Jean-Jacques Wondo Omanyundu
POLITIQUE | 27-04-2016 16:30
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Les dessous du séjour de Kabila à Lubumbashi du 13 au 18 avril 2016 – DESC Confidentiel

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Les dessous du séjour discret de Kabila à Lubumbashi du 13 au 18 avril 2016

Le président Kabila a séjourné à Lubumbashi du mercredi 13 avril  au lundi 18 avril 2016. Attéri à l’aéroport de la Luano à  13h30,  Joseph Kabila y était précédé par le nouveau gouverneur de la province de Haut-Katanga, Monsieur Kazembe ainsi que par  l’administrateur général de l’ANR, le service des renseignements civils, Kalev Mutond (AG/ANR) et par  Jules Katumbwe, le Conseiller principal chargé de la Sécurité intérieur et des renseignements au sein de la Présidence. Le ministre des Mines, Martin Kabwelulu l’avait également précédé à Lubumbashi quatre jours plus tôt.

Officiellement, ce voyage avait un caractère privé. Le chef de l’Etat congolais était allé assister au deuil de l’une de ses tantes paternelles décédée et enterrée le dimanche 10 avril 2016. Elle s’appelait  Alphonsine Ilunga Banza. Elle était la petite sœur de Laurent Désiré Kabila et la mère du colonel Mpanga Mukutu, le commandant du RSH (Régiment sécurité et honneur de la GR), l’unité chargée de la protection rapprochée du président.

Le second motif de ce séjour était de se reposer nous renseigne une source présidentielle : « Le chef veut prendre quelques jours de repos. Depuis aout 2014, il ne s’est pas reposé ». Il était prévu qu’il se repose dans sa Ferme Espoir, située à 15km de Lubumbashi sur la route de Likasi (un lieu de villégiature).

Mais depuis son arrive, Joseph Kabila a passé l’essentiel de son séjour dans la résidence présidentielle (Ruwe) en plein centre-ville de Lubumbashi.

Un séjour à caractère hautement politique

Le mercredi 13 avril, Kabila avait reçu dans la soirée des  notables de la communauté Balubakat conduits par le ministre Kabwelulu.

L’agenda du Président prévoyait aussi la rencontre avec les 4 nouveaux gouverneurs des quatre nouvelles provinces issues du démembrement de l’ex province du Katanga ainsi que les quatre présidents des assemblées provinciales de ces nouvelles provinces.

Le président Kabila a également reçu les chefs coutumiers katangais dès la nuit de son arrivée à Lubumbashi.

En perte de popularité, seulement 30% de la population de l’ex-Katanga seraient favorables au président, d’après une enquête interne menée par l’ANR. Cette visite avait pour objectif de peaufiner des stratégies pour remonter la cote de popularité du président en fin mandat et aux promesses non tenues pour la majorité des populations de cette ex-province cuprifère.

Cette visite du président à Lubumbashi était placée sous sur très haute sécurité au point que la ville était transformée en zone de guerre avec des chars paradant ses principales artères. Selon une source militaire : « Le centre-ville de Lubumbashi est en quasi en état de siège et d’alerte maximale avec un déploiement important des éléments de la 11ème brigade spéciale d’infanterie/GR et des éléments du RSH/GR venus de Kinshasa ».

Le nombre de personnes qu’il y a rencontrées était trié sur le volet depuis Kinshasa.

Kabila a aussi tenu une réunion avec l’état-major de la 2ème  zone de défense (couvrant les deux anciennes provinces du Kasaï et le Katanga)  + l’état-major de la 22ème région militaire (couvrant l’ex-province du Katanga) afin d’évaluer le déploiement des nouvelles troupes arrivées au Katanga et de nouveaux armements.

Le ministre congolais des Mines, M Martin Kabwelulu
Le ministre congolais des Mines, M Martin Kabwelulu

Le ministre Martin Kawelulu, le questeur et tiroir-caisse de Kabila 

Selon une source de l’ANR : « le régime de Kabila est en panne de devises étrangères. Pour s’assurer la loyauté de l’armée, de la police et des services de sécurité et pour financer les politiciens et les acteurs de la société civile pro-dialogue, le chef a ordonné directement à Deogracias Mutombo (Gouverneur de la Banque centrale congolaise : BCC) de tourner la planche à billets afin de produire une somme faramineuse de 500 milliards de francs congolais (FC)  fabriqués en urgence. Vu que tous ces bénéficiaires du père Noël (Kabila) avaient besoin des dollars, ils ont déversé tous ces milliards de francs congolais dans les marchés de change pour racheter des dollars ».

Conséquence : Le dollar américain s’échange actuellement à 1000 FC pour 1 $ au lieu de 910 FC pour 1$ le 01/01/2016. Le franc congolais connait une forte dépréciation.

Par ailleurs, etant donné qu’il y a rareté du dollar sur le marché, Kabila a demandé au ministre  Kabwelulu de mobiliser les mining (sociétés minières) pour qu’ils fassent un effort financier supplémentaire en termes de cotisation fiscale. Cela en vue de permettre ç l’Etat à faire face à ses autres obligations importantes. Cette mesure a été mal accueillie par certaines entreprises minières confrontées actuellement à une grave crise due à la chute spéctaculaire des matières premières.

Annulation surprise du déplacement de Kabila vers Brazzaville

Alors qu’il devait aller assister à la cérémonie de prestation de serment de Sassou Nguesso le samedi 16 avril 2016, Joseph Kabila ne s’y est plus  rendu bien que l’équipe  d’avance de la GR s’y était déjà lourdement déployée. Le président Kabila avait annulé cette visite en toute dernière minute et était resté à Lubumbashi, tout en dépêchant son homme de confiance, Aubin Minaku, le président de l’Assemblée nationale pour le représenter à la cérémonie d’investiture de Sassou Nguesso.

Aucun motif particulier connu pour expliquer cette annulation de dernière minute. Selon nos informateurs, Joseph Kabila Il est arrivé lui-même à l’aéroport de Luano à  Lubumbashi et a brusquement décidé de regagner la résidence Ruwe. Il a instruit Aubin Minaku de le représenter a cette cérémonie alors que les équipes déployées à Brazzaville ont assuré  que la sécurité était très bonne et garantie, après analyse et évaluation. Ce scénario illustratif de l’état de panique qui habite le président congolais en cette période de fin de son mandat. Si ses services lui ont donné des garanties maximales sur sa sécurité et que Kabila ait refusé de les suivre, cela montre qu’il se méfie également des services de renseignement de sécurité congolais. Il n’est pas étonnant qu’il évalue également sa sécurité avec d’autres services non congolais et non connus par son pré-carré sécuritaire dont il se méfie de plus en plus. Il sied de rappeler qu’avant son assassinat, son prédécesseur Laurent-Désiré Kabila ne cachait plus sa méfiance envers les éléments de la GSSP, sa garde rapprochée[1]. Nous connaissons la suite…

Instructions de Kabila de neutraliser le meeting de Katumbi

Le président Kabila avait finalement rejoint Kinshasa lundi 25 avril 2016 dans la soirée avant de se rendre à New-York le mercredi en passant par Cuba. Avant son départ de Lubumbashi, il a laissé des instructions sécuritaires précises concernant la conduite à tenir par les forces de sécurité par rapport à la situation qui règne dans l’ex Katanga, notamment par rapport à la manifestation organisée par l’ancien gouverneur de cette ex-province, Moïse Katumbi. Pour Kabila, il fallait tout faire pour étouffer ou réprimer durement tout mouvement/tentative de contestation populaire au Katanga et neutraliser par tous les moyens le meeting de Katumbi qui devait avoir lieu.

Katumbi-l-ancien-allie-du-president-joseph-kabila

Il nous revient des sources sécuritaires de Lubumbashi que le précarré sécuritaire de Kabila serait satisfait de l’action du dispositif sécuritaire déployé sur place. Ils estiment que « Moïse Katumbi a échoué car il na pas pu tenir sont meeting devant le stade Kibassa Maliba de la Kenya. De deux les Fourmis de 2016 ont procédé à la neutralisation de la garde rapprochée de Katumbi en désarmant et arrêtant quatre de ses gardes du corps rapprochés dont 3 sudafs et un citoyen americain ». Ils ont été transférés manu militari à Kinshasa ce lundi 25 avril 2016 dans l’après-midi, par un vol spécial. Ils sont actuellement détenus au cachots situer au cabinet de Kalev Mutond, l’administrateur général de l’ANR, situé dans l’immeuble de l’ex Banque congolaises, derrière les Galeries présidentielles à Gombe. »

Pour rappel, ce n’est pas la première fois que le régime de Kabila procède à l’arrestation des gardes du corps privés de ses opposants. En 2006, il a également arrêté puis expulsé les gardes du corps du candidat à la présidentielle, le Dr Oscar Kashala, classé 5ème après le premier tour des élections. Il s’agissait des agents de la société de gardiennage privé sud-africaine Oméga Security. Le régime de Kabila les a accusé d’être des mercenaires voulant commettre un coup d’état.

Siège de l'UNAFEC_ Kyungu

24 avril 2016 : Lubumbashi sous haute tension

Pour rappel, des troubles ont été signalés le jeudi 21 avril 2016 à Lubumbashi entre des centaines de partisans de Gabriel Kyungu, l’ancien président de l’assemblée provinciale de l’ex-Katanga, qui ont affronté les forces de l’ordre après qu’on ait enlevé des banderoles à l’effigie de Moïse Katumbi sur le siège de l’UNAFEC dans la commune de la Kenya à Lubumbashi.

Pour affronter les manifestants en colère, le pouvoir a essentiellement utilisé les unités spéciales de la police (Les GR formées en techniques anti-émeutes et déguisées en policiers : et appelés les Fourmis de 2016) pour accomplir ces opérations de maintien de l’ordre public à la Kenya. Bilan : Zéro mort mais de nombreux blessés et plusieurs arrestations.

Selon nos sources, le pouvoir devient de plus en plus inquiet et nerveux. Plus tard dans la nuit du 21 au 22 avril, le siège de l’UNAFEC a été scellé et cadenassé, et gardé par les faux policiers ou les  Fourmis de 2016. Toute la commune de la Kenya était bouclée avec des barrages de police partout, ce qui a paralysé les transports en commun, les écoles, les marchés et les activités dans la commune de la Kenya étaient pratiquement à l’arrêt. Le pouvoir redoutait la journée du 24 avril 2016 au cours de laquelle Moïse Katumbi devait s’exprimer dans un meeting devant le stade Frédéric Kibassa Maliba de la Kenya.

Les arrestations et les enlèvements des membres de la JUNAFEC se sont multipliés et poursuivis à Lubumbashi le 23 avril 2016,  plus particulièrement dans la commune de la Kenya. Mais d’autres jeunes gens innocents ont également été raflés et arrêtés abusivement par les Fourmis de 2016 (faux policiers/GR). Conséquence : beaucoup de jeunes gens fuient la commune de la Kenya pour se réfugier dans les autres communes de  Katuba, Kamalondo et Kapemba afin de se soustraire à ces arrestations arbitraires.

Le dimanche 24 avril 2016 la ville de Lubumbashi était complètement bouclée par la police, (y compris les éléments de la GR déguisés en policiers : Fourmis de 2016) et l’armée. Le meeting de l’opposition était interdit sur instructions personnels de Kalev depuis Kinshasa (ordres transmis le samedi à 21 heures). Kalev avait instruit le comité provincial de sécurité du Haut-Katanga de prendre des dispositions nécessaires pour boucler la ville de Lubumbashi et empêcher le meeting de l’opposition, organisé par Katumbi, qui devait avoir lieu devant le stade de la Kenya. Les autorités provinciales du Haut-Katanga avaient finalement interdit le meeting dans la nuit à l’issue de la réunion du conseil de sécurité provincial.

Ainsi, les unités de la police et de l’armée ont tenté de disperser violemment les manifestants de l’opposition qui étaient rassemblés devant le stade de la Kenya. On a signalé des affrontements entre les jeunes et la police qui a utilisé les bombes lacrymogènes et les balles à caoutchoucs. Mais Katumbi était décidé de se rendre sur le lieu de la manifestation. Il s’est dirigé en vain vers le lieu du rassemblement avec une foule nombreuse qui l’accompagnait en chantant Moïse, Moïse… Mais la répression de la police, dispersant la foule venue l’écouter, l’a empêché de s’adresser à ses militants.

Jean-Jacques Wondo Omanyundu

[1] http://afridesk.org/fr/les-confidences-de-desc-kabila-a-failli-etre-atteint-par-un-tir-maladroit-a-kingakati/.

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2 Comments on “Les dessous du séjour de Kabila à Lubumbashi du 13 au 18 avril 2016 – DESC Confidentiel”

  • Yes we can

    says:

    Katumbi paie ce que nous avions denoncer Depuis 2001 Mais malheusement lui il soutenait cela

  • Patrick menga

    says:

    Kabila et katumbi il y a rien.C’est un jeux d’un singe sur un arbre.ils font semblant pour amuser la galerie le peuple Entre les 2 pas de problème.

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