De Gorée au Front Citoyen 2016 :
Quand Kabila se tire une balle dans le pied !
Jérôme Kengawe Ziambi
Du 11 au 14 décembre 2015, l’ile de Gorée au Sénégal a abrité une conférence sur le processus électoral à laquelle plusieurs parlementaires de l’opposition ainsi que les organisations de la société civile congolaises ont participé. Contrairement à des rumeurs colportées par des personnes animées de mauvaise intention et sous informées, la rencontre de Gorée a été organisée exclusivement par la Fondation Konrad Adenauer[1]. Il n’a nullement été question d’une quelconque participation, encore moins de la présence de la Fondation sud-africaine, Brenthurst, sur la liste de principaux bailleurs de fonds de l’atelier de l’Île de Gorée[2].
L’Institut Gorée pour la promotion de la démocratie, la gouvernance, la paix et non la « balkanisation »
Pour ceux qui l’ignorent et se sont lancés irrationnellement dans des spéculations incongrues et des accusations hâtives et émotionnelles, dépourvues de toute approche méthodologique objective, et non étayées par des éléments factuels probants, L’institut Gorée a été fondé à la suite de la Conférence de Dakar qui s’est tenue en 1987 sous l’égide du président Abdou Diouf, alors président en exercice de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), et investi dans la lutte contre le régime de l’apartheid en Afrique du Sud. La conférence réunissait leaders noirs sud africains et blancs afrikaners engagés dans la lutte contre l’apartheid. L’Institut Gorée est dédié aux problématiques de la démocratie et du développement en Afrique. Il participe à l’émergence de sociétés paisibles et auto suffisantes en Afrique.
L’Institut Gorée s’appuie sur trois piliers stratégiques :
Démocratie, gouvernance et processus politiques
Alliance des initiatives africaines pour la paix et la stabilité
Consolidation de la paix et prévention des conflits en Afrique
À travers ces trois piliers stratégiques, l’Institut Gorée cherche à apporter des réponses sur les questions de démocratie, de développement, de paix, de stabilité, de prévention et de résolution des conflits en Afrique, par la formation, la facilitation et l’intervention [3].

Au-delà de la panique et de l’émotion, une restitution claire et professionnelle des travaux de Gorée à Bruxelles
La conférence de presse qui s’est déroulée à Bruxelles le samedi 19 décembre avait pour objectif de restituer les conclusions de cette rencontre.
En effet, un des résultats remarquables de la rencontre de Gorée est la constitution du Front Citoyen 2016. Les multiples tentatives de blocage du processus électoral, orchestrées par le régime de Kabila afin de se maintenir au pouvoir, en violation des dispositions constitutionnelles, ont fini par convaincre la majorité des Congolais de se liguer en front commun pour lui barrer la route. Comme l’indique le communiqué final, le Front Citoyen 2016 « est un rassemblement inclusif de citoyens qui regroupe les congolais de la République Démocratique du Congo et de sa diaspora, membres des organisations de la société civile, des confessions religieuses, des organisations politiques ainsi que les personnalités congolaises qui s’engagent à militer pour le strict respect de la Constitution. ». Il est signé par 27 personnalités représentant des différentes organisations politiques et de la société civile et dont l’UDPS, le MLC, les FAC, l’UNC, le MLP, L’Envol, le CNB, La LUCHA, FILIMBI, L’ASADHO, La VSV, La Ligue des électeurs ; Les Amis de Nelson Mandela pour les droits de l’homme, Moïse Katumbi, etc.
Dans sa déclaration du 19 décembre 2015, le « Front Citoyen 2016 », appelle, à la publication « au plus tard le 31 janvier prochain d’un calendrier électoral ‘consensuel’ » dans lequel la tenue d’une élection présidentielle avant la fin 2016 est prévue. Par ailleurs, pour la crédibilité de toutes ces élections, le front exige « le démarrage de la mise à jour du fichier électoral (…) au plus tard le 10 février », cette dernière date est qualifiée comme étant la « ligne rouge », au cas où elle serait ignorée, « A la date ultime du 16 février, un calendrier d’actions non violentes (…) sera rendu public »
Quelques modalités de fonctionnement ont été annoncées, elles seront précisées dans une Charte qui sera publiée sous peu et dans laquelle seront précisés les critères d’adhésion. C’est la société civile qui coordonnera les actions à mener. Le Front Citoyen 2106 n’est pas une plateforme politique, mais un rassemblement inclusif des structures politiques, de la société civile et des personnalités congolaises et de la diaspora, qui a pour seul et unique objectif que l’alternance se réalise d’une manière démocratique et pacifique au Congo, conformément aux dispositions constitutionnelles, à l’échéance du mandat en cours du président Kabila, soit le 19 décembre 2016. La date de la création du Front Citoyen 2016, le 19 décembre 2015, était aussi symbolique. Elle marque les 10 ans de l’adoption de l’actuelle Constitution et rappelle que le Front Citoyen 2016 est lancé à une année, jour pour jour, de l’échéance du mandat actuel du président Kabila.
Toutefois, lorsque l’alternance sera acquise, chaque membre, sera libre de présenter son projet de société pour les élections. En fait, les membres du Front Citoyen 2016 adhèrent à deux principes ; le respect de la constitution et l’alternance au sommet de l’état. Actuellement, c’est un rassemblement à minima. Cependant, en fonction de l’évolution de la conjoncture politique, il pourra évoluer. D’ailleurs, il est ouvert à tout le monde, la liste de signataires n’est pas close et il n’existe pas un « club de fondateurs » car le Front Citoyen 2016 veut ratisser large.
Par ailleurs, cette invitation a entrainé un branle-bas de combat au sein du régime de Kabila qui a intenté aux participants un procès d’intention. En fait, le gouvernement congolais les a accusés de comploter afin de déstabiliser les institutions de la RDC. Ainsi des protestations ont été adressées aux autorités sénégalaises, et le comble, dérogeant à toutes les règles de la bienséance diplomatiques de la Convention de Vienne qui indiquent que l’ambassadeur ou tout représentant d’un état étranger soit convoqué au ministère des Affaires étrangères pour lui transmettre les protestations. Au Congo, dans le cas présent, l’ambassadeur de l’Allemagne fut convoqué par l’ANR. En outre, des agents ont été dépêchés à la hâte à Dakar afin de filer les participants, les politiciens et les membres des ONG, qui n’ont jamais caché la nature de leurs activités.
Au-delà de ces anecdotes, cette conférence fut un moment historique, comme l’a expliqué un des représentants de FILIMBI[4], le principal organisateur de cette conférence, que les Congolais ont constitué front commun à trois reprises. Le premier en 1960 à l’occasion de la table ronde qui a conduit le pays à l’indépendance, les participants avaient refusé de commencer si Lumumba n’était pas libéré; la seconde fois en 1992 pour l’ouverture de la conférence nationale souveraine et à Gorée en ce mois de décembre 2015. Cette fois-ci, c’est pour dire non à la volonté manifeste de Kabila de violer la constitution et de se maintenir indéfiniment au pouvoir.

La constitution du Front Citoyen 2016 à Gorée résulte du constat selon lequel les signaux lancés par Kabila et son régime sont de nature à bloquer le processus électoral en vue de se maintenir au pouvoir en violation des articles 70, 168 et 220 alinéa 1er de la Constitution qui interdisent tout dépassement du délai du mandat présidentiel, communément appelé « glissement », susceptible de retarder la tenue de l’élection présidentielle.
La gestion erratique de la RDC et la mauvaise volonté du régime Kabila, dont les actes posés tendent à consacrer le sabordage du processus électoral 2015-2016[5], auront tout le moins le mérite d’avoir pour la première fois mis tout le monde – Société civile et une grande majorité de l’opposition politique – sur la même longueur d’onde. Ensuite, le discours présidentiel sur l’état de nation du 14 décembre 2015, devant le Congrès, dont on attendait qu’il se prononce solennellement qu’il ne se représentera pas au terme de son mandat en décembre 2016, ont donné les arguments à la constitution du Front Citoyen 2016.
Les autorités congolaises qui étaient informées de la tenue et du contenu de la conférence de l’Ile de Gorée, ont étalé leur amateurisme en feignant de s’en étonner et se sont irrationnellement lancées dans une fuite en avant en traitant les participants de terroristes subversifs. Alors que c’est l’une d’entre elles, Monsieur Aubin Minaku, le Président de l’Assemblée nationale, qui a délivré les autorisations de sortie pour les parlementaires. Le Sénégal qui est un modèle de démocratie et de stabilité politique en Afrique, peut-elle organiser, au vu et au su de tout le monde, des complots pour déstabiliser un autre pays ? Le régime de Kabila, qui ne cesse de faire preuve de déficit en matière de gouvernance démocratique et sécuritaire, devrait plutôt s’interpeller sur sa responsabilité dans la chute de Goma en novembre 2012 lorsque la haute hiérarchie militaire a été accusée de trahison et de collision avec l’ennemi du M23 et sur son incapacité de pacifier la région de Beni en proie aux massacres de plus de 600 congolais depuis le 2 octobre 2014. Il devrait également éclairer l’opinion sur sa proximité avec le Rwanda et l’Ouganda, deux pays régulièrement accusés par les différents rapports tant des ONG que du groupe d’experts des Nations-Unies, de soutenir les rébellions en RDC.
Par ailleurs, chaque fois que les opposants souhaitent se réunir au Congo, ils subissent les tracasseries des agents de l’ANR, le service de renseignement civils congolais et les arrestations arbitraires. C’est le cas notamment des détentions illégales de Fred Bauma et Yves Makwambala deux militants des mouvements de jeunesse de la LUCHA et de FILIMBI, ainsi que les arrestations et les condamnations des autres opposants. D’où cette initiative intelligente de se réunir à l’extérieur, hors des agitations du Congo, dans un pays qui est un des modèles de stabilité politique et d’alternance démocratique en Afrique noire francophone.
DESC l’a démontré à plusieurs reprises que c’est Kabila qui est le problème et représente le danger pour la paix en RDC[6] par le surarmement de la Garde républicaine (GR) – dont certains éléments sont formés aux techniques de guérilla urbaine – au détriment du reste de l’armée, clochardisée et aissé-pour-compte – qui s’enlise dans les opérations Sokola 1 contre les supposés « ADF » et Sokola 2 contre les rebelles rwandais des FDLR.
A force de vouloir mener toute la nation congolaise en bourrique, depuis qu’il a accédé au pouvoir de manière nébuleuse en 2001, Kabila se rend compte que l’éveil patriotique des Congolais de l’intérieur et de la diaspora ne lui donne plus aucune marge de manœuvre politique. Face à une population déterminée, comme en janvier 2015, aucune arme, fut-elle puissante, ne peut jamais arrêter sa volonté à l’alternance démocratique. Le régime de Kabila doit savoir qu’aucun régime antidémocratique ne s’est maintenu par la force armée. La puissante Union soviétique disposait, même, des armes atomiques pour garantir la survie de son système totalitaire, où en est-elle aujourd’hui ?
C’est ainsi que le Front Citoyen 2016 appelle Tous les Congolais à recourir à l’article 64 de la Constitution pour barrer la route à toute tentative de violation de la Constitution par le président Kabila.
Le Front Citoyen 2016 est donc le résultat des atermoiements d’un régime honni qui a longtemps mis à dos les Congolais ; civils et militaires. Il lance un appel de cœur à un rassemblement citoyen et national qui transcende les clivages politiques, idéologiques, religieux et communautaires pour la sauvegarde de l’intérêt supérieur de la nation congolaise qui se trouve à la croisée des chemins et à une période cruciale de sa maturation politique. Car seule l’Union fera la Force du Congo de Lumumba. #CongolaisTelema
Références
[1] un think tank allemand associé à l’Union chrétienne-démocrate d’Allemagne (CDU). Fondée en 1955 par Bruno Heck, la fondation a ses sièges à Sankt Augustin (près de Bonn) et Berlin. Elle dispose depuis 1976 d’un siège à Dakar, ses objectifs sont : la décentralisation, l’éducation civique, le dialogue entre société civile et institutions, dialogue interreligieux et interculturel, le renforcement des médias, la promotion du secteur économique privé, le dialogue entre le secteur privé et le monde politique, la prévention et la gestion de conflits, la promotion de la femme.
[2] http://www.lecongolais.cd/les-non-dits-de-la-rencontre-de-lile-de-goree-une-fondation-pro-balkanisation-signalee-a-dakar/.
[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Institut_Gor%C3%A9e.
[4] Un mouvement d’action civique de jeunes congolais. FILIMBI veut dire «sifflet » en swahili. Siffler pour alerter, siffler pour rassembler, siffler pour sanctionner d’où le carton rouge. – See more at: http://afridesk.org/fr/sous-les-tirs-de-desc-filimbi-ekoki-ca-suffit-ca-ne-peut-plus-durer/#sthash.rpsce2JX.dpuf.
[5] http://afridesk.org/fr/vers-un-sabordage-du-processus-electoral-2015-2016-en-rdc-alain-joseph-lomandja/.
[6] http://afridesk.org/fr/rdc-joseph-kabila-a-t-il-perdu-les-pedales-jean-jacques-wondo/.
3 Comments on “De Gorée au Front Citoyen 2016 : Quand Kabila se tire une balle dans le pied ! – Jérôme Kengawe Ziambi”
Roger Massamba
says:Mr. Jean Jacques Wondo je vous souhaites une Joyeuse fête de Noël à toute la famille Wondo et à vos equipes qui travaillent arrache pieds pour deloguer le dragon Joseph Kabila le president sortant de la Rdc dans son nid du pouvoir avec les concurres de Front des Citoyens 2016 nous nous esperons que la grace et la benediction du grand Dieu le tout Puissant va vous gracieux et vous donnes la grande victoire de la fin d’esclavagismes Rwandaise du 21’Siecle avec les esprits de Bankulu de la Rdc vous soyez protegez jusqu’à l’avenement de la chute du grand dragon J.K .K , encore une fois de plus Joyeux Noël 2015 Ingetaaaaaaaa V=Viva viva viva J.K.K imene nange nge ke kwenda na bwala nge na Rwanda
sulutani la passion du Congo
says:Nous sommes debout pour honorer nos Pères d’indépendance, nos martyrs,nos Compatriotes de Beni pourqui sous ce régime la paix est devenue un danré rare plus qu’un rêves, c’est pour mettre fin à tout ça que nous adhérons et appuyons à fond le front citoyen 2016, en achèvant cette année Kabila doit appartenir au passé composé…
pacus
says:je ne crois pas a la sincerite de ce fameux front. C’est la nouvelle version du type AFDL.On ne determine qui fait quoi…Voila un desordre bien planifie avec consentement d’eventuelles victimes elles-memes. Depassionnez ce sujet,vous comprendre l’itineraire que l’on nous impose pour revenir a 0. Inspirez vous de libye,irak,…des soulevements sans coordination,c’est debut de l’anarchie…