU-88 d’un calibre de 5.8×42mm et aussi des fusils de précisions type 79 (versions chinoise du Dragunov russe) de 7.62×54mm comme calibre. Il y a une cinquantaine de fusils de ce type.
Il y a aussi un lot de 1000 lance-roquettes anti-char de 40 mm de marque type 69, c’est-à-dire la version chinoise du RPG-7 russe ainsi que plusieurs milliers de grenades anti-personnel et anti-char. Nos sources nous signalent enfin un lot important de munitions (3000 tonnes environ) de tout calibre.
A propos de l’origine des 80 gros camions blancs qui ont fait les rotations entre le port de Boma et la base logistique à Kinshasa, il s’agit d’un chargement arrivé dans deux bateaux en provenance de la Chine avec le chargement, mais ces 80 camions blancs sont des modèles russes Kamaz 43501,et Kamaz 55111 et qu’i s’agit d’un don de la Russie à la RDC.
Et pourquoi ces camions sont peints en blancs?
Nos sources déclarent qu’ils étaient peints en blanc depuis la Russie, il s’agit d’un don russe destiné à l’origine au contingent des FARDC au sein de la mission de Nations-Unies en République centrafricaine (MINUSCA) qui était confronté à d’énormes problèmes de logistique (transports notamment).
Cette assistance de la Russie est consécutive à une mission menée par les autorités militaires congolaises en Russie en novembre 2015. Mais en janvier 2016, l’ONU avait chassé de la MINUSCA le contingent des FARDC pour diverses raisons (manque de matériel militaire adapté ou aux standards des nations unies et cas de viols notamment) pendant que le chargement de camions militaire Kamaz était en route pour la RDC. Mais à leur arrivée à Kinshasa, ces camions ont été entreposés à la base logistique centrale, à Kinshasa comme matériel de réserve. Dès que l’évacuation du chargement a été effectuée au port de Boma et leur acheminement vers Kinshasa termioné, la hiérarchie militaire a décidé de les réquisitionner pour d’autres tâches.
Et pourquoi ils sont marqués OR (Office des Routes) ?
Nos sources répondent que ces camions était peint en Russie avec le sigle UN (United nations), avec la fin de la missions du contingent de FARDC au sein de la MINUSCA en Centrafrique, le sigle UN a été remplacé par OR pour juste un camouflage. Mais d’ici là tous ces camions seront peints en vert tacheté comme le reste du charroi des FARDC.
Hormis les 80 camions Kamaz peints en blanc, 100 autres camions de types Kraz et Donfeng appartenant à la garde républicaine et aussi à la 1ère zone de défense sont aussi réquisitionnés pour cette opération d’acheminement de matériels militaires de Boma à Kinshasa.
Quelle stratégie de Kabila derrière l’initiative du président Denis Sassou Nguesso ?
Selon les sources présidentielles RD congolaises, le président Joseph Kabila soutient entièrement l’initiative du Président Denis Sassou Nguesso en qui il a une totale confiance. Denis Sassou Nguesso dépêche régulièrement son homme de confiance, le vice-amiral Jean Dominique Okemba (conseiller spécial en matière de sécurité) à Kinshasa pour rendre compte au président Kabila de l’évolution des contacts entre Sassou et les tenors de l’opposition RD Congolaise qu’il a eu à rencontrer jusque-là. Cette démarche vise simplement à ramener les opposants, via la médiation du président Sassou Nguesso qui a déjà envoyé ses émissaires rencontrer Etienne Tshisekedi à Bruxelles à la mi-juillet 2016, à s’inscrire dans la logique de son dialogue convoqué le 28 novembre 2015, avec quelques améliorations, sans pour autant s’aligner sur la logique du dialogue préconisé par la résolution 2277 du Conseil de sécurité de l’ONU. Pour ces sources, la démarche de Sassou est d’aider le président Kabila à court-circuiter, sans le dire ouvertement la résolution 2277 qui, selon l’entourage de Kabila, devient caduque car inapplicable. Les conseillers de Kabila avancent qu’il n’est plus techniquement possible d’organiser l’élection présidentielle dans les délais constitutionnels. De ce fait, la résolution 2277 devient obsolète.
Jean-Jacques Wondo Omanyundu / Exclusivité DESC
[1] http://afridesk.org/fr/dossier-desc-qui-sont-les-securocrates-katangais-du-regime-de-kabila-1ere-partie/.
One Comment “Les indiscrétions de DESC : Réunions sécuritaires – Armement – Diplomatie parallèle”