Election des Gouverneurs des « nouvelles » provinces :
la CENI a t-elle encore violé la Loi et la Constitution ? –
APRODEC
Introduction
Le 23 juillet 2015, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a publié un communiqué de presse par lequel elle a rendu publique la Décision n° 013/CENI/BUR/15 du 23 juillet 2015 portant convocation du corps électoral et publication du calendrier des scrutins pour l’élection des Gouverneurs et vice-Gouverneurs des 21 « nouvelles » provinces de la République Démocratique du Congo. Il s’agit plus précisément :
Pour l’ex-Province de Bandundu Kwango; Kwilu et Maï- Ndombe
Pour l’ex-Province de l’Equateur Equateur; Mongala; Nord-Ubangi; Sud-Ubangi et Tshuapa
Pour l’ex-Province du Kasaï Occidental Kasaï et Kasaï central
Pour l’ex-Province du Kasaï Oriental Kasaï Oriental; Lomami et Sankuru
Pour l’ex-Province du Katanga Haut Lomami; Haut Katanga; Lualaba et Tanganyika
Pour l’ex-Province Orientale Bas-Uele; Haut-Uele; Ituri et Tshopo
Le précité calendrier prévoit que du 7 au 8 août 2015 les listes de candidatures établies par la CENI pourront faire l’objet d’un recours à la Cour d’appel de l’ancienne province initiale (sic). Ceci, conformément à l’article 165 de la Loi électorale. Un même recours est également prévu auprès de cette juridiction du 9 septembre au 16 septembre 2015 en ce qui concerne la contestation des résultats en conformité avec l’article 172 de la Loi électorale. Or, l’article 19 de la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire dispose qu’ « (…) il existe une ou plusieurs Cours d’Appel dans chaque province et dans la Ville de Kinshasa. Le siège ordinaire et le ressort de la Cour d’Appel sont fixés par décret du Premier ministre. ». Ainsi, il apparait qu’en disposant dans sa décison du 23 juillet 2015 que les recours susmentionnés seront portés devant » la Cour d’Appel de l’ancienne province initiale » que la CENI a empiété sur les prérogatives non seulement du Premier ministre mais surtout sur celle du pouvoir législatif en étendant la compétence ratione loci ou territoriale des Cours d’appels existantes au « nouvelles provinces » violant également de la sorte la Constitution.
La CENI a semble t-il voulu combler à sa façon un vide juridique consécutif à l’installation à la hussarde par le gouvernement de la République Démocratique du Congo de nouvelles entités territoriales …
En effet, dans ses dispositions transitoires la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire ne prévoit pas qu’en attendant leur installation les compétences de la Cour d’Appel dans les nouvelles provinces sont exercées par la Cour d’Appel qui existait dans les provinces dont elles sont issues.
Par ailleurs, en ce qui concerne cette fois la compétence ratione materiae on peut également s’interroger sur le droit de la Cour d’Appel à connaître des recours contre les listes de candidatures établies par la CENI et contre les résultats provisoires de l’élection des Gouverneurs et des vice-Gouverneurs puisqu’en vertu des articles 154 et 156 de la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire dans ce cadre elle doit respecter les règles de compétence en matière administrative telles que définies par les articles 146 à 149 de l’Ordonnance-loi n° 82-020 du 31 mars 1982 portant code de l’organisation et de la compétence judiciaires. [1]
Or, ces articles ne prévoient pas la compétence pour la Cour d’appel à connaître de pareilles recours ! Un fait étonnant alors que la la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire est pourtant entrée en vigueur après la Loi électorale promulguée en 2006 et modifiée successivement en 2011 et en 2015 … Nous y reviendrons !