Enjeux de la fin de l’Accord de la Saint Sylvestre : Revue stratégique de la crise congolaise et prospective
Par Jean-Jacques Wondo Omanyundu
La RDC traverse une situation politique critique et très fragile depuis le 19 décembre 2016 et le 17 février 2017 qui correspondent respectivement à la fin du mandat de l’ancien président Joseph Kabila et à l’échéance du mandat des députés nationaux. Les sénateurs, eux, sont hors mandat depuis 2012. Pour éviter une situation de vide juridique, un accord politique entre la majorité présidentielle regroupant les partis au pouvoir et le Rassemblement, réunissant une très large coalition des partis de l’opposition politique autour de l’opposant historique, Etienne Tshisekedi, a été signé le 31 décembre 2016, grâce à la médiation des évêques catholiques congolais. Cet accord, appelé « accord de la Saint-Sylvestre », était censé servir de base juridique et politique pour la période de transition devant aboutir à l’organisation des élections libres, démocratiques et transparentes auxquelles M. Kabila ne pourra plus se présenter et à la mise en place de nouvelles autorités élues et marquer l’alternance démocratique pacifique L’Accord prévoiyait entre autres des mesures de décrispation politique envers les opposants et les activistes de la société civile en détention sans procès ou à l’issue de parodies de justice. Il prévoyait également le partage équitable du pouvoir entre le pouvoir et l’opposition pour la période allant jusqu’au 31 décembre 2017.
Entretemps, M. Etienne Tshisekedi meurt à Bruxelles le 1er février 2017. Depuis son décès, le président Kabila et son entourage politique n’ont cessé de multiplier des manœuvres pour bloquer la mise en œuvre de l’Accord et, partant, le processus électoral censé conduire le pays à sa toute première alternance démocratique. C’est notamment le cas en avril 2017, lorsqu’il a décidé, par achat et débauchage des opposants, à saborder la conclusion des négociations qui devaient aboutir à la signature officielle de l’« arrangement particulier » entre les deux principaux acteurs aux négociations. Joseph Kabila a nommé un Premier ministre, Bruno Tshibala, précédemment suspendu de l’UDPS et non désigné par le Rassemblement, et a mis sur pied un gouvernement sans se concerter avec les instances officielles du Rassemblement. Ces actes unilatéraux posés par Joseph Kabila, consacrant la violation de l’Accord de la Saint-Sylvestre, ont été unanimement condamnés par l’opinion congolaise et les principaux partenaires internationaux de la RDC, qui sont allés jusqu’à l’adoption des sanctions contre certains ministres du gouvernement Tshibala et d’autres collaborateurs directs de Kabila pour entrave au processus électoral et violations des droits humains.
C’est en effet dans un subtil stratagème de faire de la question électorale la pièce centrale de sa stratégie du maintien au pouvoir que la CENI, dont les actions laissent montrer qu’elle est inféodée à la famille politique de Kabila[1], a publié un calendrier électoral sous la pression des Etats-Unis prévoyant l’organisation des élections au 23 décembre 2018.
Dans une analyse copubliée le 5 janvier 2017 avec l’analyste militaire Jérôme Ziambi Kengawe, intitulée « Au-delà de l’Accord de la Saint Sylvestre, quo vadis RD Congo ? », nous concluions en mettant en doute la bonne foi du président Kabila au respect de l’Accord de la Saint-Sylvestre en fixant rendez-vous à nos lecteurs le 31 décembre 2017[2]. Dans la même analyse, nous avons écrit : « Malgré l’euphorie suscitée par cet accord, inattendu, le pire est à venir. Si certains fanatiques du Rassemblement se réjouissent plutôt du partage du gâteau, les acteurs politiques que nous avons contactés sont conscients que la marge de manœuvre de la mise en application de cet accord reste très réduite »[3]. La réalité n’a pas démenti nos prédictions.
La présente analyse, sans être exhaustive, présente de manière synthétique les grandes tendances des enjeux de cette période cruciale qui risque d’impacter l’avenir de la RDC, notamment en cas d’absence d’un large consensus politique sur l’après 31 décembre 2017. Elle termine par la proposition, selon notre vision, de quelques pistes de solutions pour la résolution de cette crise.

1. Les effets du rétrécissement de l’espace d’expression politique
La situation qui prévaut actuellement en RDC est principalement corollaire à la crise de légitimité et de légalité à la fois de Joseph Kabila et de toutes institutions républicaines électives qui ne se sont pas renouvelées en 2016 tel que prévu par la Constitution. Cette situation induit une instabilité institutionnelle générale à laquelle se greffent une crise sécuritaire généralisée et une crise socioéconomique aux conséquences explosives et imprévisibles. Faute d’un contrat social entre les gouvernants et les gouvernés, base de toute légitimation de l’exercice du pouvoir, avec une marge de manœuvre diplomatique assez réduite, le régime de Kabila ne cesse de rétrécir l’espace politique et recourt à la force pour pouvoir gouverner le pays.
Cette politique délibérée de prise en otage de l’espace politique se caractérise principalement par :
le rétrécissement de l’espace des libertés publiques et individuelles, et des droits constitutionnels garantis aux citoyens et à l’opposition ;
une patrimonialisation de l’État et la privatisation des forces de sécurité qui se traduit par le recours abusif à l’armée et aux services de sécurité, inféodés au pouvoir congolais, pour gouverner par la force ;
l’instrumentalisation de la CENI (la Centrale électorale chargée d’organiser les élections) et du pouvoir judiciaire au profit du camp présidentiel ;
des intimidations, des arrestations arbitraires, l’assassinat et des détentions illégales des opposants et des acteurs de la société civile et des médias, principalement ;
une cancérisation de la situation sécuritaire générale du pays marquée par la multiplication des foyers de tension sur toute l’étendue du territoire national ;
une situation socioéconomique chaotique au bord de l’implosion.
2. Les cinq dimensions principales des enjeux de la crise congolaise
a. Dimension politique et électorale :
C’est l’enjeu central dont découlent tous les autres du fait de la non-organisation des élections dans les délais constitutionnels en 2016 et de la non-application de l’Accord de la Saint-Sylvestre. Cela entraîne une extrême polarisation de la crise politique et une exaspération populaire pouvant induire une instabilité politique beaucoup plus grave.
En effet, il ressort de plus en plus que le pouvoir de Kinshasa rechigne à organiser les élections censées permettre à la RDC d’expérimenter la première alternance démocratique au pouvoir. Si l’Accord du 31 décembre 2016 reste la source et la référence provisoire de légitimité des autorités actuelles, son interprétation reste très sélective et varie selon que l’on est du pouvoir, de l’opposition ou de la communauté internationale. Le pouvoir congolais, qui ne compte pas revenir en arrière, considère que l’Accord est bien respecté. Pour le Rassemblement, l’église catholique qui l’a parrainé) et la majorité des acteurs de la société civile, cet Accord est foulé aux pieds par le président Kabila. Par contre, la communauté internationale se donne plutôt une posture diplomatique médiane et considère que l’Accord est partiellement appliqué. Ces interprétations plurielles et contradictoires des prescrits de cet Accord sont autant de sources de l’exacerbation de la crise politique. Les stratégies et les actions des uns et des autres se construisent autour de cela.
b. Dimension sécuritaire
Cet aspect est à la fois un enjeu et le corollaire de l’instabilité politique actuelle. Le blocage politique et la polarisation de la tension politique pourraient se déboucher sur un conflit armé de grande envergure. Le régime opte pour une réponse militariste face à la crise politique et institutionnelle. Les prémisses de cette insécurité se font désormais jour avec la réactivation des groupes armés dans les deux Kivu et dans l’ancienne province Orientale. Une récente recherche du GEC et de HRW a dénombré pas moins de 130 groupes armés locaux actifs dans la partie orientale de la RDC[4]. D’autre part, le Katanga et les Kasaï continuent de faire face à l’insécurité. La situation sécuritaire à Kinshasa et dans le Bas-Congo reste très volatile. Les autorités congolaises tentent de réactiver certains groupes armés et milices de jeunesse[5] pour instaurer une sorte d’insécurité généralisée afin de justifier le report sine die des élections. On constate également une militarisation des interventions de la police[6] où plusieurs milliers d’éléments de la Garde républicaine, chargée de la protection présidentielle, ont été incorporés progressivement depuis 2015. Le pays vit une sorte d’état d’urgence qui ne dit pas son nom.
Malheureusement, il arrive trop souvent que lorsque l’on restreint l’espace d’expression politique et démocratique au profit de la violence d’État, on incite ses adversaires à recourir aux mêmes méthodes comme étant le seul mode d’expression respectable.. La violence engendre généralement la violence. Ainsi, le risque d’un embrasement généralisé aux conséquences néfastes multiples devient très élevé.
c. Dimension socioéconomique
La crise économique actuelle, liée à la volatilité du cadre macroéconomique de la RDC et de l’absence des réformes dans de nombreux secteurs clés de l’économie et des finances. A cela, il faut ajouter les incertitudes politiques actuelles qui plombent la confiance des partenaires économiques et des bailleurs de fonds. Cette situation est en grande partie tributaire de l’actuel climat politique interne délétère qui empêche des nouveaux investisseurs étrangers d’apporter des flux financiers en RDC. Selon l’agence de cotation Moody’s, qui vient de dégrader la perspective de notation de la RDC vers une option plus négative, B3, la polarisation accrue de la scène politique nationale du pays se révèle préjudiciable à l’économie, au soutien international et au profil de crédit du pays. « La perspective négative [«] reconnaît l’augmentation significative de la volatilité macroéconomique et des pressions externes dans un contexte politique national de plus en plus polarisé, avec des risques à la baisse pour l’économie, la position extérieure du pays et le soutien financier international »[7].
Dans ce contexte prospectif socioéconomique négatif, les premières victimes de cette crise sont les populations qui, dans une écrasante majorité, sont laissées au bord d’une politique socioéconomique inflationniste, exclusive et néopatrimonialiste, aux effets d’une bombe sociale à retardement (baisse du pouvoir d’achat, hausse du chômage et de la pauvreté,…) qui peut se traduire par des contestations sociales violentes, spontanées et généralisées.
d. Dimension géopolitique régionale belligène
Sur l’aspect géopolitique régional, la crise politique congolaise actuelle reste dans le continuum de la crise régionale du milieu des années 1990, non entièrement consommée. L’instabilité politique et sécuritaire entretenue en RDC répond à ce nouvel ordre géopolitique régional centrifuge, où le Rwanda, l’Ouganda et l’Angola sont les acteurs de premier plan. Dans cette dynamique systémique, un bouleversement majeur non contrôlé de la situation en RDC aura des répercussions inévitables sur ces voisins directs. Ces derniers ne regardent pas tous dans la même direction quant aux stratégies de résolution durable de la crise congolaise. Une confrontation militaire régionale[8], par milices ou armées interposées, n’est pas à écarter en RDC. De nouvelles alliances, aussi opportunistes que contre nature, vont se créer, à en croire plusieurs informations concordantes à notre disposition.
Selon ces informations compilées par DESC, le Rwanda reste un soutien majeur et déterminant pour Joseph Kabila. Cependant, dans son pragmatisme, le pays de Kagame peut basculer en dernière minute au profit d’un leader du Rassemblement dans sa stratégie obsessionnelle de s’accaparer d’une partie du territoire congolais et surtout de ne pas perdre toutes ses rentes militaro-financières en RDC engrangées depuis la guerre d’agression du Zaïre en 1996. Le Rwanda semble contrôler de fait l’Est de la RDC.
L’Ouganda, courtisé à la fois par Kabila et par une certaine opposition, se rangerait plutôt du côté de celle-ci aux dernières nouvelles. Cependant, Museveni entretient le flou sur son rôle assez ambigu dans sa complicité éventuelle de la déstabilisation de l’Est du Congo, via notamment le M23[9], surtout dans les attaques armées qui visent la région de Beni-Lubero depuis octobre 2014. Toutefois, le pragmatisme ougandais, en conflit latent avec Kigali qui a infiltré le système de sécurité de l’Ouganda de la même manière qu’en RDC en y injectant des éléments rwandais, pourrait amener Museveni à oser une tentative d’émancipation vis-à-vis de Kagame, par la RDC interposée dans une nouvelle alliance opportuniste. Les séquelles de l’humiliation ougandaise par le Rwanda lors de la « Guerre de six jours » à Kisangani, entre le 5 et le 11 juin 2000, hantent encore les esprits ougandais. La récente arrestation d’Antipas Mbusa Nyamwisi à Entebbe a mis à jour le degré d’infiltration des services de sécurité ougandais par le Rwanda[10]. Depuis, environ 47 responsables sécuritaires ougandais, à la solde du Rwanda de par leurs origines biologiques tutsi et leurs complices sont aux arrêts. Les deux pays traversent actuellement une période de guerre froide qui ne dit pas son nom. Comme le pense l’analyste Musavuli, contrairement au Rwanda, l’Ouganda semble de plus en plus mitigé par l’idée de s’octroyer une partie du Congo et se créer des problèmes diplomatiques alors qu’il ne parvient déjà pas à surmonter ses crises politiques et sécuritaires internes.

Derrière les déclarations officielles de l’intervention de l’UPDF, l’armée ougandaise à Beni, se cachent des mobiles latents d’une nouvelle guerre régionale qui pourrait se dérouler en RDC. Selon une source militaire en contact avec James Kabarebe en début décembre 2017 à Gisenyi, le Rwanda s’y prépare sérieusement. Les manœuvres militaires « FTX[11] » qui ont eu lieu les 10 et 11 novembre 2017 au Centre d’Instruction du Camp militaire de Gabiro en District Gatsibo, Province de l’Est du Rwanda, auxquelles ont assisté Kagame[12] et la haute hiérarchie des RDF, l’armée rwandaise, sont un indice d’une nouvelle guerre qui guette la RDC et qui doit être pris très au sérieux.
La Tanzanie, qui serait plutôt affectivement proche de Joseph Kabila, pourrait revoir sa stratégie à la suite de l’attaque mortelle, du 7 décembre 2017, d’un camp de la Monusco qui a coûté la vie à ses 15 casques bleus à Beni. Elle peut opter pour une politique de fermeté à l’égard de Kabila et ses soutiens régionaux. Dans ce contexte, le spectre d’une guerre contre le Rwanda n’est pas à exclure.
L’Angola, déjà mécontent à cause de l’afflux massif dans sa partie nord de près d’un million de réfugiés congolais ayant fui le conflit créé de toute pièce au Kasaï par le régime Kabila depuis avril 2016, est plutôt favorable au départ de Kabila et le presse de faciliter le bon déroulement du processus électoral en cours. L’Angola tient à la sécurité de ses frontières au point qu’une crise chez son grand voisin du nord, plus intense que le conflit du Kasaï, risque de voir des centaines de milliers de Congolais envahir ses riches provinces diamantifères du Nord. La probabilité d’une intervention préventive et dissuasive de l’Angola en amont du territoire congolais reste de plus en plus réelle et les FAA, l’armée angolaise, s’y préparent sérieusement depuis des mois. Selon une source diplomatique africaine, la dernière rencontre du 9 décembre 2017 à Brazzaville entre Joseph Kabila et le nouveau président angolais, João Lourenço s’est très mal déroulée. Il ressort de cette réunion que Kabila n’a pas pu donner des réponses claires et satisfaisantes à son homologue angolais qui craint une extension de la crise congolaise sur son territoire. En effet, les deux pays partagent une frontière terrestre commune longue de 2.511 kilomètres. Alors que Kabila a amassé des troupes le long de la frontière congolaise au niveau du Bas-Congo, Lourenço a promis de réagir fermement si Kabila laisse pourrir la situation en RDC et ne s’engage pas activement à organiser les élections au 23 décembre 2018.
Quant à la position de la grande puissance continentale sud-africaine [,] sur la RDC, la chercheuse Stéphanie Wolters de l’ISS affirme que les relations entre Pretoria et Kinshasa sont plutôt régies au seul bénéfice des relations très personnelles entre les présidents Jacob Zuma et Joseph Kabila. Il ne s’agit pas vraiment de relations d’État à État. « L’une des questions est que la politique [entre la RDC et l’Afrique du Sud] n’est pas régie par le ministère des affaires étrangères, ni par l’ambassade, et ils ne sont pas consultés, ils voient Kabila comme déstabilisant ». Les décisions entre l’Afrique du Sud et la RDC sont plutôt prises par la présidence entre Zuma et Kabila[13]. Cette situation permet au régime de Kabila de s’en tirer avec de graves violations des droits de l’homme et le réconforte dans le durcissement de son pouvoir.
e) Dimension internationale : Position ambiguë de la communauté internationale
Attendu pour connaitre sa position par rapport au calendrier électoral en tant que porte-voix de la communauté internationale, sans prendre acte du calendrier électoral publié par la CENI, le Conseil de Sécurité des Nations Unies a finalement pris note de la publication du calendrier électoral qui inclue les élections présidentielles, législatives et provinciales conjointes, devant se tenir le 23 décembre 2018, se rangeant, face voilée, derrière la position des États-Unis d’Amérique. Ces derniers, par l’entremise de l’Envoyée spéciale de Donald Trump, l’Ambassadrice Nikki Haley, avaient demandé aux autorités rd-congolaises d’organiser les élections en 2018, soulignant que le pays ne recevra plus aucun soutien des USA si cela n’est pas respecté. « Les élections doivent être organisées en 2018 sinon, la RDC ne doit pas compter sur le soutien des États-Unis et de la communauté internationale ».
Parmi les principales recommandations de la résolution 2348 du Conseil de sécurité, on souligne[14] : « Les membres du Conseil de sécurité en appellent aux autorités de la République démocratique du Congo ainsi qu’aux institutions nationales et internationales, pour prendre toutes mesures nécessaires et immédiates, pour s’assurer que le nouveau calendrier électoral soit scrupuleusement respecté et mis en œuvre ; (…) et l’adoption des textes juridiques y référant. Ils ont également souligné la nécessité d’engager toute action qui s’impose afin de s’assurer que ces élections en vue, se déroulent dans les conditions requises de transparence, de crédibilité et soient inclusives, aux fins d’un transfert de pouvoir paisible selon la Constitution et la provision contenue dans le Chapitre II de l’Accord du 31 décembre 2016. » « Les membres du Conseil de Sécurité ont réitéré l’urgence de la mise en œuvre effective et expresse de l’Accord du 31 décembre 2016 (…) pour conférer une légitimité aux institutions de la transition. »
Cependant, au-delà de ces aspects de pures formalités diplomatiques, rien ne démontre dans ses agissements que le pouvoir de Kinshasa, qui brave toutes les résolutions importantes des Nations Unies depuis la résolution 2098 de mars 2013 et qui ne respecte aucun de ses engagements politiques, changera son attitude condescendante face à ce gros machin qui reste jusqu’à ce jour très accommodant envers lui. C’est ici que nous devons relever les limites de l’action de cette communauté internationale dont la présence discontinue en RDC depuis 1999 s’achemine vers un grand fiasco. L’attaque des casques bleus tanzaniens illustre l’échec de l’ONU en RDC, qui peine à atteindre ses objectifs de la stabilisation, encore moins de la sécurisation du pays par la protection de ses populations, victimes d’une longue guerre imposée par les puissances néolibérales qui dirigent les Nations-Unies.
Etant consciente, via plusieurs analyses et rapports d’experts, de l’absence de réelle volonté politique des autorités congolaises, la communauté internationale continue de se comporter, de manière irresponsable, comme si sans autre forme de pression plus contraignante sur Kabila et son entourage direct, les élections se tiendront réellement le 23 décembre 2018. Il est navrant de constater qu’elle se lance de nouveau aveuglement dans de nouvelles recommandations inopérantes alors qu’elle n’a jamais pris aucune mesure coercitive contre le non-respect des résolutions précédentes (2098 et 2277) par le régime de Kinshasa.
C’est le cas, par exemple, lorsque le Conseil de Sécurité :
–« demande au Parlement [congolais], pendant la session ordinaire ouverte le 15 mars 2017, de modifier la loi électorale selon qu’il conviendra pour que le calendrier électoral soit conforme à l’Accord du 31 décembre 2016 » et que 18 mois après rien n’est fait. [
– « prie le Secrétaire général de le tenir informé par écrit tous les 45 jours, lorsqu’aucun rapport périodique n’est prévu, des progrès réalisés et des obstacles qui pourraient se poser aux niveaux politique et technique dans la mise en œuvre de l’accord du 31 décembre 2016 et la préparation des élections ; (…) »
– «prie le Secrétaire général de lui présenter, tous les six mois, en coordination avec son Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs et son Représentant spécial pour la République démocratique du Congo, un rapport sur le respect des engagements pris dans l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération et de manière plus générale, ses liens avec la situation en matière de sécurité dans la région des Grands Lacs ». Malheureusement, rien de tout cela n’est réalisé !
Il en est de même de la demande du Conseil de Sécurité à la CENI de publier immédiatement un calendrier électoral complet révisé et de procéder sans tarder à une mise à jour crédible des listes électorales,[15]. Ici encore, depuis le 31 mars 2017, date de publication de cette résolution, la CENI n’a publié le calendrier électoral qu’au mois de novembre. Entretemps, le vote in extremis de la loi électorale, au contenu démocraticide, donne l’ampleur des futures crises que l’ONU sera appelées à gérer dans le courant de 2018. D’autant que les discours politiques actuels des partisans de Kabila n’augurent rien de positif dans le sens de l’effectivité de la tenue des élections au 23 décembre 2018.
Quelle marge de manœuvre pour la réussite de l’Accord de la Saint sylvestre et la tenue effective des élections en décembre 2018 ? Nulle !
Nous avons mentionné que les difficultés rencontrées dans les négociations politiques aboutissant à un accord pré-déterminent largement sa mise en œuvre effective. Les décisions prises lors des négociations, les voltefaces, les tractations et les compromis qui ont permis aux négociations d’aboutir à des accords et surtout la manière dont les intérêts en jeu, les arguments avancés et les logiques parfois divergentes ont été pondérés, ont fait l’objet de conciliation ou de choix exclusifs ou inclusifs. Ce sont tout autant des indicateurs majeurs des problèmes qui risquent d’émerger lors de la mise en œuvre dudit accord. Par conséquent, l’application de l’Accord ne sera que l’actualisation concrète sur le terrain des conflits, des antagonismes et des contradictions que les négociations politiques étaient censées résoudre en amont. L’actualité aujourd’hui corrobore pertinemment cette prédiction.
En effet, si Joseph Kabila s’est servi de l’Accord de la Saint-Sylvestre pour se donner, comme l’écrit le juriste-criminologue Jean-Bosco Kongolo, la seule légitimité consensuelle d’une année que lui conférait l’Accord du 31 décembre 2016[16], il n’est pas dupe qu’il lui faudra un nouveau stratagème pour continuer impunément son aventure à la tête du pays. Sur ce registre, ce ne sont pas des opposants opportunistes et dépourvus de tout sens de patriotisme qui font défaut. Ainsi, l’opposition lui servira probablement encore de béquilles pour poursuivre son glissement. Et comme, nous l’avons indiqué récemment, après les négociations de l’OUA, puis de la CENCO, c’est vers un troisième round des négociations que Kabila compte pouvoir s’offrir sa prochaine légitimité.
Pour ce qui concerne l’organisation concrète des élections, l’expert électoral Alain-Joseph Lomandja, esquisse de manière prospective certains aspects des évolutions politiques probables et des pistes alternatives susceptibles de promouvoir la pondération des rapports de force entre les parties prenantes au processus électoral. Il propose également quelques pistes pertinentes à explorer pour rendre les élections jouables dans le cadre des délais prévus par le calendrier électoral publié par la CENI et à l’aulne de la nouvelle loi électorale. L’analyste émet cependant un bémol quant à sa faisabilité du fait de manque de volonté politique, d’autant qu’il considère cette réforme comme une stratégie de programmation juridique d’une survie politique post-électorale du PPRD, le parti du président Kabila[17].
Quels scénarii prospectifs pour contourner la crise politique ?
Nous revenons globalement aux propositions de notre analyse intitulée « RD Congo–Kabila : Il y a eu le 19 décembre 2016 et après ? »[18] qui reste encore d’actualité, en partant exclusivement des signes apparents de manque de volonté politique du régime de Kabila. Cette option est soutenue par l’analyse de Lomandja qui considère que la stratégie politique du PPRD vient de compromettre les fondamentaux des élections pluralistes par l’adoption d’une loi électorale qui risque de ne pas garantir le caractère sacré du suffrage universel et la vérité des urnes. Il s’agit ni plus ni moins d’une stratégie insidieuse tendant à compromettre gravement la consolidation du processus de la démocratisation de la RDC initié en 2006.
1°) La tenue des élections après la mise en œuvre des mesures de décrispation politique
Cette hypothèse, improbable en termes de réalisme politique de Kabila, ne peut s’opérer que lorsque, en plus de réelle volonté politique du camp politique présidentiel, le processus électoral est accompagné rigoureusement d’une batterie de mesures coercitives de la communauté internationale. Cela passe notamment par la poursuite et l’intensification des mesures de sanctions directes sur le président Joseph Kabila et sa famille biologique, non pas avec des décisions absurdes de couper l’aide au développement ou de conditionner le financement des élections qui feraient plutôt le jeu de Kabila qui n’a que faire de la population et des élections[19]. Cette pression devra se faire aussi par la surveillance très étroite du secteur de la sécurité selon une approche plus politique et pragmatique de la communauté internationale pour contraindre les autorités congolaises à s’investir à garantir un espace politique plus serein, apaisé et sécurisé, en évitant d’instrumentaliser ni de politiser la justice et les services de sécurité congolais. Cela garantirait la protection et la sécurité de la population et des différents acteurs politiques et de la société civile. La pression sur la CENI devra continuellement être maintenue et renforcée.
2°) Une union citoyenne sacrée politique – société civile et armée contre Kabila dans une stratégie de non coopération et de défiance permanente de Kabila
Si en fin 2016 on avait assisté à des tentatives plutôt encourageantes de la coalition entre les forces politiques de l’opposition et les forces sociales acquises au changement autour du Rassemblement initié par Etienne Tshisekedi, force est de constater que depuis son décès, l’opposition congolaise peine à mobiliser et se montre impuissante face à Joseph Kabila qui réagit par la force. En effet, toutes les actions menées jusque-là par l’opposition semblent facilement contenues par le régime de Kabila. D’autre part, la société civile, réduite à quelques groupuscules de mouvements citoyens incapables de ratisser large au sein de la population, ne fait preuve d’aucune stratégie de résistance alternative efficace, pour contourner le dispositif sécuritaire mis en place par le régime de Kabila.
Cette absence de stratégie concertée exige que l’opposition et la société civile tendent la main à un troisième acteur incontournable que sont les hommes en armes. Ces derniers doivent être conscientisés, comme au Burkina Faso, pour adopter une posture républicaine, et non milicienne, face aux enjeux de la fin de règne de Joseph Kabila. A l’instar de leurs homologues zimbabwéens, il est encore possible d’identifier des hommes en armes congolais capables d’appliquer la doctrine de la nécessité qui veut que la force armée d’un pays a une obligation indépendante d’intervenir dans les affaires intérieures lorsque les dirigeants militaires déterminent que cela est dans l’intérêt suprême de la nation[20]. La coordination de cette triple trinité politique-société civile-armée reste encore possible en cooptant dans cette dynamique des personnes références capables d’assurer cette passerelle.
Cette option est confortée par la thèse du professeur Ngoma Binda qui estime qu’au regard de deux indicateurs de démocratie généralement pervertis en Afrique que sont le mode d’accession légitime, juste et pacifique au pouvoir ; et, les légitimes mécanismes de gestion de la conservation du pouvoir, « dans la mesure où l’arène politique africaine a été et demeure dominée par le militaire, il faudrait, à la limite, faire appel au militaire pour faire respecter et sauver la démocratie»[21]. Sans une implication patriotique et républicaine des forces armées et de sécurité, nous risquons de déchanter au lendemain du 31 décembre 2017.
La pression à exercer sur le régime de Kabila doit rester permanente et constante. Elle doit s’opérer dans le cadre d’une double stratégie de non coopération et de défiance permanente. C’est-à-dire une stratégie de refus de toute forme de négociation directe avec Kabila et de défiance continue en le maintenant dans une sorte d’assistance respiratoire artificielle de sorte qu’à la moindre inflexion favorable des rapports de forces on la lui débranche.
3°) Nécessité de mise en place d’un Gouvernement citoyen pour l’alternance, sans Kabila, soutenu par la communauté internationale
L’analyste Lomandja estime à juste titre que la nouvelle donne légale exige aussi le courage politique de se détourner de l’idée improbable d’une transition de 18 mois sans Joseph Kabila, les 18 mois pouvant être détournés en faveur d’un nouveau glissement. Il conditionne en même temps le déroulement d’un processus électoral crédible et apaisé à la volonté politique du Gouvernement congolais et au soutien ferme de la communauté internationale[22]. A contrario, rien n’empêche qu’au regard du sabordage du processus électoral que l’expert électoral a maintes fois dénoncé, qui allonge subtilement par de faux calculs techniques et politiciens[23], la tenue effective des élections, que l’on puisse proposer d’autres stratégies alternatives pouvant être exploitées par les acteurs politiques de l’opposition et de la société civile.
Cette option est motivée par la situation de l’impasse et du chaos dans laquelle le régime de Kabila tente d’entrainer le pays, à la suite de sa violation flagrante de l’Accord de la Saint-Sylvestre. Ayant réécrit son propre arrangement particulier qui viole l’esprit et la lettre de celui obtenu par la CENCO et la résolution 2348 de l’ONU, Kabila s’écarte délibérément de l’Accord. Au 1er Janvier 2018, l’Accord de la Saint-Sylvestre devient obsolète. Cette situation inédite va générer un contexte politique particulier et flou. En effet, à partir du 1er janvier 2018, aucune institution républicaine élective ne pourra se prévaloir d’une quelconque légitimité ni légalité devant le peuple congolais et ne pourra donc plus représenter légalement la RDC auprès de la communauté internationale.
D’où l’urgence pour l’ensemble des forces politiques et sociales du Congo d’envisager une transition citoyenne sans Kabila. Un gouvernement devrait être mis sur pied en s’inscrivant dans la logique de la résolution 2348 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies pour bénéficier d’une certaine légitimation internationale. Il faudrait surtout agir efficacement pour obtenir le soutien d’un tel gouvernement par les États régionaux, les organisations régionales comme la CIRGL, la SADC, l’Union africaine, et surtout des Nations-Unies. Ce gouvernement devra être constitué autour des objectifs visant à contraindre par tous les moyens le président Kabila à démissionner à partir du 1erjanvier 2018.
Étant la cause de l’enlisement politique actuel, Joseph Kabila ne peut plus être une partie de la résolution de la crise qu’il a engendrée. La solution de l’après 31 décembre 2017 doit se faire sans lui. Pour ce faire, il faudra développer une stratégie de non-coopération et défiance permanente du régime de Kabila, en refusant de tomber de nouveau dans le piège d’une nouvelle négociation inopérante avec lui, qui entrerait dans sa stratégie du « Fighting and Talking ».
Ce gouvernement de transition (sans Kabila et son camp politique – comme au Burkina Faso après la chute de Blaise Compaoré) devra être conduit par une personnalité imminente de la société civile et composé uniquement d’experts[24]. Il devra travailler autour des objectifs précis, pas uniquement électoraux, tels que la relance d’un processus électoral crédible et transparent devant redonner la confiance à tous les acteurs concernés, la stabilisation de l’État dont l’enjeu sécuritaire sera déterminant et majeur pour tenir des élections apaisées et surtout jeter les bases de la consolidation de la démocratie, de l’État de droit et de la bonne gouvernance.
En effet, à situation exceptionnelle, il faut des solutions de choc courageuses et exceptionnelles. À société bloquée, des blocs de solutions de choc volontaristes pour redonner espoir et vie au peuple !
DESC vous souhaite une Bonne et Heureuse année 2018 et vous remercie de votre confiance
Jean-Jacques Wondo Omanyundu/ Exclusivité DESC
Références
[1] L’expert électoral Alain-Joseph Lomandja, dans plusieurs articles publiés sur DESC est quasi revenu systématiquement sur cet aspect de l’instrumentalisation de la CENI par la famille politique de Kabila.
[2] Jérôme Kengawe Ziambi & JJ Wondo. Voici la conclusion de cette analyse : « (…) Toutefois, la seule option politique ne sera pas à notre avis suffisante pour pousser Joseph Kabila vers la sortie. Car tout ce qui se trouve dans cet accord est constitutionnel, pourquoi Kabila n’avait-il pas respecté la Constitution ? Nous en reparlerons à coup sûr en décembre 2017 », in http://afridesk.org/fr/au-dela-de-laccord-de-la-saint-sylvestre-quo-vadis-rd-congo-jj-wondo-jerome-ziambi-k/.
[3] Ibid.
[4] Jason Stearns et Christoph Vogel, La Topographie Des Groupes Armés Dans l’Est Du Congo, Réseaux fragmentés et politisés, BAROMETRE SECURITAIRE DU KIVU––DECEMBRE 2017.
[5] A Kinshasa, Des badauds « recrutés par un ministre de la République » tentent de perturber une messe à Notre Dame du Congo le 17 décembre 2017. http://www.afriwave.com/?p=6306.
[6] https://www.radiookapi.net/2017/07/19/emissions/linvite-du-jour/rdc-est-dans-une-conjoncture-de-militarisation-de-la-police.
[7] http://www.politico.cd/actualite/la-une/2017/12/16/moodys-contredit-bcc-degrade-note-souveraine-de-rdc.html.
[8] Jean-Jacques Wondo Omanyundu, « Guerre imminente dans les Grands-Lacs ? Une inquiétante course aux armements dans la région », DESC, 27 mars 2015. http://afridesk.org/fr/guerre-imminente-dans-les-grands-lacs-une-inquietante-course-aux-armements-dans-la-region-jj-wondo/.
[9] http://afridesk.org/fr/strategie-le-rwanda-plus-fort-que-jamais-en-rdc-malgre-la-deroute-du-m23-jj-wondo/.
[10] http://www.monitor.co.ug/News/National/Story-behind-CMI-arrest-police-officers/688334-4187226-h29t7oz/index.html.
[11] FTX (field training exercise) est un jargon OTAN militaire uniformisé qui signifie un exercice mené sur le terrain dans des conditions de guerre simulées au cours desquelles des unités participent avec des troupes et de l’équipement.
[12] http://fr.igihe.com/securite/le-president-paul-kagame-assiste-aux-exercices.html.
[13] https://www.businesslive.co.za/fm/features/africa/2017-08-31-zuma-and-kabilas-friendship-guides-foreign-policy-at-expense-of-democracy/.
[14] http://forumdesas.org/spip.php?article13974.
[15] https://www.un.org/press/fr/2017/cs12772.doc.htm.
[16] Jean-Bosco Kongolo, « Homme providentiel recherché pour une transition sans Kabila », DESC, 18 décembre 2017. http://afridesk.org/fr/homme-providentiel-recherche-transition-kabila-jb-kongolo/.
[17] Alain-Joseph Lomandja, « Comment l’opposition politique et la société civile peuvent s’adapter à la nouvelle loi électorale », DESC, 21 décembre 2017. http://afridesk.org/fr/lopposition-politique-societe-civile-peuvent-sadapter-a-nouvelle-loi-electorale-aj-lomandja/.
[18] « Opinion : RD Congo–Kabila : Il y a eu le 19 décembre 2016 et après ? » – JJ Wondo –In http://afridesk.org/fr/opinion-rd-congo-kabila-il-y-a-eu-le-19-decembre-2016-et-puis-jj-wondo/#sthash.ma0p3HqR.dpuf.
[19] D’autant que l’aide au développement n’a aucun impact sur la richesse et les biens amassés par Kabila et son entourage. Sa suspension va à coup sûr paupériser encore une population exsangue et incapable de revendiquer avec vigueur dans la rue.
[20] JJ Wondo, « Le Manifeste citoyen, le soldat congolais et l’activation de l’article 64 », 10 octobre 2017. http://afridesk.org/fr/manifeste-citoyen-soldat-congolais-lactivation-de-larticle-64-jj-wondo/.
[21] http://afridesk.org/fr/larmee-et-la-police-congolaises-le-rempart-ultime-contre-la-violation-de-la-constitution-jj-wondo/#sthash.dGawqErp.dpuf.
[22] Alain-Joseph Lomandja, « Comment l’opposition politique et la société civile peuvent s’adapter à la nouvelle loi électorale », DESC, 21 décembre 2017. http://afridesk.org/fr/lopposition-politique-societe-civile-peuvent-sadapter-a-nouvelle-loi-electorale-aj-lomandja/.
[23] Alain-Joseph Lomandja, http://afridesk.org/fr/ces-elections-que-corneille-nangaa-norganisera-probablement-pas-en-rd-congo-aj-lomandja/.
[24] Jean-Bosco Kongolo, « Homme providentiel recherché pour une transition sans Kabila ». DESC, 18 décembre 2017, http://afridesk.org/fr/homme-providentiel-recherche-transition-kabila-jb-kongolo/.
3 Comments on “Enjeux de la fin de l’Accord de la Saint Sylvestre : Revue stratégique de la crise congolaise et prospective – JJ Wondo”
GHOST
says:SAINT SYLVESTRE, QUEL ROLE POUR LA MONUSCO ?
La mission militaire de l´ONU se trouve en principe en première ligne quand l´église catholique compte « rassembler » la grande majorité de la societé civile et des partis politiques de l opposition dans sa grande manifestation du Saint Sylvestre.
La Monusco vient de perdre son patron á quelques jours du rendez-vous du Saint Sylvestre. Ce que Sidiku qui avait cette fonction quitte dès janvier 2018 pour ceder sa place á une dame qui avait dèjà sejournée au Congo comme adjointe du patron de la Monusco.
Militairement parlant, le boss de la Monusco quitte la RDC avec un bilan étrange où les analystes militaires ne comprenent pas comment un « FOB » (Forward Operating Base) de la brigade « africaine » de l´ONU peut subir une attaque et perdre près de 100 militaires? Ce que cette brigade qui possede un mandat « offensif » ne peut deployer une unité dans un FOB sans respecter les procedures les plus élementaires comme un check point á chaque enntré du FOB, plusieures LZ (Landing Zone) pour les hélicoptères, une procedure spéciale radio où une rupture de contact de plus de 30 minutes avec la Main Operating Base entraine automatiquement une alerte et un CAS (Close Air Support) quand la Monusco possede des hélicoptères de combat Rooivalk de l Afrique du Sud dont les équipages possedent la maîtrise des opérations de nuit depuis les années ´90.
Pire, l´assassinat de deux agents de l´ONU au Kasai où ils se sont retrouvés dans une zone de guerre civile sans protection militaire de la Monusco ni une procedure sécuritaire specifique remet en cause le leadership du diplomate africain Sidiku.
Sans doute, l´operation militaire ougandaise sur le territoire congolais qui n´a pas été sanctionée par un feu vert du Conseil de Sécurité a été le ras le bol (lire http://www.rfi.fr/afrique/20171229-rdc-ouganda-eringeti-attaque-adf-poursuite-updf-lmabert-mende )
En tout cas, la Monusco ne peut avoir une posture de « neutraité » quand la Cenco qui avait obtenue que l´accord du Saint Sylvestre soit transformé en une résolution du Conseil de Sécurité possede toute la légalité de manifester dans la rue.
La Monusco sans « chef » et l´ambassade des USA sans ambassadeur.. a moins de 48 heures de la marche des chrétiens.. Wait and see
GHOST
says:¤ POINT DE RUPTURE ?
Quand Kabila a decidé de lancer la répression dans les églises des paroisses catholiques dans les villes congolaises, il a tout simplement opté pour une « rupture » avec la Cenco.
La répression dans les églises est un message « viril » envers l´ONU, les USA et l´UE, car le seul fait de « desacraliser » les églises est une action politique très agressive où Kabila exprime son mepris des valeurs spirituelles non seulement du Congo, mais de toute la communauté internationale.
Quand en Iran, le président en fonction affirme que son peuple possede le droit de manifester dans la rue, au Congo le message est explicitement á l´envers: prendre refuge dans une église ne constitue plus une garantie pour la sécurité des congolais. C´est comme si les églises sont considerées comme des « sièges » des partis politiques qui avaient été incendiés dans la capitale.
La rupture avec la Cenco serait une sorte de fuite en avant où Kabila semble accepter son choix de la dictature même si dans son message de voeux, il continue de parler de la démocratie comme un « acquis ».
> LA PROSTETATION DE « PROXIMITE »
Comme l´histoire des Frères Musulmans, du Hamas ou du Hezobollah le démontre, une lutte politique de « proximité » qui tire sa force d´une implantation dans des zones defavorisées d´un Etat est plus efficace et même très populaire.
L´opposition au Congo a toujours favorisée des marches de protetation dans la rue en direction de la République de Gombe. L initiative de l´Eglise Catholique qui a placée la manifestation du 31 decembre sous une option de « proximité » où les chrétiens devaient manifester en partant de leurs paroisses, dont les églises sont situées au coeur des quartiers populaires, oui cette initiative reprend l´approche du Hamas et du Hezbollah.
Cette manifestation est plus solide, plus efficace même si la perception des certains analystes la manifestation avait pour but de lancer une révolution dans la rue… sans preparation mentale des manifestants.
Au contraire, la Cenco a fait tomber Kabila dans un piège où son image, sa credibilité, le peu d´honneur et toutes les astuces avec des fausses promesses ont pris fin.
Ainsi, Kabila est contraint d´avancer sans « masque » et devient très vulnerable car ne pouvant plus cacher son ambition de rester au pouvoir avec l aide des répression..
Point de rupture où Kabila perd l´initiative car ne possedant qu´un argument de la force.. mais plus jamais la force des arguments.
GHOST
says:> PERCEPTION (S)
Les congolais possedaient plusieures perceptions de la journée du 31 decembre… Certains d´entre nous avaient eu la « preception » que la Cenco aurait optée pour une « révolution dans la rue ». Ils n´ont pas acceptés de lire et d´analyser le message des laics catholiques qui n´ont jamais parlés d´une « révolution »..mais comme en 1992 avec la Conférence Nationale… ces catholiques parlaient d´une manifestation visant á obtenir l´application de l´accord de la Saint Sylvestre.
Perception? En lisant le message de D Reynders, on retrouve le « key word » qui est l´accord de la Saint Sylvestre* http://www.lalibre.be/dernieres-depeches/belga/crise-politique-en-rdc-m-reynders-met-en-garde-les-auteurs-de-la-repression-brutale-des-manifestations-5a4a53a3cd70b09cef67faf2
Quelque soit la condamnation de la répression butale, le message subtil de Reynders est que la sortie de la crise passe par l´accord de la Cenco*
La Cenco n´a jamais été en faveur d´un coup d´État ou d´une révolution dans la rue. Même si Kabila continue á appliquer un autre « accord », celui negocié avec l´UDPS (Tshitshi?) en cedant la fonction du premier ministre á « l´UDPS », l´accord de la Saint Sylvestre exige une « transition » politique où il partage « réellement » le pouvoir afin d´organiser les élections d´une manière consensuelle avec l´opposition. L´accord consiste á « organiser » un EXIT en douceur et démocratiquement.
la fausse perception d´une partie des congolais se confronte avec cette réalité où la Cenco est entrain de reprendre la stratégie qui avait renversée Mobutu. La Cenco http://www.rfi.fr/20180101-rdc-eglise-opposition-kabila-kinshasa-accord-saint-sylvestre-manifestation continue la lutte avec un autre objectif qui ne correspond pas á la perception « populaire » de la révolution dans la rue.
La Cenco applique la « loi du moindre mal » même quand la perception populaire est celle d´un rendez-vous manqué le 31 decembre.
Ce que comme Mobutu avant lui, Kabila a mis en mouvement une « force » qu´il ne contrôle plus … les circonstances vont le contraindre á retourner vers la Cenco. …. et negocier son EXIT