Jean-Jacques Wondo Omanyundu
GÉOPOLITIQUE | 09-06-2015 14:45
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L’ Angola : entre politique d’influence et affirmation de puissance – GRIP – (M. Luntumbue et JJ Wondo)

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

La posture régionale de l’Angola :

entre politique d’influence et affirmation de puissance

Observatoire pluriannuel des enjeux sociopolitiques et sécuritaires en Afrique Équatoriale et dans les îles du golfe de Guinée

Résumé

La recomposition des dynamiques régionales africaines, au tournant des années 90 et au cours des années 2000, a consacré l’émergence de nouveaux pôles de puissance, et relancé la course au leadership, pour laquelle l’Angola, par la diversification de ses partenariats et alliances, semble en mesure de confirmer un nouveau rôle sur la scène africaine et internationale. Longtemps forcé de se concentrer sur les questions internes, par la guerre contre l’UNITA, l’Angola est sorti de son isolationnisme à la faveur des crises dans les deux Congo, dont la gestion a propulsé l’Angola au rang de puissance régulatrice régionale.

S’appuyant sur son statut stratégique, lié notamment à ses abondantes ressources pétrolières, ainsi que sur une politique extérieure dynamique et innovante, l’Angola entend s’affirmer comme un partenaire économique privilégié pour les partenaires extérieurs – puissances traditionnelles et pays émergents – en vue de son intégration dans l’économie mondiale. Cette politique d’émergence s’appuie également sur l’exploitation des opportunités que peut procurer à l’Angola, sa triple appartenance à la SADC, la CEEAC et la CPLP, à travers une participation active à la gestion des questions touchant à l’intégration régionale et à la paix et la sécurité, tant en Afrique australe, en Afrique centrale, dans le golfe de Guinée et dans l’espace lusophone.

Introduction

Situé sur la côte ouest de l’Afrique australe, l’Angola est un territoire de 1 246 700 km² de superficie pour une population d’à peine 21,47 millions d’habitants1. Bordé au nord et au nord-est par la République démocratique du Congo (RDC), l’Angola est limitrophe de la Namibie au sud, et de la Zambie au sud-est. Sa frontière ouest est constituée par un littoral long de 1 650 km sur la façade atlantique, tandis que l’enclave de Cabinda, sa province la plus excentrée, située sur le rivage nord de l’océan Atlantique, est séparée du territoire angolais par la RDC.

À la fois membre de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), et de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), l’Angola est le plus grand pays lusophone au carrefour des espaces francophone (Congo-Brazzaville, RDC), et anglophone (Zambie, Namibie) de l’Afrique médiane.

Après une guerre civile longue de 27 années – qui a pris fin en 2002 –, l’Angola s’est engagé dans un ambitieux processus de transformation économique, principalement porté par l’exploitation de ses abondantes réserves en hydrocarbures. Deuxième producteur de pétrole du continent après le Nigeria, cinquième puissance économique africaine, l’Angola figure parmi les pays à la croissance économique la plus rapide au monde (5,1 % en 2013, 7,9 % en 2014 et 8,8 % en 2015) grâce aux investissements dans l’infrastructure publique, notamment dans les secteurs de l’énergie et des
transports.

Le pays compte cependant une gamme variée de ressources naturelles (gisements gaziers, diamants, minéraux, ressources halieutiques et agricoles), qui justifient également un intérêt stratégique croissant, tant des pays émergents que des puissances traditionnelles. En retour, l’Angola manifeste aussi des velléités d’une politique d’influence et de projection, en élargissant ses intérêts financiers tant sur le continent africain, qu’en Amérique latine, en Europe, et plus anecdotiquement en Asie.

Par ailleurs, l’implication naissante de l’Angola dans la dynamique de l’architecture africaine de paix et de sécurité (APSA), confirme également une rupture dans une trajectoire axée jusqu’ici sur la résolution d’enjeux internes et la sécurisation de son voisinage régional immédiat. S’appuyant sur une politique extérieure dynamique, et pragmatique, l’Angola semble avoir opté pour une posture d’affirmation de soi comme puissance émergente. Une posture dans laquelle l’usage des forces armées et le recours à une diplomatie innovante, servent à la fois d’instruments de résolution des conflits dans les zones d’intérêts stratégiques de l’Angola, mais aussi de levier de renforcement des capacités militaires du pays et de légitimation de son influence régionale et continentale.

Selon les dernières estimations du SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute), relatives aux dépenses militaires, les dépenses de la défense angolaise ont augmenté de 6,7 % en 2014, pour atteindre un montant de 6,8 milliards de dollars. Ce qui représente le budget militaire le plus élevé d’Afrique subsaharienne et le deuxième du continent derrière l’Algérie, lequel a encore progressé de 12 % en 2014 pour atteindre un montant de 11,9 milliards de dollars.

Avec la cinquième plus grande armée d’Afrique subsaharienne (voir infra, point 2.2), l’Angola est en passe de devenir un interlocuteur clé sur un éventail de questions africaines touchant aux enjeux de sécurité. Négociateur de premier plan en Guinée-Bissau ou dans l’est de la RDC, membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies pour deux années – depuis le 1er janvier 2015 – l’Angola préside également, depuis le 15 janvier 2014, la Conférence internationale pour la région des Grands Lacs (CIRGL).

En partant du concept classique de puissance, entendue comme capacité d’influence dans divers domaines – dont les champs politique, idéologique, économique et militaire – cette Note d’Analyse se propose d’élucider le statut régional de l’Angola, en mettant en perspective la politique extérieure du pays, et la mutation récente de son rôle dans l’espace géopolitique de l’Afrique médiane.

1. Géopolitique de l’Angola

Pour lire l’intégralité de la note stratégique rédigée par Michel Luntumbue (http://www.grip.org/node/12) avec la collaboration de Jean-Jacques Wondo Omanyundu (chercheur associé au GRIP : http://www.grip.org/fr/node/1747), ouvrez le lien  :

http://www.grip.org/sites/grip.org/files/NOTES_ANALYSE/2015/Notes%20DAS%20-%20Afrique%20EQ/OBS2011-54_GRIP_Note%2018_Angola.pdf

Le ministère français de la Défense fait régulièrement appel à des études externalisées auprès d’instituts de recherche privés, selon une approche géographique ou sectorielle, visant à compléter son expertise interne. Ces relations contractuelles s’inscrivent dans le développement de la démarche prospective de défense qui, comme le souligne le dernier Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, « doit pouvoir s’appuyer sur une réflexion stratégique indépendante, pluridisciplinaire, originale, intégrant la recherche universitaire comme celle des instituts spécialisés ».

Le GRIP s’est vu attribuer, depuis octobre 2013, la conduite de l’Etude Prospective et Stratégique intitulée « Observatoire pluriannuel des enjeux sociopolitiques et sécuritaires en Afrique équatoriale et dans les îles du golfe de Guinée » par la DGRIS (Direction générale des relations internationales et de la stratégie – Ministère français de la Défense).

Une grande partie de ces études sont rendues publiques et mises à disposition sur le site du ministère de la Défense. Dans le cas d’une étude publiée de manière parcellaire, la Direction générale des relations internationales et de la stratégie peut être contactée pour plus d’informations.
AVERTISSEMENT : Les propos énoncés dans les études et observatoires ne sauraient engager la responsabilité de la Direction générale des relations internationales et de la stratégie ou de l’organisme pilote de l’étude, pas plus qu’ils ne reflètent une prise de position officielle du ministère de la Défense.
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3 Comments on “L’ Angola : entre politique d’influence et affirmation de puissance – GRIP – (M. Luntumbue et JJ Wondo)”

  • Très belle analyse qui devrait être faite aussi pour la R.D.C. Si notre pays était bien gouverné, c’est à lui que reviendrait le rôle que joue aujourd’hui l’Angola en Afrique centrale et australe. Espérons que ce temps viendra,bien entendu avec le concours des intellectuels,particulièrement ceux de la diaspora.

  • Troll

    says:

    ¤ ..NEUTRALITE, UNE OPTION POUR LA RDC?

    Chaque fois nous lisons les ouvrages ou les analyses des congolais, on retrouve toujours ou presque cette ambition « régionale » ou continentale.
    La RDC peut-elle posseder un autre destin politique international? Ne devrions-nous pas (aussi) étudier l´option de la « neutralité » afin de construire notre capacité de défense et mettre en place un système de gestion politique basé sur des institutions démocratiques fortes et stables*
    L´approche du Japon (depuis la fin de la seconde mondiale) où la constitution interdit toute intervention militaire en dehors du territoire nationale, les cas de la Suède, du Finlande ou de l Autriche devraient sans doute servir de base d´études pour les congolais*
    Pour quelle raison souhaitons faire du Congo une « puissance régionale » quand nous avons la plus grande priorité de refaire l´administration de l´´État et acquerir une capacité militaire crédible afin de garantir l´existence de l´Etat?
    Devrions-nous consacrer nos « ressources » dans une competition avec des pays comme l´Angola au lieu d´utliser ces ressources dans des objectifs nationaux visant á stabiliser le pays?

  • Kiassi

    says:

    C’est un plaisir qui se renouvelle chaque fois qu’on vous lit, je crois que Troll a raison pour chercher à tout prix le leadership du continent pour la RDC
    ne peut et ne doit pas être la priorité. La RDC a beaucoup d’ATOUTS pour jouer d’autres rôles sur le continent de par sa position stratégique au coeur de l’Afrique. si Franzt Fanon a vu juste ce qu’aucun pays ne peut le faire sans la RDC, pour cela il faut débarrasser du pays de tous ces politiciens mendiants. C’est là que se situe le vrai combat dans le « leardshiping » (excusez-moi du terme) que la RDC. Beaucoup des stratégies s’offrent à nous
    Le Costa Rica a adopté et fait un choix stratégique parce que son économie ne le permettait pas, il a choisi de ne pas avoir une armée : c’est un havre de paix et de tranquillité ou il fait bon vivre. Rien ne sera en RDC sans un ETAT fort, et qui dit état fort, des institutions fortes respectant le droit de l’homme et surtout la stricte application de la CONSTITUTION dans tout ce qu’elle a d’affreux….

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