Jean-Jacques Wondo Omanyundu
POLITIQUE | 01-09-2017 19:45
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Coup d’État à l’aide des balais et des bâtons : possible selon autorités illégitimes de Kinshasa – JB Kongolo

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Coup d’État à l’aide des balais et des bâtons : possible selon autorités illégitimes de Kinshasa

 Par Jean-Bosco Kongolo M.

C’est le plus officiellement du monde que les « autorités » de Kinshasa avaient annoncé avoir déjoué un coup d’État dont les présumés auteurs[1], présentés à la presse, étaient des Congolais « ordinaires » (ni policiers, ni militaires ni encore moins politiciens), simples adeptes du mouvement mystico-religieux Bundu dia Kongo(BDK). Non encore jugés ou déférés devant les instances judiciaires, il leur est déjà imputé le fait gravissime d’avoir voulu perpétrer un coup d’État pour renverser l’ordre institutionnel. A titre de preuves à leur charge, ce sont des balais, des bâtons ainsi que des fétiches qui ont été présentés devant les caméras. « Trente et un putschistes présumés dont trois femmes sont apparus avec des bandeaux rouges sur la tête, comme en portent souvent les adeptes de la secte politico-religieuse ex-Bundu Dia Kongo. Quelques armes blanches, des fusils de fabrication artisanale et des fétiches ont également été présentées comme preuves à conviction. Le colonel Pierrot Mwanamputu, porte-parole de la police, a déclaré que ces personnes avaient pour but de renverser le pouvoir en place en attaquant le siège de la chaine nationale puis l’aéroport ».[2]

Wikipédia renseigne qu’ « Un coup d’État est un renversement du pouvoir par une personne investie d’une autorité, de façon illégale et souvent brutale. On le distingue d’une révolution en ce que celle-ci est populaire. Le putsch est un coup d’État réalisé par la force des armes ». Pour que pareil activité criminelle ait la chance d’aboutir, « Le secret, non seulement vis-à-vis de l’extérieur mais aussi vis-à-vis des autres comploteurs, constitue la première arme des putschistes, celle sans laquelle les meilleures préparations risquent de s’effondrer »[3]. Non seulement que cette sortie publique de BDK avait été annoncée plus d’un mois auparavant, tout le monde a pu se rendre compte, images à l’appui, que la manifestation a été encadrée par la police avant qu’elle tourne au vinaigre, uniquement à Kinshasa. Dans le contexte congolais caractérisé par la volonté affichée d’un groupe d’individus qui tentent d’exercer le pouvoir au-delà de leur mandat, tout intellectuel ou tout patriote digne de ce nom devrait se poser plusieurs questions pour comprendre, avec la raison plutôt qu’avec le cœur, ce qui lui est présenté comme informations.

Des présumés manifestants de Bundu dia Mayala avec des pancartes où on lit Congo alors que ce groupe utilise la dénomination du « Kongo » pour désigner la RDC.

1. Des évènements intrigants se succèdent    

Depuis que l’opposition a donné les signes de vouloir s’unir pour parler d’une seule voix afin d’exiger l’alternance politique, des évènements aussi sanglants que dévastateurs se succèdent et s’intensifient à travers tout le pays. Les dirigeants politiques, désormais illégitimes, tantôt se contredisent ou restent évasifs sur les tenants et les aboutissants tandis que la justice, instrumentalisée, est devenue une caisse de résonnance incapable de faire toute la lumière pour identifier les auteurs et les sanctionner conformément à la loi. De là, à se demander si le pompier n’est pas lui-même le pyromane, il n’y a qu’un pas. Parmi ces évènements sanglants, il y a lieu de citer le phénomène Kamuina Nsapu et son cortège de malheurs dévastateurs sur le Grand Kasaï, le conflit qui oppose les Pygmées aux populations bantoues (Lubakat) dans le Tanganyika, les évasions quasi programmées dans la plupart des prisons centrales du pays et dont la plus spectaculaire est celle du controversé leader/gourou de Bundu dia Kongo, M. Ne Muanda Nsemi. Tous ces évènements surgissent, curieusement, au moment où, de l’intérieur comme de l’extérieur, de fortes pressions sont exercées sur la CENI afin qu’elle publie le calendrier électoral devant permettre de désigner les animateurs légitimes des instituions du pays.  

A. Le phénomène Kamuina Nsapu et ses conséquences

Longtemps havre de paix et de tolérance entre les différentes ethnies qui le composent, le Grand Kasaï bat, aujourd’hui et en seulement quelques mois, le record de déplacés internes, en plus des dizaines de milliers de réfugiés recensés en Angola. Ce drame aux conséquences sociales et humanitaires inimaginables ne semble guère émouvoir les autorités tant politiques que judiciaires. Au plan politique, l’on s’est contenté d’écarter du gouvernement Évariste Boshab tandis qu’au gouvernorat du Kasaï-Central, Alex Kande Mupompa n’a jamais démissionné, du moins officiellement, de ses fonctions ni fait l’objet d’une motion de censure de la part de l’Assemblée provinciale. Que cache le refus d’interpellation de ces deux acteurs majeurs de la crise du Kasaï et pourquoi n’ont-ils plus eu le courage de remettre leurs pieds dans leur terroir? 

B. Conflit Pygmées-populations Luba du Katanga

Historiquement reconnus comme autochtones du bassin du fleuve Congo, les pygmées sont éparpillés dans plusieurs provinces du pays et, un peu partout où on les trouve, ce sont eux qui sont écrasés et qui se plaignent contre leurs frères bantous de vouloir les exterminer aussi bien physiquement que culturellement. Dans l’histoire récente du Congo-Kinshasa, il n’a jamais été fait état d’un sérieux conflit armé, déclenché par les Pygmées, minoritaires, et mettant en déroute des bantous, démographiquement majoritaires, plus instruits et censés mieux équipés militairement. Les quelques escarmouches signalées ça et là ne concernaient le plus souvent que les limites et l’exploitation des espaces forestiers qui constituent l’habitat naturel des Pygmées.

Pour avoir personnellement travaillé dans le ressort de Tanganyika (1989-1990) en qualité de substitut du Procureur de la République, nous nous sommes posé la question de savoir avec quels moyens et en quel nombre les Pygmées, souvent confinés loin des grandes agglomérations, ont-ils pu réussir à prendre le dessus sur les Bantous? Si les archives sont bien conservées, nous y avons traité quelques rares dossiers qui n’avaient jamais occasionné mort d’homme comme c’est le cas actuellement, à grande échelle et dans plusieurs territoires de la région. « Depuis plus d’un mois, les risques sanitaires se sont gravement accrus à Kalemie suite à l’arrivée des familles ayant fui les combats vers la ville. Plus d’un demi-million de personnes sont déplacées dans la Province du Tanganyika, dont environ la moitié au sein du Territoire de Kalemie. Une partie de ceux qui vivaient dans des campements informels de la périphérie ont fui l’insécurité de ces lieux pour se réfugier dans le centre-ville. Les familles qui n’ont pas de proches pouvant les héberger vivent temporairement dans et autour des écoles de Filtistaf, Moni, Hodary et Lubuye, dans des conditions sanitaires inacceptables, à même le sol sous des moustiquaires »[4].

Au début de ces hostilités, nous nous étions adressé à des amis, pas des moindres, originaires du coin pour chercher à savoir qu’est-ce qui, brusquement, a pu renverser les rapports de force en faveur des Pygmées. C’est celui qui n’avait pas suffisamment d’éléments qui a eu la courtoisie de nous répondre gentiment, un autre a observé carrément le silence tandis que pour le troisième, de la justice militaire, l’occasion était belle pour déverser ironiquement et orgueilleusement sur nous une inutile et discourtoise leçon de stratégie et de tactique militaires afin de nous démontrer que la réalité nous échappait.

A ce jour, ni les autorités provinciales ni les autorités centrales n’ont pu éclairer l’opinion sur la genèse de ce conflit, sur son ampleur et surtout sur les tireurs de ficelles. Fait important à signaler, c’est dans cette province qu’ont été déclarés « élus députés», Zoe Kabila et Janet Kabila (frère et sœur de M. Joseph Kabila), respectivement pour les territoires de Manono et de Kalemie. Se la coulant douce à Kinshasa, ces deux députés n’ont jamais usé de leur position à l’Assemblée nationale et dans le régime pour faire cesser ces troubles dans « leurs circonscriptions ».

Manifestation des présumés adeptes de Bundu dia Mayala où on peut lire Congo à la place de Kongo. Une preuve flagrante de la machination du pouvoir de Kabila

C. Les évasions massives et spectaculaires des prisonniers

Il n’est pas rare d’apprendre que dans tel pays, il y a eu évasion des détenus. Quand c’est le cas, des enquêtes sérieuses sont menées pour établir très rapidement les responsabilités, récupérer les détenus évadés, sanctionner pénalement et/ou administrativement les fautifs et prendre toutes les dispositions qui s’imposent pour sécuriser les lieux et prévenir la répétition de tels actes. En quelques semaines seulement, le Congo-Kinshasa s’est distingué par le record aussi bien des prisons concernées à travers le pays que du nombre impressionnant de prisonniers évadés dans une seule prison : plus de 4600 évadés[5], rien que pour la seule prison de Makala à Kinshasa, considérée pourtant comme la plus sécurisée du pays. 

Ce qui a autant choqué que déboussolé l’opinion publique, c’est le mensonge d’État distillé de façon hormonale par les autorités de Kinshasa sur le nombre d’évadés, le nombre de morts et le commanditaire de l’opération. «Ni le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, pourtant amoureux des chiffres, ni le ministre de la Communication, l’incontournable Lambert Mende, ne s’est jamais attardé sur les chiffres de cette évasion. Le 17 mai dans le courant de la journée, alors que les témoignages abondaient pour signaler l’importance de cette évasion de masse, le ministre Mende reconnaîtra « 51 » personnes dans la nature. Le lendemain, les forces de l’ordre annonceront avoir mis la main sur plus de 140 détenus en cavale. Une incongruité de plus. »[6]

Aujourd’hui, soit trois mois après, personne n’est en mesure de donner le chiffre exact d’évadés volatilisés dans la nature, parmi lesquels des criminels de grand chemin. Tout porte à croire que ces évasions, étonnement similaires par leur mode opératoire, ont été commanditées par un seul et même auteur moral dans le dessein inavoué de créer la panique et la psychose dans la population. Le caractère ambigu du personnage Ne Muanda Nsemi, principal bénéficiaire de l’évasion massive de Makala, pourrait permettre de lever un voile sur ce qui se passe réellement.

2. Ne Muanda Nsemi : gourou, opposant politique ou complice du pouvoir?  

Pour ceux qui n’ont découvert ce personnage que tout récemment, il s’agit d’un gourou à la tête d’un mouvement mystico-religieux proche du kimbanguisme. Pour recruter ses membres, Ne Muanda Nsemi fait la promotion de l’identité et de la culture ancestrales, chères au peuple Kongo. « Les Bakongo n’ont jamais digéré la perte de prestige qu’avait leur royaume sous le règne du roi Mvuemba Alphonso Ier (1507-1541)- fils du roi Nzinga Nkuvu-occasionnée par la domination et la colonisation européenne ». Ne Muanda Nsemi, qui dit avoir reçu un appel sacré en 1969, du temps où il fut étudiant à l’Université Lovanium, croit être investi d’une mission consistant à sauver son peuple sur les plans spirituel, politique et économique. Pour les fidèles de Bundu dia Kongo, «l’objectif poursuivi se résume en la réhabilitation de la sagesse africaine, afin d’y puiser la force et le modèle de leur organisation, de leur développement spirituel et matériel. Pour cela, il faut regarder avec les yeux de la tradition négro-africaine, et non pas avec les yeux de la philosophie occidentale qui sépare religion, science et politique. Pour les adeptes de Bundu dia Kongo, il ya Akongo, l’être suprême, le Dieu créateur de l’univers tandis que le Bukongo, c’est la sagesse divine, la sagesse kongo d’origine divine, la culture kongo »[7].

Sur le plan politique, les revendications séparatistes et indépendantistes valurent à Ne Muanda  Nsemi et à ses adeptes un procès retentissant devant la défunte Cour de sûreté de l’État pour activités subversives, sous le règne de Laurent-Désiré Kabila. À cause des violences dont sont souvent accusés ses membres, particulièrement à l’égard de la police et des symboles de l’État, le mouvement Bundu dia Kongo fut officiellement interdit par le gouvernement en 2008. « Le Conseil des ministres a décidé le retrait de l’agrément accordé par le ministère des Affaires sociales à l’ASBL BDK » soulignait, samedi, le compte rendu du conseil qui s’est tenu, vendredi à Matadi, chef-lieu de la province du Bas-Congo, où la secte est très implantée. Le 15 mars déjà, le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe – un proche du président Joseph Kabila – avait adressé une « mise en garde sévère » au député Ne Muanda Nsemi, chef spirituel de BDK, accusé de réclamer « l’autodétermination du peuple Kongo » et d’encourager les troubles. »[8]

Ne se laissant pas faire et tenant à faire passer ses idées à l’échelle nationale, Ne Muanda Nsemi effectua la mutation de son association en parti politique sans toutefois se définir réellement dans l’opposition ni adhérer clairement à la majorité présidentielle. En 2013, il devint un allié précieux de la MP en participant activement aux controversées concertations nationales et en proposant, contre toute attente, une transition de trois ans sous la direction de Joseph Kabila en cas d’expiration de son mandat présidentiel. En échange de ce soutien dont le régime avait besoin, il aurait été promis à Ne Muanda Nsemi le poste de Premier Ministre, qui ne lui a jamais été octroyé et pour lequel il avait réclamé la compensation. « Sa proposition d’une transition de trois ans pour préparer des élections crédibles en RDC, avec pour conséquence la prolongation du mandat de Joseph Kabila, a été perçue comme une trahison par ses nombreux adeptes qui ne se reconnaissent plus en lui. Sa dernière volte-face ne fait que confirmer le caractère versatile de ce pseudo-opposant en rupture de ban avec sa base. »[9]

En effet, comment faire confiance à un tel homme qui, après avoir fait tuer de centaines d’adeptes dans sa province en 2008, devient propagandiste du glissement en faveur de celui qui est considéré comme le donneur d’ordres d’autant plus qu’aucun exécutant n’a jamais été poursuivi en justice pour ces massacres?[10]. C’est ce même Ne Muanda Nsemi que tout le monde a vu sortir calmement de la prison en mai dernier, escorté et acclamé par des foules nombreuses jusqu’à une destination que la police et les services de renseignements ne peuvent prétendre ignorer.

3. Ne Muanda Nsemi a-t-il voulu (pouvait-il) réellement faire un coup d’État? 

Il s’agit ici d’une question à la fois de stratégie et de logistique et dont la réponse permet à l’opinion, souvent naïve, de juger du sérieux ou non de Ne Muanda Nsemi ainsi que de sa comédie ou de la collusion entre lui et le pouvoir.

A mesure que les États se modernisent, ils se démocratisent et par conséquent les coups d’États se raréfient à travers le monde et en Afrique. Là où il y en a eu, les raisons invoquées ont été souvent les mêmes : absence de démocratie, autocratie, gestion chaotique des ressources naturelles suivie de l’embourgeoisement de la classe dirigeante au détriment du souverain primaire, etc. Dans le contexte du Congo-Kinshasa, la question n’est pas de savoir si les conditions d’un coup d’État sont réunies ou pas mais de dire si Muanda Nsemi avait réellement la volonté de faire un coup d’État? Pour l’histoire, le 24 novembre 1965, Mobutu avait réussi son coup d’État sans effusion de sang et surtout sans l’annoncer préalablement à Kasa-Vubu. C’est différent du putsch qui avait porté Laurent-Désiré Kabila au pouvoir en 1997, à l’issue d’une guerre d’agression concoctée par une coalition des puissances extérieures.

En janvier 2001, Joseph Kabila a été installé au pouvoir grâce à un coup d’État dont les concepteurs et les exécutants n’ont jamais révélé au public leur identité et leur projet. Qui donc, au Congo et ailleurs, peut prendre au sérieux Ne Muanda Nsemi lorsque, un mois et demi auparavant, il annonce son projet de chasser Kabila du pouvoir? « L’attaque de ce lundi est-elle pour autant une surprise ? Non si l’on se réfère à la dernière vidéo mise en ligne par Muanda Nsemi sur You Tube un mois et demi après sa spectaculaire évasion de la prison de Makala. Dans son message, le gourou du Bundu dia Kongo annonçait clairement la couleur en défiant le président Joseph Kabila dont il conteste la nationalité congolaise. Pour Muanda Nsemi, Joseph Kabila et les Rwandais « colonisent la RDC » et il appelait les Congolais à chasser « Joseph Kabila et ses soutiens rwandais » du pouvoir « avant le 7 août »[11]. Cet ultimatum rappelle ceux du général Faustin Munene ou d’Honoré Ngbanda, qui ont fini par se faire discréditer auprès des Congolais tant du pays que de la diaspora. Sans se poser des questions sur les moyens dont pouvait disposer Muanda Nsemi pour réaliser son projet, plusieurs organes de presse se sont laissé embarquer par le son de cloche du pouvoir parlant d’une tentative de putsch. 

Sans scrupule, les hauts responsables des services de renseignement, les têtes couronnées de la police et quelques membres du gouvernement se sont affichés devant les caméras de la presse pour présenter quelques dizaines de malheureux « auteurs » du coup d’État manqué du 7 août 2017. « Les auteurs présumés des violences étaient pieds nus, assis sur des chaises en plastique, sous la surveillance de policiers en uniforme, certains avec un béret ou un bandeau rouge autour de la tête. Deux valises de fétiches, couteaux et bâtons étaient déposées sur le sol devant eux. »[12] Voilà toute la logistique dont disposaient les adeptes de Bundu dia Kongo pour «  renverser l’ordre institutionnel », selon les autorités illégitimes de Kinshasa. Toute honte bue, « Le colonel Pierrot Mwanamputu, porte-parole de la police a déclaré que ces personnes avaient pour but de renverser le pouvoir en place en attaquant le siège de la chaine nationale en plus de l’aéroport. »[13] Mais comment comprendre qu’au même moment, à Matadi et à Moanda, les autres adeptes de Bundu dia Kongo qui marchaient pour la « même cause », ont été encadrés par la police? Faut-il en rire ou en pleurer? Puisque qu’aucun vrai coup d’État n’est jamais annoncé à l’avance, avec précision de date, et ne peut être réalisé au moyen des fétiches, des bâtons, des balais et autres armes blanches contre un pouvoir surarmé, l’explication logique est à trouver ailleurs.

Les observateurs attentifs, qui connaissent bien le Congo et ses acteurs politiques, constatent aisément que tous ces évènements, aussi intrigants que déstabilisateurs, surviennent successivement à travers tout le pays sans que les services de renseignement ne les préviennent ni que la justice n’en élucide le mobile et parvienne à mettre la main sur les vrais commanditaires pour les sanctionner. Du côté des autorités politiques, désormais illégitimes, les montages se font de plus en plus ridicules au fur et en mesure que la paranoïa les force à tirer sur tout ce qui bouge et qui les empêche de consommer tranquillement le « glissement », devenu lui-même amer et encombrant. C’est dans cet ordre d’idées qu’un officier supérieur de l’armée, visiblement mal formé, s’est permis de violer les installations de la Monusco à Kananga, à la poursuite du journaliste Diyi Tshitenge qui voulait présenter au public le Manifeste signé dernièrement à Paris pour une transition citoyenne. « Un groupe de soldats, sous les ordres du général Marcellin Assumani, commandant des opérations dans la région des Kasaï, a forcé l’entrée de la base de la Monusco au prétexte de poursuivre un journaliste venu s’y réfugier. Les Nations unies sont préoccupées par ce très grave incident, d’autant plus que celui-ci s’est déroulé sous le commandement direct d’un officier supérieur[14]

Conclusion

Ce qui se passe actuellement au Congo-Kinshasa ressemble fort bien à une scène théâtrale où, selon la nature (comique, dramatique ou tragique) de la pièce à jouer ainsi que du talent et de la disponibilité des acteurs, le metteur en scène attribue discrétionnairement des rôles. Au sein du ballet national congolais, ces acteurs (Samy Badibanga, Bruno Tshibala, Tharcisse Loseke, Joseph Olenghankoy, Joseph Kapika, Emery Okundji, Vital Kamerhe, Thomas Luhaka, José Makila, Lumeya, Lisanga Bonganga, André Atundu, Henri Mova Sakanyi, Aubin Minaku, Jean Lucien Bussa, Justin Bitakwira, Steve Mbikayi, Tshibangu Kalala, Fidel Babala, Germain Kambinga, Antoine Gizenga…) rivalisent d’ardeur pour mériter les regards et les faveurs du chef de la troupe, qui ne demande mieux que de demeurer le plus longtemps possible la star de la scène.

Tous les moyens étant autorisés, ces acteurs n’hésitent pas de se trahir les uns les autres, de violer l’acte fondateur de la troupe (la Constitution), certains n’hésitant pas de faire couler le sang de leurs compatriotes spectateurs, pourvu qu’ils accèdent au podium et y conservent les rôles reçus. Après les tragédies du Nord et du Sud-Kivu, de l’Ituri et du Haut Katanga, du Tanganyika et tout récemment du grand Kasaï, c’est Kinshasa qui devait présenter aux spectateurs du monde entier une comédie consistant à perpétrer un coup d’État au moyen des balais, des couteaux, des bâtons et des fétiches pour renverser des « autorités » illégitimes et surarmées. Cherchant à tout prix un prétexte pour ne pas organiser les élections, ces autorités se sont elles-mêmes disqualifiées en se rebellant contre l’ordre établi par la Constitution.

La pièce dont l’acteur principal était Ne Muanda Nsemi étant de mauvais goût, il revient à l’ensemble du peuple, désabusé, de comprendre désormais toutes les intrigues précédentes et de se mettre debout pour mettre hors-d’état de nuire tous ces imposteurs encombrants. L’article 64 de la Constitution a été expressément prévu pour ça et l’heure a sonné de l’appliquer, si le peuple congolais refuse de demeurer dans la servitude : « Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution.

Toute tentative de renversement du régime constitutionnel constitue une infraction prescriptible contre la nation et l’État. Elle est punie conformément à la loi. »

Jean-Bosco Kongolo M.

Juriste &Criminologue – Administrateur adjoint de DESC

Références

[1] Au Congo, la présomption d’innocence n’existe pas et ce sont les autorités politiques qui qualifient les faits à la place du pouvoir judiciaire, qui n’a qu’à se conformer.

[2] Ivoirematin.com, 10 août 2017, In http://www.ivoirematin.com/news/Afrique/rdc-quot-tentative-de-coup-d-etat-dejoue_n_28162.html.

[3] Wikipédia, consulté le 14 août 2017 à 13h30’, In https://fr.wikipedia.org/wiki/Coup_d%27%C3%89tat.

[4] 7sur7.cd, 17 août 2017, In https://7sur7.cd/new/2017/08/rdc-tanganyika-conflit-interethnique-pygmees-bantu-msf-vole-au-secours-de-210-000-deplaces/.

[5] RFI, 18 mai 2017, In http://fr.allafrica.com/stories/201705180371.html

[6] La Libre Belgique, 7 juin 2017, In https://afrique.lalibre.be/4514/rdc-evasion-de-makala-les-chiffres/

[7] Afrikblog.com, In http://mbutamassee.afrikblog.com/archives/2011/08/13/21784648.html.

[8] Afrikarabia, 26 mai 2008, In http://afrikarabia2.blogs.courrierinternational.com/archive/2008/03/26/rdc-kinshasa-interdit-le-mouvement-politico-religieux-bundu.html.

[9] Adiac-Congo.com, 15 septembre. 2015, In http://adiac-congo.com/content/bundu-dia-kongo-ne-muanda-nsemi-se-dit-trahi-par-le-pouvoir-kabiliste-38029.

[10] C’est à cause de ce dossier que le défenseur des droits de l’homme Floribert Chebeya a payé de sa vie alors qu’il réunissait des preuves pour saisir la CPI.

[11] Afrikarabia, 7 août 2017, In http://afrikarabia.com/wordpress/rdc-a-qui-profite-les-attaques-a-kinshasa/

[12] VOA, 9 août 2017, In https://www.voaafrique.com/a/des-adeptes-de-bdk-accuses-d-avoir-tente-de-renverser-l-ordre-institutionnel-en-place-a-kinshasa/3979017.html.

[13] WIHIA, 29 août 2017, In http://whatishappeninginafrica.com/rd-congo-tentative-de-coup-detat-orchestre-secte-ex-bundu-dia-kongo-dejoue/.

[14] Mediacongo.net, 20 août 2017, In https://www.mediacongo.net/article-actualite-29924.html.

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