Jean-Jacques Wondo Omanyundu
DÉFENSE & SÉCURITÉ GLOBALE | 13-04-2016 17:30
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Les confidences de DESC : Kabila a failli être atteint par un tir maladroit à Kingakati ?

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

Kabila a failli être victime d’un tir maladroit d’un

de ses gardes du corps dans sa ferme à Kingakati ?

DESC a reçu plusieurs informations faisant état d’un attentat manqué contre le président Joseph Kabila, attribué aux éléments de la Garde républicaine (GR) le jeudi 07 avril 2016 vers 17 heures.

Joseph-Kabila-Kabange-et-sa-GR-

Après vérification, auprès de sources militaires de la GR et de l’état-major général des FARDC, il semble qu’il n’y a pas eu de tentative d’assassinat du Président. Selon ces sources, c’est juste que le jeudi 7 avril en fin d’après-midi, il y a eu un jeune soldat de la GR dénommé Mukalayi du 123ème bataillon sécurité/RSH[1]/GR, qui était en service dans l’un de nombreux postes de garde de la ferme présidentielle de Kingakati, a par maladresse actionné son fusil mitrailleur de type PKM de 7,62 mm au moment où le président Kabila inspectait la propriété, notamment le jardin avec son scooter. La proximité du président avec ce tir « accidentel » a créé une panique en faisant croire qu’il s’agissait d’un attentat.

Mais après des investigations poussées, les services de sécurité présidentielle et de renseignement de la Garde républicaine, ont conclu à un incident sans gravité et non intentionnel dû à la maladresse du jeune soldat. Le malheureux soldat a été copieusement admonesté en présence de son commandant de bataillon (123ème) du Régiment sécurité & honneur (RSH), l’unité en charge de la garde rapprochée de Kabila, le lieutenant-colonel Fidèle Ngoyi Mumba. Le soldat a subi un interrogatoire très musclé par les éléments des renseignements militaires (ex-Démiap) de la GR s’il s’agissait d’une tentative d’attentat au Chef de l’Etat avec complices. L’audition a abouti à la conclusion qu’il s’agissait juste d’un acte non intentionnel et isolé par défaut de prévoyance. Le soldat Mukalayi a donc été relaxé par la suite et a rejoint son poste.

Le régime minimise-t-il les incidents pour rassurer sur son invulnérabilité?

Cette hypothèse n’est pas à écarter d’emblée. En effet, depuis sa réélection frauduleuse en 2011, le cercle présidentiel tente de passer sous silence les différentes menaces portées à l’encontre du président congolais. Question de montrer une certaine sérénité sécuritaire dans le but de dissuader des personnes mal intentionnées.

En effet, rappelons-nous de la réapparition publique de Joseph Kabila en 2012, après les élections, dont les rumeurs ni confirmées ni infirmées signalaient qu’il était victime d’un tir manqué à l’épaule ou au bras.

Nous noterons également la menace des officiers de la GR en juillet-août 2014 de démettre Kabila s’il ne réhabilitait pas John Numbi[2]. Cette menace prise au sérieux par la maison militaire du président Kabila, a été gérée en toute discrétion pour éviter de produire un effet tache d’huile au sein des autres unités de l’armée mécontentes de leur sort. L’entourage militaire de Kabila lui avait proposé d’éloigner les militaires récalcitrants, en les envoyant principalement en formation en Alexandrie en Égypte[3].

Il y a eu aussi cette attaque manquée de juillet 2015 du convoi de Kabila, après sa participation au défilé du 30 Juin 2015 à Matadi. Cette attaque s’est déroulée pendant que des personnes non identifiées ont jeté des tracts dans différentes casernes militaires de la capitale: au camp Kokolo (Siège de la Force terrestre), au camp Ndolo (siège de la Force aérienne), à la base navale à Kingabwa (à Kinshasa) et au camp Badiadingi à Mont-Ngafula. L’entourage présidentiel a également voulu étouffer cette affaire pour la traiter en toute discrétion.

En septembre 2015, une compagnie d’environ 200 à 250 militaires de la GR a fait défection du camp militaire de Kimbembe[4]. Les déserteurs, conduits par le lieutenant Kinda alias Kilo, de tribu Bemba, ont emportés avec eux les missiles portatifs (Manpads) su même type que ceux qui ont abattu l’avion du président Habyarimana en 1994[5]. Les fugitifs que les renseignements militaires congolais estiment être réfugiés en Zambie, n’ont jamais été localisés. C’est ce qui explique en partie la surmilitarisation de l’ex-province du Katanga transformée en une zone opérationnelle[6]. Les autorités congolaises craignant une rébellion soutenue par la Zambie et l’Angola[7].

En février 2016, des sources nous ont fait état d’une grogne au sein de la Garde républicaine (GR) où le Général Kampete, le commandant de la GR, a pu désamorcer une insurrection armée en novembre 2015. En cause, la suppression des primes de 100.000 FC (environ 100 $) à aux éléments de la GR pour le mois de décembre 2015. Les soldats de la GR n’avaient reçu que leur salaire FARDC et les vivres comme tous les autres militaires FARDC. La prime de motivation de la Présidence de la république (mois de décembre 2015) n’a pas été payée sur instruction personnelle de Kabila. Elle a été payée tardivement en fin janvier en la rabotant de moitié, soit 50.000 FC et en augmentant la ration alimentaire afin d’éviter un grand mécontentement. L’autre moitié prélevée des primes de la GR a été octroyée aux 3 brigades commandos des forces de réaction rapide (FRR). Il s’agit des 11ème, 31ème, 32ème brigades commandos FRR[8] qui obtiennent de plus en plus la confiance de Kabila.

La Garde républicaine n’aurait plus la confiance du « Chef »

Les éléments du RSH de la GR connus sous l’appellation de Bana Mura car formés à Mura au Katanga
Les éléments du RSH de la GR connus sous l’appellation de Bana Mura car formés à Mura au Katanga

Il nous revient de plusieurs sources de la haute hiérarchie de l’armée qu’après ces signaux peu rassurants de la GR et incapacité de contenir efficacement l’insurrection populaire de janvier 2015, Kabila fait de moins en moins confiance à la Garde républicaines. Il fait désormais surveiller certains chefs de la GR, en commençant par les généraux François Olenga (chef d’état-major particulier du président et responsable fonctionnel de la GR qui dépend de la maison militaire du président), Jean-Claude Yav (chef des renseignements militaires = Démiap et adjoint du général Olenga au sein de la maison militaire) et Ilunga Kampete (Commandant de la GR) par l’état-major général des FARDC. Et vice-versa, le général Didier Etumba, le chef d’état-major général des FARDC est à son tour surveillé par la Démiap dépendant de la maison militaire du président. En clair, Kabila a mis en place un dispositif de surveillance mutuelle de ses principaux généraux afin de contrebalancer leurs poids et leur influence au sein des forces armées et de les neutraliser.

En effet, le réseau radio de la Garde républicaine est relié à celui de l’état-major général des FARDC. Ainsi, au moment de l’incident – involontaire selon les sources DESC – les communications de la GR à Kingakati ont été signalées et interceptées par le réseau radio de l’état-major général des FARDC. Cela a créé un moment de flottement et d’agitation suite à la panique suscitée.

Depuis les événements de janvier 2015 et la tentative de mutinerie de la Garde républicaine en juillet – aout 2014, Kabila avait décidé que le réseau radio de la GR ne pourra plus être autonome comme avant. Ce, pour éviter que la GR ne devienne incontrôlable. Ainsi, son réseau de communications TETRA a été relié au centre de transmissions de l’état-major général (EMG) des FARDC afin que l’EMG suive de près tout ce qui se passe dans la GR.

Plusieurs proches collaborateurs du président Kabila l’ont souvent mis en garde contre la montée en puissance excessive de la GR. Mais Kabila les a toujours rassurés de la loyauté de la GR cette unité d’élite à son égard. Selon les dires de Kabila, « au stade actuel, il ne serait pas de bon aloi de se débarrasser ou de relever la GR de la présidence de la république », surtout en cette période dangereuse de grande turbulence politique. Il faut juste les (GR) garder tout en les surveillant étroitement (surtout les officiers) et en les noyautant (provoquer des divisions de l’intérieur), confiait-il à ses collaborateurs.

Laurent-Désiré Kabila a été assassiné, avec la complicité de la GSSP pour son manque de prudence et de délicatesse, nous avoue un proche collaborateur militaire du président Kabila. Déjà en juin 2000, soit 6 mois avant son assassinat, Laurent-Désiré Kabila criait sur tous les toits qu’il allait relever la GSSP (Groupe spécial de sécurité présidentielle), l’ancienne garde présidentielle, car non fiable et infestée de comploteurs et de traîtres. Et cette relève allait avoir lieu en février 2001 par les hommes de la 10ème brigade d’infanterie spéciale formée à Likasi pendant 9 mois par 400 instructeurs nord-coréens. Sachant dès ce moment que LD Kabila allait relever la GSSP et que le complot allait être dévoilé, ses assassins, en contact avec les chancelleries des pays voisins et occidentaux, vont le prendre de vitesse et l’abattre dans son bureau le 16 janvier 2001. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, « le ‘Raïs’ avance masqué et prudent avec le dossier GR », nous précise notre source.

Mais en réalité, Kabila sait que la GR est gravement divisée et se sent d’ailleurs quelque peu otage de cette unité dont il éprouve des difficultés à se défaire. Même s’il compte depuis peu avec des unités commandos des forces de réaction rapide pour contrebalancer le poids de la GR devenue sans doute trop encombrante.

Conclusion

Avec tous les éléments susmentionnés à charge de la GR, le Général Olenga, le Chef d’état-major particulier du président Kabila et homme fort du régime, s’en méfient personnellement. Il essaye dès lors de diluer l’influence de celle-ci en renforçant la protection de Kabila et de son régime par des éléments commandos des forces de réaction rapide. 3 brigades commandos/FRR : 31ème, 11ème, 32ème. Cette prise de position ne semble pas être appréciée par son adjoint le général Jean-Claude Yav et par son ancien poulain, le général Gaston-Hughes Ilunga Kampete, le Commandant de la GR. Nos sources nous ont informés que les relations entre le premier et les deux autres généraux sont devenues très froides, méfiantes et parfois tendues.

A cela, il faut ajouter l’hostilité que nourrissent réciproquement les généraux Olenga et Didier Etumba, le chef d’état-major général de l’armée[9]. Selon des indices à notre disposition, le général Etumba est très proche d’Aubin Minaku, le président de l’Assemblée nationale, dans une subtile stratégie de succession à Kabila. Tout ceci pendant que le général John Numbi, qui garde encore plusieurs fanatiques dans les rangs de la GR, de l’armée et de la police[10], ne s’est pas encore clairement positionné dans les enjeux politiques en cours et à venir.

Les rivalités entre les différentes unités de l’armée et la guerre des généraux ou des clans qui se jouent actuellement en coulisses impacteront plus que vraisemblablement la posture de l’armée et des services de sécurité durant la période de fin du mandat constitutionnel de Kabila.

Avec une population de plus en plus en rupture avec la classe politique, toutes tendances confondues, l’issue favorable ou non du dialogue pour Kabila et ses alliés ne manquera pas de cristalliser la tension politique. Les raisons pour lesquelles la population, dans sa grande majorité, rejette le régime de Kabila sont plutôt d’ordre social et sécuritaire. Deux domaines dans lesquels le régime Kabila a lamentablement échoué. Cette population, laissée-pour-compte par un régime patrimonialiste et kleptocratique, est farouchement déterminée à en finir définitivement avec Kabila et ses collaborateurs d’ici à l’échéance de son mandat prévue le 19 décembre 2016. Ce, peu importe les arrangements politiques ou les accommodements politiciens qui seront brodés d’ici là. Pour cette population, la fin du régime de Kabila signifie pour elle la fin du calvaire, de son long chemin de la croix marqué entre autres par plus de 6.000.000 de morts, un nombre qui ne de s’allonger avec des massacres à répétition à Beni et ailleurs dans l’indifférence générale du régime congolais. Vox populi vox dei !

Jean-Jacques Wondo Omanyundu / Exclusivité DESC.

Références

[1] RSH : Régiment sécurité & Honneur : unité chargée de protection rapprochée du président Kabila au sein de la GR.

[2] http://afridesk.org/fr/alerte-desc-la-garde-republicaine-a-menace-de-renverser-joseph-kabila/.

[3] http://afridesk.org/fr/kabila-neutralise-subtilement-les-officiers-frondeurs-de-la-gr-en-les-envoyant-en-egypte-jj-wondo/.

[4] http://afridesk.org/fr/une-nouvelle-rebellion-des-elements-de-la-gr-en-gestation-au-katanga-jean-jacques-wondo/.

[5] http://afridesk.org/fr/tout-savoir-sur-les-missiles-portatifs-manpads-u-s-department-of-state/.

[6] http://afridesk.org/fr/le-katanga-en-etat-de-guerre-jj-wondo/. http://afridesk.org/fr/katanga-le-calme-avant-la-tempete-georges-berghezan/. http://afridesk.org/fr/rdc-une-situation-politique-et-securitaire-pre-explosive-dans-lex-katanga-jj-wondo/. http://afridesk.org/fr/rupture-en-vue-entre-katumbi-et-kabila-qui-militarise-le-katanga-en-signe-peur-jj-wondo/.

[7] http://afridesk.org/fr/rdc-kabila-est-plus-quengage-dans-une-logique-guerriere-contre-les-congolais-jj-wondo/.

[8] http://afridesk.org/fr/rdc-larmee-et-la-garde-republicaine-sur-le-point-de-se-mutiner-jj-wondo/#sthash.wjMreRjw.dpuf.

[9] http://afridesk.org/fr/qui-des-generaux-darmee-etumba-et-olenga-remportera-la-bataille-a-la-tete-des-fardc-jj-wondo/.

[10] http://afridesk.org/fr/john-numbi-et-joseph-kabila-le-desamour-apres-la-lune-de-miel/.

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One Comment “Les confidences de DESC : Kabila a failli être atteint par un tir maladroit à Kingakati ?”

  • Patrick menga

    says:

    En lisant le titre et le contenu de l’article,je vois on est entré d amuser les galeries.les »revoltes »signalées par ci ou par la eza b aventures montées na régime ye moko pour faire semblé il a la situation en main.Si c’était VRAI,on en parlera plus du jeune homme

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