Jean-Jacques Wondo Omanyundu
POLITIQUE | 17-10-2016 14:05
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Alerte DESC : Majorité présidentielle – CENI – Cour Constitutionnelle : le triangle de la haute trahison

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Alerte DESC : Majorité présidentielle – CENI – Cour Constitutionnelle : le triangle de la haute trahison

Par Jean-Bosco Kongolo M.

Après avoir offert à Joseph Kabila un arrêt de la honte sur lequel se fonde toutes les actions de sa famille politique pour justifier leur maintien au pouvoir, la Cour Constitutionnelle s’apprête à poser un dernier acte d’accomplissement du complot contre la Constitution et la nation congolaise.

RDC_Cour Constitutionnelle

Pour mémoire, c’est le 08 septembre 2015 que la Haute Cour passait son premier test d’indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif et de loyauté vis-à-vis du peuple et de la Constitution. A la déception générale, les membres de cette juridiction avaient choisi leur camp en recevant la requête de la Commission électorale qui sollicitait notamment son « avis sur la poursuite du processus électoral tel que planifié par la décision de la CENI 001/CENI/ BUR/15 du 12 février 2015 portant publication du calendrier des élections provinciales, urbaines, municipales et locales de 2015 et des élections présidentielle et législatives relativement à l’organisation, dans le délai, des élections provinciales prévues le 25 octobre 2016. » Allant au-delà de ce qui lui était demandé[1], la Cour avait ainsi permis au Gouvernement et à la MP de procéder au démembrement non programmé et non budgétisé des provinces et de la tenue des élections anticonstitutionnelles des Gouverneurs et Vice-gouverneurs par des assemblées provinciales juridiquement inexistantes. C’était le premier acte menant vers le glissement.

Sur requête de 250 députés de la même famille politique, la Haute Cour fut de nouveau sollicitée en avril 2016 pour obtenir son interprétation de l’article 70 de la Constitution[2] afin de régler le sort du Président sortant en cas de la non tenue de l’élection présidentielle avant la fin de son mandat prévue pour décembre de l’année en cours. Dans son arrêt rendu le 11 mai 2016, la Haute Cour, toujours fidèle au Raïs et incapable d’affirmer son indépendance[3], déclara : « Dit que pour consacrer le principe de la continuité de l’État affirmé par l’article 69 de la Constitution, l’article 70 alinéa 2 de la Constitution permet au Président de la République actuellement en exercice de rester en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau Président élu. » Ce fut le deuxième acte de glissement.

C’est fort de cet arrêt et rassuré du glissement judiciairement obtenu que Joseph Kabila et sa famille politique entreprirent d’accélérer le débauchage des opposants en vue du dialogue annoncé depuis le 28 novembre 2015. Ce dialogue, convoqué officiellement par ordonnance présidentielle du 30 novembre 2016, n’a pu démarrer ses travaux que le 1er septembre 2016 à cause, d’une part, de la maigre moisson obtenue dans le débauchage et, d’autre part, à cause de la prudence observée par la vraie opposition qui n’y voit qu’un piège en plus tendant à violer collectivement la Constitution grâce au prétendu gouvernement d’union nationale attendu du dialogue national.

Par crainte d’absence de légitimité des résolutions de ce dialogue (théâtre) national et par le truchement de la même CENI, qui n’est en réalité qu’un organe technique de la MP en matière électorale, la Cour Constitutionnelle a été de nouveau sollicitée pour « obtenir d’elle le report de l’élection présidentielle. »Ce sera le troisième et dernier acte de glissement.

Ayant volontairement manqué à son devoir d’organiser cette élection dans les délais prescrits par l’article 73 de la Constitution[4], cette requête de la CENI est une fuite en avant qui anticipe la vacance au pouvoir le 19 décembre 2016, laquelle doit d’abord être déclarée par la Cour Constitutionnelle saisie par le Gouvernement conformément aux dispositions de l’article 76 de la Constitution. En effet, cet article dispose : « La vacance de la présidence de la République est déclarée par la Cour constitutionnelle saisie par le Gouvernement.

Le Président de la République par intérim veille à l’organisation de l’élection du nouveau Président de la République dans les conditions et les délais prévus par la Constitution.

En cas de vacance ou lorsque l’empêchement est déclaré définitif par la Cour

constitutionnelle, l’élection du nouveau Président de la République a lieu, sur convocation de la Commission électorale nationale indépendante, soixante jours au moins et quatre-vingt-dix jours au plus, après l’ouverture de la vacance ou de la déclaration du caractère définitif de l’empêchement.

En cas de force majeure, ce délai peut être prolongé à cent vingt jours au plus, par la Cour constitutionnelle saisie par la Commission électorale nationale indépendante.

Le Président élu commence un nouveau mandat. »

Si donc les membres de la Cour Constitutionnelle sont sérieux et tiennent à se racheter cette fois, ce qui nous semble fort peu probable, ils devront tout simplement débouter la CENI pour avoir provoqué sciemment ce report ou, tout au moins, ne lui accorderont que les cent-vingt jours prévus par la Constitution à dater du 20 décembre 2016. Malheureusement, les membres de cette Cour ont déjà vendu leurs corps, leurs âmes et leur science à l’autorité morale de la MP et s’apprêtent plutôt à réaffirmer leur jurisprudence du glissement contenu dans les deux arrêts antérieurs.

C’est ce qui explique les ridicules et peu honorables ajournements de leur arrêt, sous prétexte, selon le Premier Président de la Cour, que celle-ci ne parvient pas à atteindre le quorum de ses neufs juges pourtant toujours présents à Kinshasa. «Ces reports successifs sont étroitement liés aux travaux du dialogue de la Cité de l’Union Africaine. En réalité, les hauts magistrats sont embrassés pour sauver la MP dans son passepasse juridique. Les négociateurs de la famille politique du Chef de l’État souhaiteraient que la Cour constitutionnelle se prononce sur la durée du report des élections afin que cela soit inscrit dans l’accord politique qui n’attend plus que d’être signé»[5] Cet arrêt ne sera donc que la consolidation du triangle de la haute trahison : MP – CENI – Cour Constitutionnelle.

Conclusion

Au peuple, pleinement informé de se qui se trame contre lui, de bien surveiller ceux qui, tout le temps ont prétendu parler en son nom et qui ne cessent d’affirmer paradoxalement le respect de la Constitution. Ils ne sont pas différents de ceux que Jésus-Christ qualifiait de « Pharisiens », lesquels n’avaient dans leurs bouches que le nom du Seigneur alors que dans leurs actes, ils faisaient tout le contraire. Heureusement que ce dialogue théâtre national a permis d’identifier les loups que la MP avait longtemps introduit dans la case de l’opposition pour y dévorer la démocratie et l’État de droit. Le moment venu, et ce moment viendra tôt ou tard, le peuple saura judicieusement faire le tri.

Jean-Bosco Kongolo M.

Juriste et Criminologue / Coordonnateur Adjoint de DESC

Jean-Bosco Kongolo est le Coordinateur adjoint de DESC, chargé des aspects juridiques et institutionnels. Juriste et criminologue de formation, M. Kongolo a été magistrat de cour d’Appel en RDC avant de démissionner volontairement, refusant de cautionner la corruption et les anti-valeurs qui rongent cette institution censée incarner l’Etat de droit en RDC.

Références

[1] JB Kongolo, 2015. Cour constitutionnelle ou caution de violation de la Constitution?, In http://afridesk.org/fr/cour-constitutionnelle-ou-caution-de-violation-de-la-constitution-jean-bosco-kongolo/.

[2] JB Kongolo, 2015.Passation du pouvoir en RDC : l’article 70 de la Constitution ne prête à aucune confusion, In https://afridesk.org/fr/passation-de-pouvoir-en-rdc-larticle-70-de-la-constitution-ne-prete-a-aucune-confusion-jb-kongolo/.

[3] Et pourtant la justice est rendue au nom du peuple, conformément aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article 149 de la Constitution : « La justice est rendue sur l’ensemble du territoire national au nom du peuple. » 

[4] « Le scrutin pour l’élection du Président de la République est convoqué par la Commission électorale nationale indépendante, quatre-vingt dix jours avant l’expiration du mandat du Président en exercice. »

[5] Le Potentiel, 15 octobre 2016, In https://www.lepotentielonline.com/index.php?option=com_content&view=article&id=15500:dialogue-et-accord-politique-la-cour-constitutionnelle-piegee&catid=85&Itemid=472.

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2 Comments on “Alerte DESC : Majorité présidentielle – CENI – Cour Constitutionnelle : le triangle de la haute trahison”

  • Jackson

    says:

    Toujours des analyses mures et réfléchies… Merci. Mais le silence suspect des opposants dits radicaux sur les accords qu’ils auraient signés à Ibiza avec la MP et qui les auraient(accords) amené à accepter le dialogue et puis le refuser en suite, ne nous rassure pas non plus de leur loyauté en vers le peuple. Tout ne que question d’intérêt, pour le moment la classe politique congolaise(majorité comme oppositions) a prouvé son insuffisance, sa trahison, son mépris envers le peuple, il appartient aux jeunes de prendre les choses en main et créer une nouvelle classe politique, celle des martyrs de la barbarie de leurs ainés.

    • DeKongo

      says:

      Ce que la MP présente comme accord avec l’UDPS n’est qu’une vulgaire feuille de route sur les négociations à venir! Tel que nous connaissons les us et mœurs de la MP ils auraient eu un malin plaisir à publier cet accord s’il existait! Que la MP publie ce fameux accord dont a parlé M.Kodjo lors de l’ouverture du dialogue de l’OUA! Nous savons que à la MP, ce sont des aventuriers qui s’interdisent rien, même à utiliser des méthodes peu orthodoxes pour obtenir ce qu’ils veulent. Mais que fait Kodjo dans une affirmation si grave! Je ne comprend pas comment l’UDPS ne l’a pas poursuivi pour diffamation!

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