Colonel Daniel Lusadusu : L’ère de Joseph Kabila est désormais conjuguée au passé
Interview exclusive DESC
Diplômé de l’Ecole Royale Militaire (ERM) en Belgique et docteur en médecine avec une carrière exemplaire au sein des Forces armées zaïroises (FAZ), le colonel Daniel Lusadusu aborde avec DESC les questions relatives à la sécurité et à l’actualité politique de la RDC. Il livre une vision d’un homme déterminé à agir pour la renaissance de la RDC dans une interview sans faux-fuyants.
Vous êtes colonel-médecin, pourquoi la médecine militaire et non la médecine ou l’armée tout court ?
Depuis mon jeune âge, j’avais beaucoup d’admiration pour toutes les professions qui placent l’homme comme centre d’intérêts. Au terme de mes études secondaires, j’avais eu le choix entre trois orientations pour entamer mes études académiques. Mais ayant été profondément marqué dans mon enfance par les valeurs de fierté, de discipline qu’incarnaient les militaires au service du pays, j’avais fait l’option de devenir médecin militaire pour apporter ma contribution pour le conditionnement de ces hommes acquis à la cause nationale pour les motiver à servir encore mieux notre pays!
Quelle a été votre motivation à intégrer l’armée et quel a été votre parcours militaire ?
L’Armée est l’un des organes suprêmes et l’instrument de souveraineté d’un Etat sans lequel l’Etat ne peut exister. Les hommes qui la composent sont formés avec un sens pointu de rigueur, du respect, de l’honneur et de la discipline au service de la nation. Je me sentais porté par cette vocation !
J’ai entamé ma carrière militaire après avoir été lauréat du concours d’admission à l’Ecole royale militaire. Un concours très exigeant ! C’est alors que je suis incorporé dans les Forces armées Zaïroises (FAZ) avec le grade de Sergent en 1972. En septembre 1972, j’arrive à l’Ecole Royale des Cadets (ERC) pour préparer mon intégration à l’Ecole Royale Militaire (ERM). De 1973 à 1975, j’effectue mes candidatures de médecine aux Facultés Universitaires de Namur ; puis le Doctorat en Médecine à l’Université Libre de Bruxelles (ULB) de 1976-1979. J’obtiens mon diplôme de Docteur en Médecine en juin 1980 avec le grade de 1er Lieutenant. Il faut rappeler que j’effectuais mes études en médecine en parallèle avec mon cursus militaire de base à l’ERM.
De septembre 1980 à Juin 1981, j’avais fait la Médecine Tropicale à l’Institut Prince Léopold à Anvers et l’Ecole Royale de Service Médical, ERSM, à Gand.
En février 1982, je rentre au pays où je suis affecté au poste de santé du ministère de la Défense Nationale et état-major général, au Mont-Ngaliema, à Kinshasa.
De septembre 1982 à juillet 1983, j’étais affecté Proviseur à l’Ecole du Service de Santé, ESS, et consultant en Médecine interne à l’Hôpital interarmes à la base militaire de Kitona (BAKI).
En Août 1983 j’intègre le Bataillon Garde Républicaine de la Brigade Spéciale Présidentielle (BSP), chargée de la sécurité présidentielle.
De 1983 à 1984, j’étais médecin responsable du Centre d’Instruction Kibomango, j’avais suivi l’entrainement parachutiste à la 31ème Brigade au Centre d’Entraînement des Troupes Aéroportées (CETA) avec le grade de Capitaine.
De 1984 à 1994, médecin au Centre Médico-Chirurgical Tshatshi dont j’ai été Commandant Second puis Commandant et Conseiller Médical de la Division Spéciale Présidentielle (DSP) qui succéda à la BSP.
J’étais nommé Major en 1986, puis Lieutenant-colonel en 1989 et Colonel en 1992.
Je suis également détenteur des titres honorifiques de Chevalier de l’Ordre National des Léopards en 1989, puis d’Officier de l’Ordre National des Léopards en 1993.
En août 1994, suite à ma requête, j’avais été autorisé à retourner en Belgique pour une spécialisation de 3ème cycle à l’ULB.
J’obtiens le diplôme de Cardiologie en 1999, le Diplôme d’Etudes Spécialisées en Médecine aiguë en 2000, le Diplôme de Formation Ressuscitation Cardio-Pulmonaire (RCP) avancée en 2002 en qualité de Formateur.
Actuellement, je suis médecin cardiologue au Centre hospitalier universitaire Saint-Pierre à Bruxelles, avec 4 années d’activités aux soins intensifs coronaires à temps plein et praticien dans d’autres grandes institutions médicales belges.

Depuis plus de 20 ans vous vous êtes retrouvé à l’étranger poursuivant plutôt une carrière médicale que militaire ? Est-ce un choix ?
NON, pas du tout et avec beaucoup de frustration d’une carrière « accidentellement » brisée. C’est un cauchemar pour moi de me voir contraint de me retrouver loin de ma patrie, ma soif de servir au sein de l’armée pour défendre mon pays est restée insatiable. J’avais toujours rêvé de rentrer et servir davantage mon pays. Je pense que le moment est venu de le faire publiquement.
En Belgique, vous êtes connu pour être très actif dans la promotion des idées et des actions visant à la création d’une armée nationale et républicaine en RDC. Pourquoi cet activisme assez particulier ?
« A vouloir chasser le naturel, il revient au galop« ! J’étais assermenté à double titre comme militaire et comme médecin. Ceux qui connaissent les valeurs et les exigences de ces deux métiers nobles qui ont pour vocation de sauver et de protéger des vies humaines, comprennent le sens de mon engagement. Jamais je ne trahirai mon pays ni son peuple !
Avec une vision claire de l’avenir de notre pays après l’arrivée du régime de l’AFDL, j’avais tenté en tant que Président de l’Union des Patriotes Militaires Congolais (UPMC), d’apporter ma contribution aux efforts de la mise en place de l’armée nationale congolaise à vocation républicaine. La renaissance du Congo, en tant qu’Etat stable et prospère, que nous rêvons ne peut nullement se concevoir sans une armée nationale et républicaine, encrage de notre souveraineté et garante de notre unité et de notre indépendance acquises aux prix des sacrifices suprêmes des pères de l’Indépendance. Il s’agit d’une exigence prioritaire et indispensable pour la reconstruction du Congo de demain. Une armée dissuasive qui sécurise et rassure les populations, qui défend le territoire et contribue au développement. Je tiens absolument à y apporter mon expertise, mes compétences, savoir-faire et mon expérience dans un esprit hautement patriotique.
Si je vous comprends bien, la RDC n’a jamais disposé d’une armée nationale et républicaine ? Pourtant vous êtes un ex-FAZ, qui plus est de la DSP qui n’a pas que laissé de bons souvenirs ? Vous êtes donc d’une manière ou d’une autre un pur produit de cette armée que je qualifie dans un de mes ouvrages d’une pervertie ? Comment comptez-vous vous y prendre ? Peut-on faire du neuf avec du vieux ?
Une frange importante des militaires ex-FAZ avait une très bonne formation. Notre pays disposait à l’époque sans doute de meilleurs militaires de l’Afrique sub-saharienne, formés aux quatre coins du monde, se distinguant dans les prestigieuses académies du monde, comme vous et moi. Notre pays, avant l’invasion rwando-ougandaise de 1996, était aussi une pépinière des officiers africains formés à l’Ecole de Formation de Kananga (EFO), une référence africaine. Il régnait incontestablement au sein des FAZ un esprit de corps digne d’une bonne armée. « Tozali ba masuwa » qui voulait dire, « Nous sommes des passagers embarqués dans un même navire »! Tous les ingrédients étaient réunis pour faire de notre pays, au travers de la capacité opérationnelle des FAZ, qui s’étaient distinguées par exemple au Tchad ou au Rwanda, une puissance militaire continentale.
Ce n’était donc nullement la faute des hommes qui composaient cette armée qui malheureusement ne fût pas républicaine. N’est-ce pas les généraux, paix à leur âme, comme Ekumu Mbanze dit « Mbuza Mabe » ou Lucien Bahuma Ambamba qui se sont distingués au sein des FARDC contre les agresseurs du Congo ne sont pas les purs produits des FAZ et de la DSP ?
La faute et la lourde responsabilité incombaient à la hiérarchie politique et militaire« infectée » par le virus du népotisme, de la kleptocratie, du clientélisme, du tribalisme, des courtisans et des diverses pratiques mafieuses qui ont détourné l’armée de sa mission traditionnelle en y créant des milices et en abandonnant le soldat à son triste sort. La suite n’était que logique. Il nous appartient maintenant de rectifier le tir et c’est ce que nous avons décidé d’entreprendre désormais.

20 après la chute de Mobutu, la RDC reste continuellement un pays instable, comment expliquez-vous cela ?
Le Congo après Mobutu est tout sauf un Etat, c’est une véritable jungle, un monde à l’envers ! L’armée, la police et les services de sécurité sont instrumentalisés par le pouvoir pour entretenir une insécurité généralisée et la terreur. La justice est également inféodée au pouvoir. Il y a une volonté délibérée du régime en place de maintenir indéfiniment le pays dans cette situation d’instabilité permanente. C’est la raison première de l’agression de la RDC et de l’installation des régimes de Kabila et cette situation ne changera jamais tant que le même régime restera au pouvoir. Les derniers développements au pays en témoignent. Après 20 ans des Kabila, le pays est non seulement en grande instabilité sécuritaire, sociale, politique et économique, mais risque de disparaître avec la politique de la terre brûlée instaurée par Kabila qui se sait au crépuscule de son régime. La cruauté entretenue par le pouvoir a atteint son paroxysme, avec des fosses communes où nos compatriotes sont enterrés comme des ordures. Inimaginable!
Je vous mets en défi de me citer un seul pays au monde où règne une telle barbarie entretenue par ses dirigeants.
Même le minimum des besoins sociaux de base des populations n’est pas assuré. L’eau et l’électricité sont des denrées rares. Les soins de santé sont de qualité illusoires, très onéreux et inaccessibles à tous. L’enseignement de qualité devient un luxe, le taux de chômage est en constante évolution et lorsqu’ils ont un travail les salariés et les fonctionnaires alignent des mois d’impayés, la récession économique est vertigineuse. La RDC, notre pays, est quasiment dans une situation pré-explosive d’impasse socioéconomique. Le pays connait une inflation hémorragique des prix des biens et des services de plus de 33%, selon les prévisions de la Banque centrale congolaise, en hausse par rapport aux 25% de l’année dernière. Par ailleurs, le franc congolais continue sa chute face au dollar. Il s’échange actuellement à plus de 1600 francs congolais à certains endroits. Le budget de l’Etat insignifiant, inférieur à six milliards de dollars, est très loin de répondre aux besoins sociaux de base de la population congolaise. A cela, il faut ajouter l’effondrement des réserves de la banque centrale, la croissance économique en chute libre, passant, selon les estimations de la Banque centrale congolaise de 7% en 2015 à 2,4% en fin 2016 en moyenne, la baisse de l’aide financière extérieure pour soutenir le budget de l’Etat ainsi que l’effondrement des investissements à la suite d’un double climat économique et politique très instable. Tous les indicateurs socioéconomiques et politiques sont donc réunis actuellement pour faire de la RDC un Etat en faillite, confronté à de sérieux problèmes qui compromettent sa cohésion nationale et sa survie.
Par ailleurs, il n’y a pas d’avenir prometteur pour la jeunesse qui est clochardisée et abandonnée à elle-même ; pas non plus de perspectives d’élections crédibles avec une CENI instrumentalisée par le régime de Kabila. Les cartes d’électeurs, les permis de conduire tiennent lieu de carte d’identité…. Des médicaments importés contrefaits avec la complicité du pouvoir pullulent sur le marché. Par contre, le commerce de la mort est en plein essor avec beaucoup de corbillards et peu d’ambulances…
Le pays est dirigé par une classe politique médiocre, égoïste, cupide avide de ses intérêts personnels et qui n’a que faire du peuple dont il ne se soucie et qu’il a pris en otage ! Il est temps d’agir vite pour mettre fin à cette ultime forfaiture de mauvais goût. C’est ce à quoi nous nous sommes engagés.
Quels sont selon vous les maux qui rongent l’armée actuelle ?
Les FARDC, malgré la qualité de certains militaires dont elle regorge est tout sauf une armée. Il s’agit d’une armée des milices, une armée partisane et fanatique, sans unité de commandement ! Une armée infiltrée pour l’affaiblir par des forces étrangères au service d’intérêts étrangers! Une armée avec une majorité des militaires mal ou très peu formés, mal encadrés, mal entretenus, mal équipés et sans proximité avec la population civile. En bref, une vraie « armée mexicaine », permettez-moi l’expression.

S’il vous était demandé de réorganiser les forces armées en RDC, comment allez-vous vous y prendre ?
Le feu Général Paul Mukobo disait : « La force d’une armée, sa puissance, ne sont ni déterminées ni fixées par les militaires. C’est une option politique qu’un Etat doit lever…». Je pense que la RDC dispose suffisamment d’experts et de compétences pour conceptualiser une profonde réforme de l’armée et des services de sécurité. Nous y travaillons sérieusement et si on ne peut dévoiler certains détails techniques d’ordre stratégiques ici, je vous invite, le moment voulu, à nous juger sur nos initiatives.
J’aime aussi cette expression du général De Gaulle qui déclarait au sortir de la Deuxième guerre mondiale dont la France était sortie exsangue : « C’est parce que nous ne sommes plus une grande puissance qu’il nous faut une grande politique parce que, si nous n’avons pas une grande politique, comme nous ne sommes plus une grande puissance, nous ne serons plus rien ». C’est cette vision stratégique de la renaissance d’un Grand Congo que je vous invite à suivre au travers de mes actions, interventions et diverses initiatives que je compte prendre d’ici là.
Aujourd’hui, l’avenir de la RDC est plus que compromis du fait de Joseph Kabila veut s’accrocher au pouvoir par la force. Pensez-vous que l’armée a un rôle à jouer pour favoriser l’alternance au pouvoir et consolider la culture démocratique par le strict respect de la Constitution ?
La RDC est un cas d’espèce. Si ce pays était normal avec une armée républicaine, on en serait pas du tout là. L’armée se serait interposée dans un rôle d’arbitre pour le neutraliser et favoriser l’alternance telle que prévue par la Constitution avec un Président intérimaire devant organiser les élections dans le délai constitutionnel.
Quelles sont les personnalités congolaises qui vous ont marqué en général dans l’histoire du Congo et dans le cadre de votre parcours professionnel et de votre engagement patriotique?
D’abord le Président Kasa-Vubu avec sa famille qui en juin 1965 soit à la fin de ma 5è année primaire, m’avait reçu avec des cadeaux dans le jardin du palais présidentiel de Mont-Ngaliema avec les meilleurs élèves des autres écoles primaires de Léopoldville. Je me souviens de mon condisciple Faustin Olubwa qui en faisait partie, et avec qui j’avais évolué jusqu’en fin de secondaire et qui comme moi est devenu Médecin et travaille à Kinshasa.
Le Sous-lieutenant Léopold Tita, alors finaliste en Polytechnique à l’Ecole Royale Militaire en 1972, qui m’avait marqué par ses visites à l’Ecole Royale des Cadets pour nous encourager et qui rayonnait l’exemplarité, un modèle à suivre!
Le feu Cardinal Etsou qui incarnait un modèle de respect, de l’amour d’autrui, de justice, de solidarité et de la vérité ! Quand il m’avait reçu en décembre 2006 avec deux autres officiers, il nous confia tel un testament, « Il ne faut jamais trahir son pays. Avec vous, après ma mort, je survivrais pendant très longtemps » !
Le Président Etienne Tshisekedi, qui m’avait fait confiance et avec qui j’avais partagé ma vision et mon projet pour l’armée et la sécurité de la RDC de demain, au terme d’une discussion en aparté en octobre 2010 soit avant l’élection présidentielle 2011. Je me souviens de sa phrase testamentaire, « Si le petit Kabila s’acharnait à défier la volonté du peuple congolais, je m’y opposerai par tous les moyens et il n’aura qu’à nous tuer nous tous ».
En rapport avec mes réalisations professions, purement professionnel, il y a le Général d’Armée Likulia Bolongo, alors Secrétaire d’Etat à la Défense nationale sécurité du territoire et aux anciens combattants, pour sa contribution à mon projet de la modernisation des infrastructures médicales de la garde présidentielle, du Centre médico-chirurgical Camp Kokolo, de la garde civile et de l’hôpital général de Kinshasa. Tout comme, le Grand Amiral Mavua Midima, alors Vice-ministre de la Défense nationale qui avait accédé à ma demande pour une formation spécialisée de cinq infirmiers militaires à l’hôpital interarmes Laveran à Marseille en France.
Enfin, il y a le Dr Denis Mukwege, un éminent collègue avec une carrière exceptionnelle et rayonnante, dont je salue le combat patriotique dans les souffrances qu’endurent les filles et les femmes congolaises, victimes de viols comme arme de guerre pour détruire la société congolaise active.
Vous citez Etienne Tshisekedi. C’est étonnant pour un officier qui a évolué dans la DSP de Mobutu. Comment expliquez-vous cette proximité ?
Rien d’étonnant ! D’ailleurs lui-même était très content de me recevoir avec une délégation des ex-FAZ avec des anciens DSP dont le Colonel Ngoy Loponde, ancien commandant du bataillon sécurité DSP qui lui rappela leur rencontre en 1984 en exécution de l’ordre du Marechal de l’arrêter. On en avait rigolé avec le souvenir de son uppercut sur le sergent qui avait osé le bousculer. J’ai des bons souvenirs du vieux, un homme agréable et un modèle pour moi !
En quoi a consisté votre collaboration avec Etienne Tshisekedi ?
Comme je vous l’ai dit, le « Patriarche » avait misé sur moi pour réorganiser nos forces de défense et de sécurité. Il comptait beaucoup sur moi et l’équipe que je mettais en place.


Lorsqu’on vous entend, vous semblez vous considérer comme étant dépositaire de la continuation de son combat ? Peut-on déduire que vous voulez vous lancer dans une carrière politique ?
Etienne Tshisekedi est mort, nous le regrettons ! Le combat qu’il a laissé n’est pas le sien, c’est le combat du peuple pour la république. Nous ne pouvons que le continuer, et ce fort des valeurs intrinsèques dont il est porteur.
Tout citoyen est un homme politique, c’est un état d’esprit confronté à la gestion de la société : Qui je suis ? Dans quel espace je vis ? Comment je vis ?
Si je devais me lancer dans une carrière politique pour influencer le destin de mon pays qui est compromis, je n’hésiterais pas du tout un seul instant surtout avec le désordre sciemment entretenu par une classe politique médiocre, mafieuse, corrompue et prédatrice. Il nous faudrait mettre de l’ordre.
Comment comptez-vous vous y prendre concrètement ? Avec quelles ressources ?
Pour des raisons évidentes de sensibilité et d’efficacité, je ne peux malheureusement pas vous exposer ma stratégie au stade actuel car ce n’est pas le lieu indiqué pour l’expliciter. Cependant, avec ma double casquette civile et militaire, je m’implique d’abord à rassembler toutes les forces politiques et sociales positives, intègres et patriotiques de notre nation, qualitatives et non quantitatives. Ensuite, je voudrais agir de sorte à assurer la protection de ces forces sociales afin de leur permettre d’atteindre les objectifs de changement et d’alternance souhaités par tous. Nous y travaillons très sérieusement et il n’est plus que question de temps. Pour l’instant, j’en appelle à l’unité des forces vives de la Nation dont font partie aussi les militaires et les agents des services de sécurité. Je reste très confiant.
Quelle lecture faites-vous de l’avenir de la RDC et comment vous positionnez-vous par rapport à cela ? Comptez-vous vous lancer dans une carrière politique ?
La situation en RDC est très précaire, très instable avec une population exténuée dans l’attente d’une alternance politique démocratique pacifique qui devient un cauchemar ! J’ai vraiment peur que ce peuple réputé pour sa léthargie, se réveille et se révolte dans un soulèvement populaire incontrôlé qui serait une catastrophe tel un « tsunami » qui pourra ravager le pays, la sous-région et notre continent.
Puisque vous avez travaillé avec Etienne Tshisekedi, peut-on en déduire que vous continuez à collaborer avec son fils, Félix Tshisekedi, le président du Rassemblement ? A quel titre ? En tant que bras armé du rassemblement ?
Je garde une relation fraternelle, respectueuse et très conviviale avec Felix Tshisekedi sans aucun tabou, dans le même sens du combat en dépit de certaines divergences n’étant pas dans le Rassemblement. Nos échanges sont autant chaleureux que pertinents.
Notre peuple est assez meurtri, il y a eu suffisamment de guerres, il ne nous en faudrait pas une énième. Je ne m’embarquerais jamais dans cette logique, mais si on nous l’imposait, nous n’aurions pas d’autre choix que de défendre notre pays et son peuple et nous vaincrons à coup sûr !
Quel regard jetez-vous de l’homme politique congolais dans son ensemble ?
L’évolution récente de la situation sociopolitique en RDC nous offre suffisamment d’indices pour décrire l’homme politique congolais en général, à quelques exceptions près : inconstant, égoïste, irresponsable, non visionnaire, dépourvu du sens de l’Etat, incompétent, voire antipatriotique… Ce constat ne vient pas de moi mais de l’opinion publique nationale et internationale.
L’homme politique congolais a failli à sa mission et a démérité, l’ère de Joseph Kabila est désormais conjuguée au passé. ll doit impérativement rendre compte de son bilan au peuple congolais.
Il faut sans transiger procéder à renouvellement de l’espace politique par un leadership d’excellence, rassembleur et porteur du projet de la renaissance du Congo pour un meilleur destin. Je peux le dire sans être contredit que dans la mémoire collective congolaise, au vu du gâchis actuel, l’homme politique congolais incarne en grande partie le mal congolais. De ce fait, il ne me semble pas être actuellement le meilleur acteur du changement profond pour la renaissance de la RDC. Nous le constatons d’ailleurs avec les limites de l’action politique dans le cadre de l’accord de la Saint-Sylvestre.
Il nous faut penser et agir avec des solutions alternatives, multiformes et globales dans lesquelles nous ne pouvons exclure a priori le facteur militaire. Au-delà de l’alternance au pouvoir, il nous faut proposer une nouvelle alternative au système politique en cours en RDC où la grande majorité des hommes politiques du pouvoir comme de l’opposition ont étalé leurs limites et leur incapacité à offrir aux Congolais le bien-être et la paix. Regardez le spectacle que nous livre quotidiennement le parlement congolais pour comprendre qu’il sera difficile de faire du neuf avec du vieux ou les mêmes. Il faut changer de paradigme en apportant une vision novatrice de l’action publique en RDC avec des acteurs compétents, patriotes et aux mains propres.
A la lecture de votre descriptif du politicien congolais, je vous sens dubitatif quant à une solution purement politique. Peut-on en déduire que vous optez pour une solution militaire pour le dénouement de la crise congolaise ?
J’opte plutôt pour une solution révolutionnaire, menée par la société civile, accompagnée et protégée par des éléments patriotiques de l’armée et des forces de sécurité.
Nous devons être honnêtes de constater qu’une solution purement politique n’est plus possible dans la situation actuelle. Il nous faut agir autrement en ayant recours à tous les moyens que nous impose l’article 64 de la Constitution. C’est cette approche globale de la crise actuelle qui me différencie d’ailleurs d’autres acteurs politiques congolais dont je salue le combat. Le temps des conciliabules politiques est fini, il nous faut passer aux actions fortes. La patience des populations congolaises a atteint ses limites. Le peuple est fatigué des dialogues infructueux, même l’Eglise catholique dont je salue la posture actuelle est sortie de son silence pour appeler à la mobilisation générale. A mon avis, cette mobilisation populaire nationale concerne en premier lieu les hommes en armes dont le caractère républicain impose le devoir de défendre la Constitution et la patrie.

Avez-vous des contacts au sein de l’armée congolaise ?
Je suis un homme public à double titre, comme officier et comme médecin. J’ai toujours gardé ma fibre patriotique avec les contacts réguliers avec mes compatriotes militaires actifs ou pas et les civils du pays comme de la diaspora. C’est tout ce que je peux vous dire pour l’instant.
J’ai prêté deux serments dans ma vie. Une première fois, comme officier militaire, pour défendre et protéger ma nation, et une seconde fois, en tant que médecin, pour sauver des vies humaines. Je veux être cette passerelle entre les civils et les militaires. Désormais, chaque étape de mon combat sera guidée par ce double esprit patriotique de sacrifice et d’humanisme altruiste.
Que comptez-vous faire dans les tout prochains jours ?
J’ai été formé et ai évolué dans notre armée à la belle époque de la coopération militaire israélienne, américaine, française, belge et chinoise. J’en ai gardé des bons contacts. Par ailleurs, je vis depuis plusieurs années en Europe et ai tissé des bonnes relations. J’ai décidé de me mettre en action et en mouvement pour mobiliser des amis et des partenaires internationaux qui ne manqueront pas de nous apporter leur soutien dans notre engagement. Vous en serez informés tout prochainement. Je continue également à travailler étroitement avec les masses patriotiques congolaises de l’intérieur.
Quelles sont vos priorités actuelles et peut-être un dernier mot aux lecteurs de DESC ?
J’attends m’impliquer davantage dans la recherche des solutions idoines à la crise que traverse mon pays. J’appelle mes compatriotes à dépasser nos égos, à nous unir pour qu’ensemble, nous nous organisions et apportions nos compétences et nos expertises plurielles et complémentaires pour la renaissance d’un meilleur Congo, plus beau qu’avant que nous léguerons à nos fils et filles ainsi qu’à des générations à venir.
6 Comments on “Colonel Daniel Lusadusu : L’ère de Joseph Kabila est désormais conjuguée au passé”
GHOST
says:¤ SERVICE DE SANTÉ DE L´ARMÉE
Cette riche experience du docteur Lusadusu est aussi celle de la diapora congolaise qui a fait ses preuves dans tous les pays où elle réside.
Cette experience devrait servir de point de réference en vue d´apporter des innovations dans notre vision de la Défense au Congo.
Pendant les années où nous avons été « militaires » dans les année 80 et 90, il n´existait pas un seul hopital militaire digne de ce nom au Zaire. Et pourtant l´UNIKIN possedait les ressources academiques capables d´aider l´armée nationale á acquerir une infrastructure medicale de pointe.
Même si la RDC a depuis plus de 20 ans une mission militaire de l´ONU, sans oublier l´EUSEC, il ya une sorte d´absence d´ambition politique pour introduire dans l´armée congolaise un service de santé moderne.
L´étrange héritage de la Force Publique qui continue á separer la politique dans l´éducation des « civils » de la politique de la gestion de la Défense prive les militaires congolais de la riche experience academique et scientifique des universités du pays.
Le docteur Lusadusu qui a l´ambition d´aider á la formation d´une armée nationale dans un futur proche devrait commencer á inclure dans sa vision cette necessité de la création d´un service de santé de l´armée, et mieux la construction d´un hopital militaire universitaire consacré á la médecine de guerre.
L´implication du corps academique de l´UNIKIN est une ressource importante dont le pays devrait tirer profit. C´est la plus grande innovation que nous souhaitons pour l´armée au Congo*
John Kongolo
says:Instructif
John Kongolo
says:Instructif