Jean-Jacques Wondo Omanyundu
POLITIQUE | 24-10-2013 19:28
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Déclaration des forces vives de la Diaspora : Les Concertations Nationales, Un emplâtre sur une jambe de bois

Auteur : Jean-Jacques Wondo Omanyundu

congo europe

DECLARATION DES MEMBRES DES FORCES VIVES DE LA DIASPORA CONGOLAISE DE BELGIQUE

Les Concertations Nationales de Kabila, Un emplâtre sur une jambe de bois

La République démocratique du Congo (RDC), notre Nation est toujours en péril. Seul un dialogue franc, honnête et crédible entre Congolais peut ressouder la fracture sociale grandissante entre les gouvernants kleptocrates et une population clochardisée. Cette  cohésion nationale fut rompue par les élections chaotiques de novembre 2011 et aggravée par la flambée des violences à l’est du pays et par la détérioration des conditions de vie des populations livrées à un pouvoir prédateur incapable de répondre efficacement à leurs   aspirations profondes.

Sur le plan politique, le constat est que notre Congo reste un État défaillant dirigé par un pouvoir à très faible leadership, marqué par une absence profonde de volonté politique de doter le pays des institutions républicaines et démocratiques où règnent la règle du droit et la bonne gouvernance.

Sur les plans économique, financier et du développement humain, la RDC présente un sombre tableau le reléguant davantage parmi les États les moins performants du monde, malgré la bonne croissance macro-économique conjoncturelle de 6% à 7% que lui fait profiter le secteur minier et dont la part au budget de l’État est inférieur à 15% alors qu’au début des années 1980, à production quasi égale, le même secteur contribuait pour plus de 60% du budget national Congolais.

Maplecroft Corruption Risk a publié le 24 septembre 2013 son classement annuel des pays les plus corrompus au monde. Sans surprise, la RDC a occupé la première marche du podium des pays les plus corrompus soit le 1er sur 197 pays observés. Encore plus intéressante est la conclusion tirée par Trevor Slack, senior corruption analyst à Maplecroft : « lorsque la corruption est très répandue, elle entrave aussi la démocratie, la primauté du droit, la protection des droits de l’homme et le développement économique. » (http://maplecroft.com/portfolio/new-analysis/2013/09/24/corruption-risk-index-reveals-long-term-lack-will-tackle-corruption-brics/

Le rapport « Doing Business 2013 » de la Banque mondiale classe la RDC à la 181è place sur 186 pays. La RDC a encore reculé d’une place par rapport à l’année 2012.

Fin août 2013, l’Africa Progress Panel (APP), organisation présidée par l’ex-secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan a fait état d’importantes fuites des recettes dans le secteur minier congolais. Selon ce Panel, 85% des minerais extraits du Congo échappent aux autorités fiscales. Selon PwC, s’exprimant sur la question, le cadre organique et institutionnel de l’administration des mines requiert donc de toute urgence de profondes réformes. 

Malgré une croissance économique conjoncturelle positive de 6 à 7%, l’ancien Gouverneur de la BCC, Jean-Claude Masangu, trouve qu’elle est très insuffisante pour conduire au développement du Congo : « Les insuffisances… ne permettront pas de réduire la pauvreté ». Sans nommer explicitement la mauvaise gouvernance et la corruption comme facteur de cette situation, Masangu prône la nécessité d’une bonne gouvernance générale de l’État au sens large tant au plan politique qu’économique, social, militaire, sécuritaire et diplomatique ; et  la lutte contre l’évasion fiscale, la corruption et l’impunité.

Pire encore, la RDC tire une fois de plus la queue (186e et dernier rang) du classement mondial 2013 de l’indice de développement humain publié chaque année par le Programme des Nations unies pour le développement(PNUD). Selon le PNUD, qui a confié à l’université d’Oxford son étude locale sur la pauvreté, 87,7 % de la population vivant en RDC est en dessous du seuil de pauvreté, fixé à 1,25 dollar par jour. Près des trois quarts des 68 millions de Congolais (74 %) vivent en dessous du « seuil de pauvreté multidimensionnel » qui tient compte de l’accès aux soins et de l’alimentation (cfr Rapport IDH 2013). (http://www.lemonde.fr/planete/article/2013/03/15/la-rdc-au-dernier-rang-de-l-indice-de-developpement-humain-du-pnud_1849284_3244.html)

Last but not least, l’Indice Mo Ibrahim sur la gouvernance en Afrique, qui analyse les performances en termes de politique de sécurité, d’économie, de droits de l’homme et de santé a classé le 14 octobre 2013 la RDC à l’avant-dernière place, soit 51ème (avec un indice de 31.3/100), juste avant la Somalie qui ferme la marche. Les analystes de Mo Ibrahim notent que la RDC réalise un score nettement en dessous de la moyenne africaine en termes de sécurité, de respect du droit, de développement humain, de développement économique et d’infrastructure.

Sur le plan sécuritaire, Dans son traditionnel discours annuel sur l’état de la Nation devant l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en congrès, le 15 décembre 2012, le président Kabila déclare de faire de la défense nationale la priorité des priorités : « Désormais, au-delà de toutes nos actions pour le développement, notre priorité sera la défense de la patrie avec une armée dissuasive, apolitique et professionnelle qui rassure notre peuple », en mettant l’accent sur la crise dans le Nord-Kivu et proposant une triple stratégie : Militaire-Diplomatique-Politique pour régler la crise dans l’est de la RDC. Dans ses vœux de Nouvel An 2013 adressés à la Nation le 31 décembre 2012, le chef de l’Etat congolais réitère le même vœu : « la réforme de l’armée est une des priorités du Gouvernement ».

En réponse à ses promesses, le président Kabila publie le 7 juillet 2013 des ordonnances présidentielles nommant une centaine de généraux, majoritairement originaires de l’Est du Congo, faisant passer leur effectif de 72 à 181[1], au moment où la structure de commandement des FARDC est décriée pour sa défaillance[2]. Le chef de l’Etat congolais a également publié des ordonnances de mise en exécution de la loi organique nº 11/012 portant organisation et fonctionnement des FARDC promulgué depuis le 11 août 2011 et de la loi n° 13/005 portant statut du militaire des FARDC promulguée le 15 janvier 2013. Sur le terrain militaire, aucun progrès significatif ne semble constaté.

Le M23 continue à consolider son administration et à renforcer ses positions militaires, en s’équipant avec l’aide des généraux FARDC qui détournent des matériels militaires destinés aux FARDC au profit du M23. Les incessantes recommandations de la société civile du Nord-Kivu demandant au président Kabila de privilégier l’option militaire, à la suite du constat d’échec des options politiques et diplomatiques visant essentiellement la réintégration pure et simple des rebelles de la force négative du M23 au sein des FARDC, restent à ce jour sans réaction du président Kabila.  

C’est avec effarement que nous avons constaté que le point relatif à la réforme de l’armée, censée être le thème principal des « concertations nationales », selon la formule de Kabila du fait de la situation sécuritaire, a été un des sous-thèmes de la commission DDR (Désarmement – Démobilisation – Réinsertion) qui est une conséquence de l’échec des réformes infructueuses initiées depuis 2003, soit dix ans déjà. Des réformes sous forme de  brassage, mixage et intégration des rebelles au sein d’une armée devenue une armée des milices dépourvue de tout caractère républicain. Cette commission DDR, selon plusieurs participants interrogés, regroupait d’ailleurs plus de profanes, choisis aléatoirement sur base d’aucun critère de leur connaissance de ce thème très sensible, que de vrais experts et professionnels de la question de la défense et sécurité.

Depuis l’Ituri où sévit principalement l’ADF-Nalu alliée aux Shebab, qui viennent d’endeuiller le Kenya, jusqu’au nord du Katanga où les séparatistes Bakata-Katanga font la loi, Steven Spittaels de l’IPIS (International Peace Information Service – Anvers, Belgique) répertorie pas moins de 50 groupes armés qui échappent au contrôle total de l’autorité de l’Etat en RDC.

Sur le plan humanitaire, Human Rights Watch note que La RDC, notre Nation est toujours en péril et présente les symptômes d’un État moribond. (Mapping, Cour des Comptes).Les violences sexuelles commises contre les femmes érigent la RDC en capitale mondiale du viol. L’ONG Heal Africa a rapporté que 2.517 personnes (2.339 femmes et 178 hommes) ont survécu aux violences sexuelles au Nord-Kivu au premier semestre de 2012. Le Rapport du Bureau conjoint de l’ONU aux droits de l’homme en RDC – 8 mai 2013 – a fait état d’au moins 97 femmes et 33 filles (dont filles de 6 ans) qui ont été violées par les FARDC au Nord-Kivu (à Minova), en l’espace de 2 jours, lors de la débandade en fin Novembre-début Décembre 2012, face au M23, des éléments du 391e bataillon formé par les Etats-Unis en 2010 pour devenir un « modèle pour la réforme à venir des FARDC », selon le Commandement américain de l’Africom (Le Monde, 8/05/2013). « Les soldats des FARDC pénétraient dans les foyers, généralement en groupes de trois à six, pillaient tout ce qu’ils pouvaient trouver. (…)  un ou deux  soldats partaient avec leur butin et un autre au moins faisait le guet pendant que le restant des FARDC violaient les femmes et les filles dans la maison. La plupart des victimes étaient violées par plus d’un soldat », peut-on lire dans ce rapport.

Par-delà ces viols massifs innommables, c’est la cellule de base de la nation, la famille, qui est détruite. En effet, la cohésion des familles s’en trouve fragilisée et le tissu social s’effrite du fait du rejet et de l’abandon dont ces femmes violées sont victimes. Heureusement que dans ce pays qui suscite la « Congo-fatigue » de la part de la Communauté internationale, un brave et digne fils de la Nation, le Docteur Denis Mukwege et d’autres anonymes, s’activent loin des caméras du monde et sous un silence complice de l’Humanité pour redonner la vie et l’espoir à toutes ces femmes brisées par la barbarie infrahumaine. Dans la plupart des cas, les auteurs de ces crimes sont des hommes rwandophones affirme-t-il. D’où l’appel sans cesse renouvelé pour la mise sur pied d’un Tribunal spécial pour la RD Congo afin de juger tous les crimes commis et sanctionner les auteurs desdits crimes qui ne doivent jamais rester impunis.

L’ampleur du drame humanitaire au Nord-Kivu est telle que l’on a recensé plus de 702.000 déplacés au 31 mars 2013. La Province du Sud-Kivu, quant à elle, continue d’être affectée par l’insécurité résultant des activités des groupes armés et des opérations militaires subséquentes, et par les tensions intercommunautaires. A cela, il faut ajouter d’autres catastrophes humanitaires, causant davantage des morts dans les zones non touchées par la guerre du fait du délabrement très avancé du tissu socio-médical et des infrastructures dans les zones les plus reculées de toutes les autres provinces du Congo.

Enfin, le Secrétaire général de l’ONU, Ban-Ki-Moon a présenté en octobre 2013 au Conseil de sécurité un rapport d’étape sur la mise en application de l’accord-cadre d’Addis-Abeba, signé en février 2013 par onze pays. http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/2013/569) Ce rapport fait notamment état de nouveaux déplacements de population, à l’intérieur et à l’extérieur des frontières du pays, ce qui porte à plus de 3 millions le nombre de Congolais déplacés internes ou réfugiés. Les provinces du Nord et du Sud Kivu représentent 65 % des 2,6 millions de déplacés internes actuellement recensés au Congo. A ce chiffre, il faut ajouter plus de 440.000 Congolais réfugiés dans les pays frontaliers, dont 150 000 en Ouganda, le pays qui en accueille le plus, suite notamment à une arrivée massive de 66 000 personnes en juillet 2013. Les autres pays accueillant des réfugiés congolais sont la Tanzanie (63.000), le Burundi (45.000) le Congo-Brazzaville (44.300), le Sud-Soudan (18 500) et la Zambie (15 000).

Sur le plan judiciaire, nous saluons en toute honnêteté la promulgation le 15 octobre 2013 de la loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle. Le vrai défi sera de voir les critères qui seront pris en compte dans la désignation des magistrats devant y siéger, la qualité des hommes choisis et leur faculté à dire le droit en toute indépendance de l’influence du pouvoir exécutif. Il sied de rappeler qu’en juin 2013, le président Kabila a nommé et promu plusieurs magistrats du siège et du parquet sur base des critères jugés clientélistes, sur base de leur appartenance aux sphères ethno-régionale et politique présidentielles, et beaucoup moins sur base de leur mérite particulier. Ce qui pose le problème de leur indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif. L’indépendance du pouvoir judiciaire est devenue ainsi un principe vidé de toute sa substance. La justice continue à fonctionner à la carte et ne joue plus son rôle démocratique républicain de lutter contre l’impunité, ni de réguler l’ordre social. Les opposants politiques et autres contestataires du pouvoir en place continuent de subir la traque policière et judiciaire d’une justice politique fonctionnant à double vitesse. Par ailleurs, la sécurité juridique reste de moins en moins garantie dans la pratique. Ce qui dissipe, jour après jour, l’espoir d’éclosion d’un État de droit au Congo.

Sur le plan des droits humains et libertés des citoyens garantis par la Constitution, on constate une détérioration inexorable de la situation dans l’ensemble du pays.La RDC demeure un pays non libre. Il ressort du rapport 2012 de l’ONG Journaliste en danger que l’assassinat du journaliste Kambale Musonia a été perpétré pour des mobiles politiques. En outre, on a répertorié 42 arrestations arbitraires, 57 cas de menaces et d’agressions, 43 cas de censure et entrave à la circulation de l’information, ainsi que 17 cas de pression sur les médias. Les activistes des droits de l’Homme et les opposants sont constamment traqués, malgré les vaines recommandations des concertations. Beaucoup sont contraints de vivre dans la clandestinité. En même temps, le pouvoir en place glisse dans l’ordre du jour des débats de l’actuelle session parlementaire, la question de l’amnistie des rebelles ayant commis des crimes de guerre et des droits humainsdans les zones sous leur contrôle.

Sur le plan social, on note qu’en RDC, le taux d’accès des populations à l’électricité est d’1 % en milieu rural, de 30 % pour les villes et 6 % sur le plan national alors que la moyenne en Afrique subsaharienne est 24,6 %. Et pourtant la RDC dispose d’un potentiel hydroélectrique de taille mondiale. En revanche, le taux de desserte en eau potable se chiffre à 29% pour l’ensemble du pays. (http://lepotentielonline.com/site2/index.php?option=com_content&view=article&id=3327:les-quartiers-kamba-mulumba-et-ngiesi-dotes-de-reseaux-d-adduction-d-eau-potable&catid=87:economie&Itemid=474&lang=en)

L’éducation, l’habitat, le transport, le droit à un salaire conforme à la dignité humaine et à une retraite décente, la sécurité sociale et les soins de santé ne sont pas la priorité des gouvernants congolais dont le seul objectif reste l’enrichissement personnel illicite. Le tissu médical est en totale décadence et l’on note la résurgence des épidémies autrefois éradiquées en RDC. L’ONG Save the children avait publié le 7 mai 2013 un rapport classant la RDC à la dernière place d’une liste de 176 pays suivant l’indice des mères qui meurent à l’accouchement. Une femme ou une fille congolaise sur 30 risque de mourir en raison de problèmes liés à la maternité, notamment au moment de l’accouchement, a poursuivi ce rapport. Enfin, la RDC compte sept millions d’enfants déscolarisés, soit 10% de la population congolaise estimée. Ceci est une grave catastrophe socio-humanitaire qui se profile à l’avenir.

La politique autocratique et kleptocratique, obstruant toute perspective de mise sur pied d’un Etat démocratique et de droit en RDC fondée sur le principe de bonne gouvernance, l’absence de progrès socioéconomiques et les sombres perspectives politiques, sécuritaires, juridiques et judiciaires dans les différents secteurs que nous venons de passer au crible, a fini par confiner la majorité des Congolais de la diaspora dans le rôle de contestataires des autorités congolaises.

Cette diaspora congolaise, s’indigne du fait que forte de sa contribution substantielle, via les transferts de fonds aux familles et aux proches vivant en RDC, estimé en 2011 à une somme de 9,3 milliards de dollars US soit 45 % du PIB congolais et 950 % de l’aide publique au développement, s’érige désormais en une force sociale, économique et politique dont la voix au profit des sans voix Congolais embastillés au Congo doit plus que compter. L’argent ainsi reçu contribue entre autres à la construction de 60 % des infrastructures et à l’envoi de 4 enfants Congolais sur 10 à l’école  selon le magazine Afrique Renouveau de la Banque mondiale. En réalité, le montant exact de ce flux financier est encore plus important car « la plus grande partie des sommes qu’envoient les émigrés congolais n’est pas comptabilisée et n’est donc pas prise en compte dans les statistiques de la Banque africaine de développement (BAD) et de la Banque mondiale etc.»  (http://fr.allafrica.com/stories/201211100760.html)

Comme mentionné tout en haut de la présente déclaration, la cohésion nationale est un impératif qui s’impose à Monsieur Kabila à la suite de la crise de légitimité de son pouvoir et des animateurs issus des scrutins frauduleux de 2011 et décriées de toutes parts, qui ont eu pour conséquence d’éroder leur légitimité, ébranlant de ce fait la cohésion nationale nécessaire à une gestion apaisée des institutions de la République.

Dans ces conditions, toute autorité prétendue ne relève plus que de la force, de l’intimidation, d’un coup d’état de fait. Le principal ressort de ce coup d’état consiste à progresser, notamment en convoquant des « concertations taillées sur mesure » comme si de rien n’était, dans les tâches qui suivent normalement une élection et à mettre le pays et le monde devant le fait accompli. Un tel pouvoir déflationniste, sans ressort populaire, ne peut se maintenir que par le recours aux moyens coercitifs et abusifs tels que : la monopolisation des médias, les répressions policières illégales des manifestations populaires contre le régime, les intimidations, les arrestations arbitraires, la corruption généralisée, le clientélisme et l’ethno-régionalisme. Ici encore, suite à la répression brutale dont la population congolaise a été l’objet de la part de multiples services de sécurité inféodés au pouvoir de Kinshasa, la diaspora congolaise du monde entier s’est élevée pour dénoncer ces pratiques autocratiques, totalitaires et répressives du pouvoir non légitime de Kinshasa.

Pour justifier ses concertations nationales, Monsieur Joseph Kabila déclarait le 15/12/2012 devant le Congrès ce qui suit : Comme État et comme Nation, hier comme aujourd’hui, face à l’épreuve de la guerre, la cohésion nationale a été et demeure la condition de notre survie, le bouclier le plus sûr contre toute velléité de balkanisation et de destruction » ;

Il y a lieu de signaler que les attaques terroristes subies par les Etats-Unis  le 11 septembre 2001 n’avaient aucunement obligé les autorités américaines à organiser un dialogue national. Cela d’autant plus que le mandat reçu du peuple comprenait expressément la défense du pays contre les attaques extérieures et/ou terroristes. Tout le peuple américain s’est, dans une cohésion avec ses dirigeants et leur armée, soudé avec son Gouvernement  dans la croisade lancée contre les forces terroristes qualifiées à l’époque de l’axe du mal.

Aujourd’hui, la RDC est également confrontée à une attaque terroriste qui ne dit pas son nom (M23) cfr rapports des Nations Unies. Le Chef de l’Etat congolais a fait l’objet de virulentes attaques de la part de certains politiciens et parlementaires et les populations du Nord-Kivu qui sont allés jusqu’à l’accuser de connivence avec ces forces négatives. En principe, un chef régulièrement élu et qui exerce un pouvoir légitime n’a pas besoin de dialogue et/ou concertations nationales pour réaliser la cohésion nationale nécessaire à la résistance aux attaques terroristes. Il est démontré dans l’Histoire des nations que quel que soit le type de régime, la guerre a toujours été une occasion de renforcer la cohésion animique spontanée Etat-Nation-Armée. Nous l’avons vu en août 1998 lorsque le feu Laurent-Désiré Kabila a lancé l’appel à la défense de la nation au moment de l’agression du Congo par le Rwanda via l’ancêtre du M23, le RCD-Goma. La population kinoise n’a pas attendu la convocation des concertations nationales pour se ranger, comme un seul homme, derrière le Mzee, alors impopulaire sur le plan interne, pour mettre en déroute les agresseurs rwandais.

Conscient du fait qu’il est un président « mal élu » (MF Cros, Kabila, président affaibli, La Libre, 01/02/2013) (http://www.lalibre.be/actu/international/kabila-president-affaibli-51b8f836e4b0de6db9c96feb), Monsieur Kabila, confronté à un déficit de légitimité, se servirait de l’alibi de la guerre pour rechercher la cohésion nationale au travers d’un dialogue national pour obtenir la légitimité qui lui fait défaut et qui plombe l’action de son gouvernement.

Attendu que la Guerre à l’Est du Congo est un épiphénomène à la crise de légitimité ;

Attendu que ces concertations nationales ont été boycottées par les deux principaux leaders de l’opposition Congolaise, Monsieur Étienne Tshisekedi et Monsieur Vital Kamhere, car ne répondant pas au souci de rétablir la cohésion nationale rompue en 2011 en plus de violer l’esprit et la lettre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba et de la résolution 2098 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies et que les dites concertations se sont déroulées dans l’indifférence totale des populations nationales ;

Vu les engagements souscrits par le gouvernement de Monsieur Kabila de se conformer aux prescrits de l’Accord-cadre signé le 24 février 2013 à d’Addis-Abeba et à la Résolution 2098 du Conseil de Sécurité du 27 mars 2013 qui exigent : « la tenue, avec les bons offices de l’Envoyée Spéciale et du Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies, d’un dialogue politique transparent et sans exclusive entre toutes les parties prenantes congolaises en vue de favoriser la réconciliation et la démocratisation et encourager l’organisation d’élections provinciales et locales crédibles et transparentes » ;

Attendu qu’après ces concertations la RDC reste invariablement confrontée à une grave crise légitimité couplée d’une crise de « Leadership » ;

Nous, les forces vives de la diaspora congolaise, sommes conscients, que le processus de mise en place d’un cadre de dialogue, voulu par tous, autour de la cohésion nationale représente une nouvelle opportunité historique décisive qui pourrait être salutaire pour la République démocratique du Congo à condition qu’on y aille dans un souci d’écrire TOUS ensemble les plus belles pages de l’avenir du Congo.

Nous sommes conscients que le besoin d’un dialogue national en vue de la recherche de la cohésion nationale est en lui-même l’aveu de l’existence d’un problème majeur hypothéquant la survie de la nation toute entière.

Nous déclarions que les concertations nationales telles que convoquées par l’ordonnance de Monsieur Joseph Kabila, ab ovo, étaient viciées en ce que l’autorité qui les a convoquées, a manœuvré pour tenir de bout en bout ces assises sous son contrôle absolu.

Nous attirions déjà l’attention de l’opinion publique nationale et internationale sur l’échec des concertations, qui se profilait à l’horizon au cas où leur convocation ne répondrait qu’à des mobiles de partage du pouvoir entre la mouvance politique présidentielle et une frange de vagabonds politiques infiltrés dans la pseudo-opposition, la diaspora et la société civile.

Nous constatons que la convocation par Monsieur Kabila de ses concertations nationales autour de la cohésion nationale n’était pas dictée par une réelle volonté de changement mais bien pour des raisons politiciennes, en ce que tout a été subtilement mis en œuvre pour qu’elles soient non inclusives dans le choix unilatéral par le pouvoir (du quota) des délégués à ces assises, excluant des acteurs politiques hostiles au pouvoir et une diaspora exigeante. Une situation qui confère de plus un caractère illégitime aux concertations visant tacitement à conférer la légitimité à un pouvoir illégitime, du fait la cohésion recherchée en vain.

Nous constatons que ces concertations se sont déroulées sans tenir compte des recommandations objectives et constructives que nous avons formulées lors de notre déclaration du 15 août 2013 : (http://www.congoindependant.com/article.php?articleid=8246) ou (http://lepotentielonline.com/site2/index.php?option=com_content&view=article&id=2380:les-forces-vives-de-la-diaspora-congolaise-de-belgique-posent-des-prealables-a-leur-participation-aux-concertations-de-kinshasa&catid=90:online-depeches&lang=en)

Nous déclarons, du fait de leur illégitimité susmentionnée au regard de leur déroulement, que ces concertations manquent à leur tour de crédibilité. Les recommandations qui en ont découlé auraient bien pu être faites par les commissions mixtes des chambres du Parlement.

Après ces concertations, nous posons publiquement la question suivante : Quel est l’état de la nation après ces concertations ? Mieux qu’auparavant ? Ces concertations ont apporté la preuve que la paix à l’Est ne dépend pas du tout d’une cohésion nationale rafistolée de toutes pièces. La cohésion ne se décrète pas, elle se construit démocratiquement par un franc dialogue permanent entre les acteurs politiques, les gouvernants et les citoyens.

Nous constatons avec regret que le seul mérite de ces concertations de Monsieur Kabila a  été d’opérer une reconfiguration de sa mouvance politique en élargissant sa base politique avec l’inclusion des quelques individualités politiques de l’opposition en quête de partage du pouvoir pour satisfaire leurs besoins physiologiques primaires. Des opposants factices appâtés par la politique du ventre creux qui intégreraient un gouvernement dont le parlement, censé contrôler son action, reste verrouillé par une majorité mécanique nommée frauduleusement dans le dessein d’opérer un ultime coup d’Etat constitutionnel au terme du mandat présidentiel illégitime de Kabila. D’où notre questionnement quant à la marge de manœuvre d’un tel gouvernement qui devra rendra des comptes devant un parlement illégitime ne reflétant aucunement la cohésion nationale dans sa composition.

Nous sommes en droit de nous poser cette question : A quoi auront servi ces concertations dont les résultats étaient connus d’avance? Sans attendre les recommandations des concertateurs M. Kengo avait déclaré avant la tenue de ces assises qu’elles aboutiront à la mise en place d’un gouvernement d’union nationale que Monsieur Joseph Kabila vient de confirmer dans son allocution du 23 octobre 2013. Comment dès lors résister à la tentation de considérer ces fameuses concertations comme une simple caisse de résonance des décisions politiques pré-élaborées dans les officines présidentielles afin de leur donner un semblant de solennité?

Nous prenons note de la volonté du pouvoir de Kinshasa de n’organiser les prochaines élections qu’après la tenue d’un recensement général de la population. A cet égard, nous nous appuyons sur une récente déclaration de l’Institut National des Statistiques (INS) estimant la durée de cette opération à 3 ans. Signalant que cette opération pourrait bien être réalisée en 4 semaines, nous affirmons que le pouvoir a trouvé dans cette opération un excellent subterfuge pour se maintenir aux affaires jusqu’au moins en 2018. La mise en exécution de ce schéma serait une grave atteinte à la démocratie, et viderait l’article 70 de la constitution de la République de toute sa substance.

Nous tenons à rappeler à l’opinion publique tant nationale qu’internationale que les élections de 2006 et 2011 ont bien pu se tenir sans que ce recensement de la population n’ait été organisé alors qu’une importante frange de la population l’exigeait.

Nous rejetons le fait que le pouvoir s’excipe de la faiblesse de sa propre gouvernance pour éviter ou retarder la tenue des élections, et ce en vertu de l’adage juridique Nemo auditur propriam turpitudinem allegans. (Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude). Ni le peuple ni l’opposition ne sont responsables de la non tenue des élections de manière transparente, crédible et régulière ni de l’absence de recensement général.

Nous réaffirmons notre détermination à apporter notre contribution patriotique en vue de l’instauration au Congo un ÉTAT de DROIT où règnent la primauté du droit, le respect de la propriété privée, le respect du caractère sacré de la vie humaine, où les services de sécurité et renseignements ne sont pas des organes de répression, où règnent la liberté d’expression et de mouvement ; où est garantie l’indépendance du pouvoir judiciaire ;

Eu égard à l’adage juridique « fraus omnia corrumpit »,

Nous, les forces vives de la diaspora congolaise de Belgique, après analyse des recommandations des concertateurs et des discours de Monsieur Kabila, réitérons toutes les termes de dernière déclaration qui exigeait notamment :

Ø  Le respect de l’esprit et la lettre de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba du 24 février 2013 ainsi que de la Résolution 2098 du Conseil de sécurité du 27 mars 2013 ;

Ø  Une facilitation africaine neutre  et la mise sur pied d’un mécanisme de suivi animé aussi bien par les parties prenantes que par la communauté internationale ;

Ø  La libération sans condition de TOUS les prisonniers politiques et d’opinion en vertu de l’article 87 de la constitution ;

Ø  L’engagement solennel par Monsieur Joseph Kabila, lors d’un discours officiel solennel  et sa famille politique de ne pas toucher à l’article 220 de la constitution ni toutes les dispositions intangibles ; mais aussi de quitter le pouvoir au terme de son échéance de 2016, quelle que soit la configuration politique que prendra le pays ;

Ø  La décrispation de la tension politique bipolarisée entre l’Opposition rangée principalement autour de Monsieur Etienne Tshisekedi et la majorité présidentielle constellée autour de Monsieur Joseph Kabila ;

Ø  La lutte contre l’impunité, l’instauration d’un Tribunal spécial pour la RDC ;

Ø  La réforme en profondeur des institutions d’appui à la démocratie et l’Etat de droit (CENI, Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de Communication : CSAC) ;

Ø  Le retour à une élection présidentielle à deux tours dans le souci, comme le voulait le Constituant de 2006, de permettre « au futur président de la République d’être toujours élu par une majorité absolue d’électeurs et, donc, de bénéficier d’une légitimité incontestable afin qu’il dispose d’une base la plus large de légitimité, aussi bien juridiquement que politiquement et sociologiquement.

De même que l’exigence du dialogue s’est imposée à des moments clé de notre histoire. En 1960 avec la table ronde de Bruxelles devant ouvrir la voie à l’Indépendance. En 1990 lorsque la Conférence Nationale Souveraine est devenue incontournable à Mobutu, malgré des formules rhétoriques de contournement, identiques à celle des « Concertations nationales » de Monsieur Kabila, utilisées par le régime de l’époque pour bloquer les aspirations profondes d’un Peuple harassée par des décennies de dictature. De même, nous invitons Monsieur Kabila à bien lire et comprendre les signes du temps et à convoquer sans atermoiements, dans le souci de rétablir et consolider la cohésion nationale rompue du fait de son élection frauduleuse en 2011, un Véritable Dialogue Franc entre Congolais,  dépourvu de tout calcul politicien en vue de répondre aux aspirations nobles d’un Peuple fatigué à nouveau par le mirage démocratique né des illusions des urnes de 2011 et de l’insécurité permanente qu’il peine à juguler depuis son arrivée au pouvoir en 2001. C’est à cette seule et unique condition que vous pourriez, Monsieur le Président, espérer une sortie honorable du pouvoir et de la scène politique.

Pour les forces vives de la Diaspora

Me Laurent MUTAMBAYI, LL.M                                                    Jean-Jacques WONDO OMANYUNDU

Juriste                                                                                          Politologue et Criminologue     

Fait à Bruxelles, le vendredi 24 Octobre 2013

Pour lire la version PDF de la déclaration cliquez sur :

DECLARATION DES FORCES VIVES DE LA DIASPORA CONGOLAISE


[1] Six  généraux d’armée, six lieutenants-généraux, 35 généraux-majors et 124 généraux de brigade.

[2] Willame, J.C., in Puissances d’hier et de demain. L’Etat du monde 2014, La Découverte, Paris, 2013, p.227.

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