Analyse comparative des performances économiques(2015) de la République démocratique du Congo par rapport à Ses principaux voisins et partenaires économiques
Par Julien Loposso
Cet article est le premier d’une série d’analyses ayant pour objet, la comparaison des performances macro-économiques de la République Démocratique du Congo (RDC) par rapport celles de ses principaux voisins et partenaires. Pour ce premier numéro, nous comparons les produits Intérieurs bruts (PIB) par habitant des différents voisins de la RDC avec celui de la RDC. Dans les numéros suivants, nous comparerons d’autres indicateurs à l’instar du taux de croissance économique, de l’espérance de vie, du taux de mortalité infantile, du taux d’inflation, des indicateurs des finances publiques, des indicateurs de productivité, des indicateurs de démographie et dans la mesure où la disponibilité des données le permette, des indicateurs de l’emploi (ou du chômage).
Le Produit Intérieur brut par habitant
1. Introduction
Le PIB par habitant est un des principaux indicateurs utilisés comme mesure du bien-être des différentes économies. Même si l’indicateur est souvent critiqué comme étant une mesure incomplète du bien-être économique, il n’en reste pas moins un indicateur essentiel de la performance économique d’un pays.
Sur le plan international, quel que soit le concept utilisé (PIB par habitant basé sur la parité des pouvoirs d’achat (PPA) ou PIB par habitant en dollars courants), la République Démocratique du Congo se classe parmi les derniers pays au monde.
En 2015, selon l’évaluation par la PPA[1], et avec un niveau de PIB par habitant de 770 US$, le pays occupait la 189ème place au monde sur les 191 pays considérés[2]. Le classement selon l’approche de calcul en dollars courants, place la RDC à la 182ème position sur 191 pays, avec un niveau de PIB par habitant de 476 US$. La méthode selon la PPA étant celle qui actuellement est privilégiée par toutes les institutions internationales, c’est elle que nous utilisons le plus dans la suite de cet article.
2. Comparaison avec les principaux voisins
Le graphique ci-dessous présente une comparaison du PIB par habitant de la RDC avec ceux de ses voisins direct et du Gabon.
Sur les onze pays considérés, la RDC se classe en avant dernière position et, sur ses neuf voisins directs, seule la RCA se classe après elle, en dernière position.
3. Importance relative des différents PIB par habitant par rapport à celui de la RDC
Une autre manière d’appréhender les chiffres représentés dans le graphique ci-dessus consiste à les présenter en rapport au PIB par habitant de la RDC. Nous obtenons par ce faire le graphique ci-dessous.
Ainsi, le PIB par habitant du Gabon est de 24 fois supérieur à celui de la RDC tandis que ceux de l’Angola et du Congo-Brazza sont respectivement supérieurs de 9,5 et 8,7 fois à celui de la RDC. Des écarts aussi importants en termes de bien-être économique sont susceptibles d’expliquer en partie les mouvements de migration constatés depuis plusieurs années de la RDC vers ces dits pays.
Parmi les voisins de l’Est de la RDC, le PIB par habitant du Rwanda est de 2,3 fois supérieur à celui de la RDC tandis que ceux de la Tanzanie, de l’Ouganda et du Burundi sont respectivement de 3,8, 2,6 et 1,1 fois supérieurs à celui de la RDC. D’autre part le PIB par habitant de la RCA est de 0,8 fois inférieur à celui de la RDC, une autre manière d’exprimer cela est de considérer que cet indicateur pour la RDC est de 1,22 fois supérieur à celui de la RCA.
4. Relever le niveau du PIB par habitant congolais
L’amélioration du niveau du bien-être de la population congolaise passe notamment par la hausse continuelle du niveau du PIB par habitant. Ainsi, toute politique travaillant dans ce sens devra veiller à instaurer les conditions nécessaires assurant la progression de cet important indicateur. A cet effet, les responsables de la politique économique devront veiller à générer dans le futur, des taux de croissance économique significativement supérieurs aux taux de croissance démographique.
4.1 Exemple du modèle chinois
Le cas de la Chine est à cet égard très édifiant. En 1980, alors que la RDC affichait un niveau de PIB par habitant (en dollars courants) de 2.389 US$, celui de la Chine n’était que 307 US$. En 2015, comme nous l’avons vu ci-dessus, le même indicateur n’était plus que 476 US$ en RDC alors qu’en Chine, après avoir connu une croissance spectaculaire sur plusieurs années, il s’élevait à 7.990 US$. Evalué en parité des pouvoirs d’achat ces indicateurs s’élevaient respectivement en 1980 à 307 US$ pour la Chine contre 683 US$ en RDC. En 2015, le PIB par habitant chinois (en PPA) atteignait désormais 14.107 US$ contre 770 US$ en RDC. Ainsi entre 1980 et 2015, cet indicateur a été multiplié en Chine par 46, soit une progression spectaculaire de 4499%.
En RDC, le PIB par habitant a connu sur la période considérée (1980-2015) une évolution en trois phases (voir graphique ci-dessous). Une phase ascendante entre 1980 et 1988 où l’indicateur part d’un niveau de 683 US$ en 1980 pour atteindre le pic de 854 US$ en 1988. Ensuite vient la phase de déclin entre 1989 et 2001, année au cours de laquelle l’indicateur atteint son plus bas niveau. La troisième phase qui est ascendante commence à partir de 2002 et va jusqu’en 2015.
La hausse spectaculaire du PIB par habitant chinois sur une période de trente-cinq années s’explique essentiellement par la mise en place d’une politique économique qui a su générer une très forte croissance sur trois décennies, tout en stabilisant la démographie, notamment grâce à leur politique de l’enfant unique[3]. Le graphique suivant présente une comparaison des taux de croissance économique et démographique chinois. Sur toute la période, le taux de croissance économique demeure largement au-dessus du taux de croissance démographique. Chaque année, l’écart entre ces deux indicateurs mesure le gain en bien-être de la population chinoise et, cumulée sur plusieurs années, cela permet d’expliquer la hausse spectaculaire du PIB par habitant chinois.
4.2 Que faire en RDC ?
Comme déjà signalé ci-haut, l’amélioration significative du niveau de vie des congolais, et même le rattrapage du niveau de vie des pays voisins nécessite la mise en place d’une politique économique stimulant une forte croissance économique sur plusieurs années et même sur plusieurs décennies. Toutefois, il faudra veiller à ce que cette croissance demeure supérieure à la croissance démographique. Les différentes politiques de stimulation de la dite croissance seront analysées dans un prochain numéro où nous analyserons les performances de la RDC en terme de taux de croissance.
Exclusivité DESC
Julien LOPOSSO Boyelo
Analyste-économiste
Licencié en économie (ULG-Belgique)
Master of Science in Economics (KUL-Belgique)
Master en gestion des risques financiers (FUSL- Belgique)
Julien LOPOSSO Boyelo est Attaché – Economiste au Service Public Fédéral Economie (Bel)
Direction générale des Analyses économiques et de l’Economie internationale
Compétitivité
Références
[1]Cette approche de calcul du PIB par habitant selon la PPA est actuellement la plus utilisée dans les comparaisons internationales par rapport à l’approche en dollars courant vu qu’elle offre l’avantage d’une part de corriger les différents PIB des variations des taux de change par rapport à leurs monnaies respectives et d’autre part de tenir compte des biens non échangeables sur les marchés internationaux (comme une course de taxi, une coupe de cheveux, …).
[2] Source : Fonds Monétaire International (FMI).
[3] Nous ne voulons pas entrer dans un débat sociologique, éthique ou moral sur cette politique, ni porter un jugement de valeur sur son bien-fondé, notre intention se limite à l’analyse des mécanismes expliquant la hausse de l’indicateur et par conséquent, l’amélioration du niveau de vie du chinois moyen.
One Comment “Analyse comparative des performances économiques de la RDC (2015) par rapport à ses principaux voisins et partenaires – Julien Loposso”
GHOST
says:LA QUESTION Á L´AUTEUR….
Vous avez mis en évidence le rapport entre la croissance démographique et l´incroyable évolution économique en Chine. Ne trouvez-vous pas qu´au Congo, la « maîtrise » de la croissance démographique peut-être aussi une option en prendre en compte pour le futur?