Jean-Jacques Wondo Omanyundu
DÉFENSE & SÉCURITÉ GLOBALE | 23-01-2014 07:12
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Les événements du 30 décembre 2013 en RDC : Un massacre orchestré par le régime ? – JJ Wondo

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

 Evénements du 30 décembre 2013 en RDC : Un massacre orchestré  par le régime ?

Par Jean-Jacques Wondo

Massacre 30 dec 13Après notre enquête préliminaire sur les événements tragiques qui se sont déroulés le 30 décembre 2013 en RDC, nous avons reçu beaucoup de réactions nous demandant d’explorer des zones d’ombre qui entourent ces événements. Même si nous l’avions succinctement évoqué à la fin de notre première enquête, DESC n’a pas exclus l’hypothèse d’un coup monté par le régime congolais.

Avec un bilan de plus de cents morts tuées dans des conditions atroces qui au-delà du caractère légal (qui reste encore à prouver), nous avons explicitement condamné la réaction des services de sécurité qui n’ont pas respecté d’autres principes qui doivent guider toute intervention faisant recours à l’usage des moyens de contrainte. Il s’agit des principes de proportionnalité et d’opportunité. Le recours aux moyens de contrainte doit, dans le cadre de toute intervention policière, judicaire ou militaire, être un « ultima ratio » et « a minima ». C’est lorsque tous les autres moyens de neutralisation ou de mise hors d’état de nuire des « assaillants » ont échoué qu’on peut recourir graduellement et dans le cadre de la légitime défense à une réaction appropriée et proportionnelle faisant usage de la force. Ce qui ne semble pas le cas dans les images ressemblant à une boucherie qui ont circulé sur la répression violente des soi-disant partisans de l’église du pasteur Joseph Mukungubila.

Au-delà de ces trois principes de la doctrine juridique traditionnelle, un quatrième principe, à valeur éthique, doit également être respecté. Il s’agit du principe de licéité qui limite la pleine application du respect du principe de légalité doit normalement être plein et entier. Ce principe veut que ce n’est pas parce qu’une intervention est légale qu’elle doit s’exécuter en ignorant toutes les règles morales. C’est cette dimension morale qui est davantage mise en avant dans le cadre du droit international humanitaire appelé jus in bello. Ainsi et par analogie, pour tout soldat congolais, quel que soit son grade, l’éthique militaire doit supposer impérativement le dévouement envers son pays, le respect des valeurs nationales congolaises et des normes internationales relatives au jus in bello et l’engagement à l’excellence professionnelle.

Et si c’était un coup planifié par le régime pour semer la panique au sein de la population ?

C’est ce qui revient dans la majorité de correspondances reçues par DESC. Nous en reprenons quelques unes pour leur pertinence en « anonymisant » leurs auteurs pour garantir leur sécurité.

Monsieur Wondo, « J’essaie de suivre avec beaucoup d’attention et intérêt  ce que vous publiez sur votre site. Je venais de lire votre dernier article en date concernant l’actualité au Congo qui défraie la chronique. Il s’agit de ce que nous appellerions « affaire Mukunkubila ».
Je vous recommanderais de visionner avec les yeux d’un initié l’élément de la RTNC lors de la soit disant irruption des « assaillants » dans le studio. Bien étudier les gestes de deux journalistes, ceux du jeune homme à l’arrière plan, les bruits en sourdine et toute la cacophonie. Vous y puiserez un élément nouveau d’analyse et approche.
REMARQUEZ l’élément très capital à l’arrière plan: la partie d’une RPG7 (sans anticiper vos analyses et conclusions, il s’agit certainement de la présence des militaires qui dictaient aux soient disant assaillants ce qu’ils avaient à faire comme gestes scéniques).
Par ailleurs, vous tiendrez compte aussi de l’état d’esprit des jeunes kinois en cette période précise des opérations KULUNA pour s’engager dans toute action du genre.
CONSIDÉREZ  la configuration des lieux tels que l’EMG, la RTNC et l’aéroport de Ndjili, le délai d’intervention des Unités de la GR… pour tout retourner en ordre. On dirait un exercice de manœuvre synchronisé! » NB: je suis un ancien des FAZ en exil.

Des zones d’ombre à clarifier – une intervention illégale et disproportionnée ?

Le gouvernement a fait état d’un bilan de 103 morts dont 8 militaires à travers tout le pays. Dans son traditionnel message de vœux à la nation du 31 décembre, Joseph Kabila a appelé la population congolaise à la «vigilance tous azimuts » à la suite des attaques perpétrées lundi presque simultanément par des hommes armés à Kinshasa, Lubumbashi (Katanga), Kolwezi (Katanga) et à Kindu (Maniema). Mais étonnement, sans adopter une attitude de réserve juridique qui veut que le premier magistrat du pays s’assure au préalable que la réaction de ses services de sécurité ait été faite en respect des principes susmentionnés, Kabila a renchéri en déclarant:  … » j’en appelle une fois de plus, à la vigilance tous azimuts des Congolaises et des Congolais. Comme en témoignent les événements tragiques que la capitale et la ville de Lubumbashi ont connus le 30 décembre 2013, la victoire de nos forces armées sur les forces du mal ne nous autorise pas à dormir sur nos lauriers ».

A ce jour, des zones d’ombre sont de plus en nombreuses car l’enquête initiée ne permet pas à l’opinion publique d’avoir la certitude qu’il s’agissait bien d’attaques des forces négatives. En cautionnant officiellement la réaction disproportionnée et brutale de sa garde républicaine, qui échappe au contrôle des structures officielles de l’armée, n’est-on pas en droit de considérer Kabila comme le premier responsable de la réaction de la GR. C’est la question posée par un correspondant :

Bonjour Jean Jacques!, Suite a ce qui s’est passé en Rd Congo le 30 décembre 2013 sur ce que nous appelons le massacre de jeunes gens qui ne revendiquaient que leur droit sans pour autant avoir des armes nécessaires pour permettre une réponse forte anti terroriste des forces armées… J’aimerai bien savoir si: 1. cette réponse de FARDC qui a couté 103 morts aux assaillants est-elle tolérable ? 2. Joseph Kabila étant le chef suprême de l’armée, serait-il responsable de la décision de la réponse de l’opération ou la décision pouvait bien être prise sur place par des commandants sur place ? 3. Quelles sont les différentes tactiques que les FARDC disposent pour mener les opérations de la sorte surtout quand il s’agit de l’atteinte à la sécurité du territoire ? Si vous avez des informations qui pourront nous aider à bien comprendre cette chaine de prise de décision, ce serait très appréciable.

Lorsque le ministre Mende parle des assaillants munis d’armes blanches, pourquoi ne pas avoir fait intervenir d’abord la police, mieux formée pour réprimer les actes criminels commis à l’intérieur du pays plutôt que faire recours à une garde prétorienne, qui a agi en violation du principe légale de la réquisition prévue pour son intervention. Pourquoi seule la GR devait agir alors que non loin de la RTNC, il y avait la police et les unités de la force terrestre de la 11ème région militaire ?

Quelle autorité civile a coordonné les actions de la GR ? Une intervention qui n’a pas attendu la réquisition légale des autorités politico-administratives en charge de maintien et rétablissement de l’ordre public pour se mettre à réprimer sans ménagement les « assaillants » en semant la panique dans la capitale et les autres parties du pays concernées.

En analysant le cadre et les conditions d’intervention de la GR, on est en droit d’affirmer qu’il s’agissait plus d’une intervention de police qu’une mission de guerre. Or, dans une situation qui requiert l’intervention de la police, Les dispositions de la Loi organique nº 11/013 portant organisation et fonctionnement de la PNC promulguées le 11 août 2011. prévoient que la police ne peut avoir recours à la force qu’en cas de nécessité absolue et uniquement pour atteindre un objectif légitime, et qu’en tout état de cause, l’usage de la force doit respecter les principes de proportionnalité et de progressivité15. Si les policiers veulent disperser une foule à l’aide d’armes à feu, ils doivent également obtenir l’autorisation préalable de l’autorité légalement responsable du maintien de l’ordre

L’article 55 de la loi organique portant organisation et fonctionnement des FARDC prévoit ce qui suit en matière de réquisition de l’armée : « … En temps de guerre ou à l’occasion de la proclamation de l’état de siège, de l’état d’urgence ou lors de la réquisition des Forces Armées, celles-ci assurent la protection des personnes et de leurs biens ainsi que des intérêts fondamentaux du pays sur le territoire national et en dehors celui-ci. . . »

L’article 114 de la même loi prévoit que  « La Garde Républicaine est une unité des Forces armées ayant pour mission d’assurer : – la garde, la protection du Président de la République et les hôtes de marque de la République ; – la sécurité des installations présidentielles ; – les escortes et les honneurs à l’échelon de la Présidence de la République. »

Et pourtant dans les endroits où la GR est intervenue, aucun des cas susvisés de la mission de la Garde Républicaine n’est rencontré. Par conséquent, pour intervenir, une requête de l’autorité en charge de maintien et rétablissement de l’ordre public ou du commandant de la région militaire était obligatoire Ce qui ne semble pas le cas car apparemment, la GR est intervenue d’initiative. Alors que chargée de la protection du Président, on constate que la GR a réagi, en violation des prescrits légaux de réquisition des forces armées par la police ou l’autorité politico-administrative compétente, en s’intravertissant dans les missions traditionnellement attribuées à la police. De plus, elle a au cours des son intervention illégale, fait usage de façon disproportionnée de la violence en contravention des principes de la doctrine juridique connus sous la trilogie : légalité- opportunité (ou nécessité absolue) – proportionnalité.

Tout cela en grave violation des principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois adopté par le huitième congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants qui s’est tenu à la Havane du 27 août au 7 septembre 1990.

kinSelon l’activiste des droits de l’Homme et vice-président de la FIDH, Dismas Kitenge, interogé par la RFI : « A entendre les autorités congolaises, les attaques ont été sérieuses et c’est ce qui aurait poussé les forces de l’ordre à riposter. Mais cela ne suffit pas de nous dire que les attaques ont été sérieuses mais de pouvoir le démontrer. Comment le démontrer ? En présentant les armes que les assaillants ont utilisées ou encore en spécifiant de quelle nature étaient ces armes ». Il poursuit en soulignant qu’il serait également judicieux de savoir « qui a dit qu’il y a eu des armes blanches et que les forces de l’ordre ont répliqué avec des armes lourdes » avant de conclure qu’à l’heure actuelle « les réponses qui sont fournies par certains membres du gouvernement et certaines forces de sécurité nous paraissent insuffisantes. »

Un autre observateur a noté : « Je ne sais pas si vous aussi vous avez remarqué que tous les cadavres des pseudos ‘adeptes’ de Mukungubila que nous nous voyons sur les sites de la RTNC et de l’aéroport de Ndjili sont sans ceinture et sans chaussure (Pour la quasi totalité). Ceci me fait penser à la tenue vestimentaire carcérale kinoise. Car comme nous le savons lors des arrestations, le premier reflexe de nos policiers est  » Yo, longola sapatu, longola ceinture  » (Ndlr: Toi, ôtes tes chaussures et ta ceinture). Ce qui me conforterait la thèse d’un coup de théâtre orchestré par notre gouvernement pour liquider les jeunes Kulunas ».

Le droit international comme une des pistes des actions

En supposant que l’intervention de la GR rentre dans le cadre d’un conflit armé, nul n’ignore que le droit humanitaire international reconnait, à la fois, le jus in bello et le jus ad bellum, c’est-à-dire : le droit de la guerre ou plus exactement le droit dans la guerre, d’un côté et le droit à la guerre, de l’autre côté. En effet, le jus ad bellum tend à consacrer le droit presque illimité des Etats à faire la guerre tandis que le jus in bello essaie, au contraire, de limiter les effets collatéraux de la guerre. Le jus in bello ou le droit international humanitaire, réglemente la manière dont la guerre est conduite. Cette branche du droit vise à limiter les souffrances causées par la guerre, indépendamment de considérations qui motivent la justification de faire la guerre, ou aux motifs, ou encore à la prévention de la guerre, couverte par le jus ad bellum.

Le jus in bello renvoie à la notion de  « juste guerre » ou de « guerre juste ». Il s’agit d’une approche de la guerre conceptualisée par Thomas d’AQUIN pour qui une guerre est juste si elle remplit trois conditions : elle doit être décidée par une autorité légitime (qui ne peut être une personne privée, la guerre est du ressort de l’Etat), pour une juste cause (punir ou réparer une injustice), et elle doit être faite avec une « intention droite », c’est-à-dire dans la préoccupation du bien commun et non de son intérêt personnel. Peut-on admettre que ces trois critères ont été remplis dans l’intervention de la GR ?

Ainsi, la doctrine du jus in bello fait appel à des principes éthiques et des règles à respecter dans le cadre du droit international humanitaire dans le déroulement d’un conflit armé dans le but de limiter les souffrances causées par la guerre en assurant, autant que faire se peut, protection et assistance aux victimes de la guerre ainsi que la protection de leurs droits fondamentaux, qu’elles soient civiles ou militaires, alliées ou ennemies. Il traite donc de la réalité d’un conflit sans considération des motifs ou de la légalité d’un recours à la force. Ses dispositions s’appliquent également à l’ensemble des parties au conflit, indépendamment des motifs du conflit et de la justesse de la cause défendue par l’une ou l’autre partie. Le jus in bello vise à protéger la vie et la dignité humaine des personnes touchées pendant un conflit armé. Il s’agit d’un ensemble de règles internationales qui restreint les moyens et méthodes de guerre et protège ceux qui ne participent pas ou plus aux combats. Or nous avons vu des images des tués être répandues par la presse audiovisuelle nationale.

Toutefois, il y a lieu de distinguer le jus in bello du droit des droits de l’homme. Le premier n’intervient uniquement et exclusivement qu’en cas des conflits armés. Il ne remplace pas le droit des droits de l’homme, qui, lui, s’applique en tout temps. Ces deux ensembles de règles de droit sont complémentaires.

Ainsi, pendant un conflit armé donne, si telle était la justification des autorités congolaises, le jus in bello prévoit le respect formel de certaines règles. En voici quelques exemples :

  • Épargner les soldats (combattants ou assaillants ) qui se rendent;
  • Porter secours et soigner les blessés de guerre aussi bien des forces amies que des forces ennemies;
  • Ne pas exposer à la curiosité publique les images ou visages des prisonniers de guerre, sans leur consentement;
  • Ne pas livrer à la vindicte populaire les corps des cadavres des ennemis ou les prisonniers de guerre,…

Peut-on affirmer que ces règles ont été respectées ?

Les sanctions possibles en cas de violation de jus in bello

Une série de sanctions est prévue en cas de violation des dispositions du droit international humanitaire car la guerre n’est pas en dehors du Droit car on retrouve la dialectique permis/interdit.

  • Les rétorsions, c’est-à-dire, la réaction d’un belligérant aux actes illicites du belligérant adverse.
  • La mise en responsabilité internationale de l’État, c’est-à-dire, la réparation des dommages illicites causés par un État.
  • Sanctions pénales, c’est-à-dire l’obligation de réprimer les fauteurs de crimes internationaux.

La Cour Pénale Internationale est une des réponses actuelles de la volonté de la communauté internationale de sanctionner une série de crimes de guerre, génocide et autres crimes contre l’humanité commis en temps de guerre ou lors d’un conflit armé. Des crimes qui restent imprescriptibles. Cependant, à l’heure actuelle, la CPI est accusée de servir la  justice des puissants.

La loi de compétence universelle est également une autre piste à exploiter en Belgique, qui l’applique encore partiellement, dans le cadre de la loi du 5 août 2003 relative à la répression des violations graves du droit international humanitaire. Selon cette loi, d’une manière succincte, les juridictions belges sont compétentes, entre autres, pour connaître de ces infractions de ces deux cas (il y en trois au total) :

  • La victime de l’infraction est belge ou une personne qui, au moment des faits, séjourne effectivement, habituellement et légalement depuis trois ans en Belgique (article 10, 1° bis du nouveau titre préliminaire du Code de procédure pénale) (Compétence personnelle passive);

Commentaire DESC : Il faut comprendre ici la notion de victime dans son acception la plus large. D’un point de vue juridique, sont considérés comme  Victimes, en Belgique, toute personne et ses proches ayant subi un  dommage matériel, corporel et/ou moral résultant d’un acte punissable par la législation pénale.

  • Une règle de droit international, de source conventionnelle ou coutumière, liant la Belgique lui impose de poursuivre l’auteur de certaines infractions (article 12 bis du nouveau titre préliminaire du Code de procédure pénale) (Compétence universelle).

Ce sont des pistes à exploiter, malgré que le champ d’application de la compétence universelle soit donc limité à cette dernière hypothèse et le système de filtrage des plaintes mis en place pouvant amener  le procureur fédéral à toujours classer l’affaire sans suite dans certaines circonstances. Il faudrait que les organisations congolaises s’organisent pour recueillir un maximum de données sur les liens existant entre les assaillants et d’éventuels proches vivant en Belgique. Quelle que soit l’issue de la plainte, il s’agit ici de faire la pression qui pourrait déjà limité la liberté de certains acteurs politico-militaires susceptibles d’être poursuivis dans ce cadre).

La diaspora congolaise doit faire la pression auprès de la communauté internationale

C’est l’une des pistes évoquée dans un échange avec un analyste politique congolais de premier plan.

Il s’agit ici de cibler les acteurs potentiels capables de briser le comportement criminel du régime congolais. Parmi ceux-ci,  c’est ce que nous appelons communément « la communauté internationale » (Américains, Britanniques, Européens, ONU, multinationales, institutions et autres organisations internationales,…). Eux, qui ont si souvent orchestré les grands évènements au Congo, heureux et tragiques. Et l’analyste de préciser : «  je ne les vois pas ne pas se faire entendre après le massacre de 103 Congolais, visiblement planifié à leur insu, et l’assassinat d’un officier dans lequel ils avaient manifestement beaucoup investi, comme tu l’as signalé dans ton analyse relative aux premières investigations sur la mort du Colonel en parlant d’un soldat « formé à l’occidentale. Tout le monde a vu dans les hommes de Ndala une discipline et un calme qui trahissaient la « main professionnelle » des armées occidentales. Je ne peux pas croire que les « Blancs » qui se sont impliqués dans la formation de cet homme et de ses soldats vont considérer sa perte comme un non-évènement. Une piste qui rejoint celle développée par DESC lorsqu’elle comparait les événements du 30 décembre 2013  à l’affaire du « massacre du Campus de Lubumbashi » e, 1990 qui sonna le glas du régime Mobutu.

Il y a eu Chebeya-Bazana, il y a aujourd’hui le massacre de 103 jeunes et l’assassinat du colonel Ndala, pur produit du partenariat militaire belge en RDC. Pour rappel, l’engagement militaire belge se fait suivant une approche des 3D-LO (Defence, Diplomacy, Development, Law and Order), exigeant une approche holistique intégrée avec les Affaires étrangères et la Coopération au Développement. C’est le cas dans les projets Kindu et Lokandu qui sont liés à la formation des 321ème et 322ème bataillons des unités de réaction rapide (URR) dans la province de Maniema d’où est sortie Mamadou Ndala. L’assassinat de Ndala, n’est-il pas un indice de ce manque de volonté politique relevé dans différents rapports d’évaluation sur la réforme des FARDC, qui vise à saper les efforts de constitution d’une armée nationale et républicaine en RDC ? Faut-il encore combien de forfaitures pour que ceux qui assistent le régime congolais (mais pas ses populations) comprennent que le Rubicon est atteint ? D’autant que lorsqu’on voit la manière dont les soldats de Ndala ont pleuré jeur héros, tout porte à croire que son unité pourrait être démantelé pour éviter qu’elle venge son chef. Ce qui anéantirait les efforts entrepris par la Belgique dans le cadre de la RSS et remettrait en cause l’efficacité du programme du partenariat militaire ? D’autant qu’en 2012, le 321ème bataillon URR est restée stationnée à Kinshasa pour protéger le président en cas de soulèvement populaire au lieu d’être déployé à l’est pour combattre le M23 (Dr. Nina Wilén, Tintin is no longer in the Congo – A Transformative Analysis of Belgian Defence Policies in Central Africa[1], Royal Military Academy, Belgium, Dec. 2013)

« Bonjour,Je m’adresse à vous défenseurs de la paix et vous demande si vous êtes au courant du massacre qui s’est produit le 30/12/2013 à Kinshasa. Ces jeunes sont  appelés des « assaillants, des rebelles » etc… Mais en les voyant mort je me suis posée la question où sont les armes ensanglantés avec eux ? On nous montre les armes après alors que les témoins affirment que ces jeunes gens n’avaient pas d’armes. Je vous en supplie faite quelque chose en ce moment les familles de ces personnes sont en cavale et poursuivits. Il n’y a aucun respect de droit pour ces personnes. Promulguez la vérité de cette histoire pour vos frères congolais qui sont morts s’il vous plait où sont les droits de l’homme? Vos frères sont tués et vous n’avez pas le droit de sortir des mensonges faite quelque chose je vous en supplie. Ces hommes « assaillants » avaient vraiment des armes? Ils sont morts comme des poules juste parce qu’ils ont décidé de s’exprimer? ».

Si ces allégations d’un massacre orchestré par le pouvoir se confirment, nous pouvons avancer que nous ici face à ce qu’on qualifie de « terrorisme d’Etat« [2]

 DESC joint à la présente analyse le rapport d’enquête menée par un collectif d’organisations de la société civile à Lubumbashi. Veuillez ouvrir le lien suivant : Rapport d’enquête des événements de Lubumbashi

Jean-Jacques Wondo


[1] Despite the logistical problems, the formation of the 321st battalion was quickly considered a success, not only because it remained intact this time, but also because President Kabila decided to deploy it to Kinshasa, using it more as his personal guard to halt a presumed coup than the Rapid Reaction function it was supposed to fill.

[2] La terreur est une stratégie à la disposition d’un État dit voyou pour obtenir, à l’intérieur de son territoire, la passivité de la population, ou d’une partie de la population, dans le cadre d’une lutte contre-insurrectionnelle, ou anti-contestataire pour museler et neutraliser toute opposition politique. Au XXème siècle, cette stratégie a été couramment mise en œuvre par des régimes dictatoriaux d’Amérique latine et presque partout en Afrique. Les coups d’Etat montés en vue d’opérer des purges dans l’armée et les services de sécurité, les assassinats, les disparitions de personnes, l’usage de la torture, l’emploi d’ »escadrons de la mort » visait à ’sidérer’ une population. L’expression ’terrorisme d’Etat’ permet de qualifier l’usage par certains gouvernements d’organismes clandestins – ou organisations-écrans -, de groupes paramilitaires leur permettant de réaliser des actions violentes hors de la légalité, sans à en assumer les responsabilités et les conséquences. L’ex- « bataillon Simba » impliqué dans les assassinats de Chebeya-Bazana ou les éléments du 32ème bataillon de la GR commandé par le Général Mohindos Akili dit Moundos (soupçonné dans l’assassinat de Ndala) sont des illustrations de ces escadrons de la mort.

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