L’Assassinat de Ndala : A qui profite le crime ? La piste Monusco-Fardc – JJ Wondo
La mort du colonel Ndala continue de susciter des vagues de réactions en tous sens. Certains se sont permis de profaner l’image de ce vaillant officier dans le but de juguler et de saper le moral des congolais qui ont trouvé en Ndala un point de repère du réveil patriotique national constaté ces derniers temps au Congo et dans sa diaspora. Et c’est de bonne guerre. C’est sans doute dans cette optique qu’il faudrait interpréter l’analyse de Laurent Touchard dans son article intitulé « Mamadou Ndala, l’homme au-delà du mythe » (Jeune Afrique, 13/01/2014). Un article qui avance que « la vie du colonel Mamadou Ndala, qui symbolisait le renouveau de l’armée congolaise face aux rébellions de l’est de la RDC, n’a pas été marquée que par de hauts faits d’armes ». Pour l’auteur, « Mamadou Moustapha Ndala. Ce nom est entré au Panthéon de l’Histoire de la République démocratique du Congo. Les réussites militaires et l a fin tragique de Mamadou Ndala construisent une légende dont a désespérément besoin la RDC. Cependant, derrière les statues figées des légendes se cachent toujours des réalités plus complexes. »
Pour tenter de cerner les motivations qui sous-tendent l’article de M. Touchard, DESC s’est amenée à se poser la question suivante : Pourquoi cette diatribe insidieuse juste au moment où les congolais n’avaient pas encore levé le deuil de leur jeune Héros, le colonel Mamadou Ndala, assassiné à fleur de l’âge, à 35 ans comme cet autre Grand Héros Congolais, Lumumba, dont on commémore l’assassinat ce jour du 17 janvier ?
Une tentative de réponse se trouve dans cet extrait tiré de l’ouvrage Les Armées au Congo-Kinshasa : « Au Congo, tout se met lentement en marche pour amener l’ensemble de la population à un « brainwashing » collectif et national consistant à détourner son attention de l’essentiel : ne plus honorer collectivement ses vaillants filles et fils les plus méritants… Ainsi, tout est mis en place pour brouiller tout repère à la mémoire identitaire collective congolaise sacrée, symbole de la cohésion nationale d’un État normalement constitué. Le Congo devient un pays qui perd tout sens du « sacré » ; avec un peuple qu’on amène insidieusement à se dépouiller de son passé pour applaudir ceux qui le déciment. »
Pour revenir aux mobiles de l’assassinat de Ndala,M. Boniface Musavuli nous livre ici quelques pistes intéressantes dans la question « RD Congo – Rwanda : Qui veut la fin de la guerre du Congo ? » Et l’analyste d’avancer, dans un article prophétique où il évoquait déjà la possibilité d’assassinat de Ndala, quatre pistes.
« ‘Battez-vous juste un peu, mais n’allez pas jusqu’à la victoire finale’ … Pourtant le conflit était en train de trouver une issue appropriée : militaire. Pour la première fois depuis longtemps, on a vu des soldats congolais très disciplinés, le moral haut, équipés et enchaînant des victoires sur un « ennemi » longtemps présenté comme invincible. Le commandant des opérations, le colonel Mamadou Ndala, devenu très populaire, traduisait dans les actes la promesse de venir à bout des combattants du M23. Tout d’un coup, on apprend qu’il est relevé de ses fonctions et rappelé à Kinshasa. L’information est démentie, mais il y a des démentis qui sonnent comme la confirmation de l’information initiale. C’est une pratique courante au Congo. Les officiers qui se distinguent au combat sont rapidement neutralisés et disparaissent de la circulation. Le cas resté dans la mémoire des Congolais est celui du général Mbuza Mabé qui, en 2004, a tenu tête aux combattants rwandais menés par le colonel Jules Mutebutsi et le général Laurent Nkunda dans la ville de Bukavu. L’officier fut rappelé à Kinshasa et mourut à Kitona dans des conditions restées floues. C’est probablement le sort qui attendait le colonel Ndala et qui a provoqué la colère de la population à Goma qui, depuis, manifeste contre le régime de Kabila et la Mission de l’ONU au Congo qui semblent s’accommoder de la poursuite du conflit, et ils ne sont pas les seuls. Il y a ainsi, indiscutablement une question qui doit donner lieu à un débat franc, au Congo et ailleurs : « Qui a intérêt à ce que la guerre du Congo s’arrête de sitôt ? » La Monusco ? Joseph Kabila ? Le Rwanda ? Les multinationales ?… Les Congolais ? (http://afridesk.org/rd-congo-rwanda-qui-veut-la-fin-de-la-guerre-du-congo-b-musavuli/).
C’est la piste MONUSCO qui nous intéresse dans cette analyse pour la simple raison que la guerre au Congo rapporte et devient un business pour certains casques bleus comme je le mentionnais dans une analyse : « Comment faire de sorte que les 3.069 hommes de cette force deviennent effectivement des victimes propitiatoire de la cause sacrée congolaise, prêts au sacrifice suprême, alors que leurs collègues FARDC vont sans doute continuer à revendre armes et munitions aux groupes à éradiquer ? Ou que leurs homologues indiens, sénégalais, pakistanais, canadiens ou guatémaltèques poursuivront en même temps leurs business lucratifs dans le même eldorado minier qui, paradoxalement, sera transformé en même temps en une zone de bataille ? N’y a-t-il pas risque de collision possible entre ces éléments de l’ONU qui vont poursuivre des objectifs antinomiques ? Les uns au fourneau pour éradiquer les forces négatives et les autres au soleil tropical des bords des Lacs ou dans les collines de Virunga profitant du ‘club med’ militaire grassement rémunéré ? » « N’y a-t-il pas là risque de voir se profiler le spectre de l’enlisement vécu en 2000, qui a vu les différentes armées africaines venues s’affronter au Congo, s’affairer dans une juteuse économie de guerre par l’instauration d’un dispositif de déprédations des richesses naturelles de la RDC ? » (http://afridesk.org/la-resolution-2098-de-lonu-ou-leffondrement-du-monopole-de-letat-congolais-analyse-dun-petard-mouille-deuxieme-partie-jean-jacques-wondo/)
C’est ce que je relevais également dans l’ouvrage ‘Les Armées au Congo-Kinshasa’ en ces termes : « Dans le Rapport parlementaire dit « Lutundula » produit par la Commission d’experts du Parlement congolais sur la validité des contrats signés durant les deux guerres, mise en place en 2004 et présidée par le député Christophe LUTUNDULA Apala, il est écrit : « Le carnaval minier qui s’en suivra ne manquera pas de rappeler l’Afrique des comptoirs d’avant la colonisation ». C’est effectivement dans cette macabre kermesse que continuent de vivre les populations de l’Est de la RDC, dans l’indifférence bienveillante des autorités nationales, partie prenante de cette rente minière mafieuse et sous l’œil indolent d’une MONUSCO dont certains éléments ont tiré d’importants bénéfices financiers de ce business, d’après certains témoignages recueillis auprès d’une agent de la Gendarmerie Royale Canadienne en poste au Nord Kivu et un ancien casque bleu sénégalais… D’ailleurs l’article du journal en ligne Seneweb, daté du 29/10/2012, met en lumière ce qui semble un secret de Polichinelle : « Des zones d’ombre entourent la mort du gendarme sénégalais Sadio Faty, décédé le 06 octobre 2012 par la mission des Nations Unies et décide de porter l’affaire en justice. La famille Faty accuse les supérieurs de la mission onusienne d’avoir tué leur fils qui avait accusé ces derniers d’avoir volé de l’or. ». Lire aussi : http://afridesk.org/quand-lintervention-militaire-et-laide-humanitaire-deviennent-un-fond-de-commerce-rentable-pour-la-monusco-et-les-ong/
Le nerf de la guerre au Congo reste l’argent ou le business
C’est ainsi que nous avons voulu développer la piste d’une possible complicité de la MONUSCO, sinon de sa passivité. Une sorte d’implication de la MONUSCO par omission sur base d’un témoignage recueilli d’un témoin oculaire clé qui était sur les lieux du drame pendant les faits d’autant que certains indices nous laissent sans réponse.
D’après les dernières informations recueillies de Beni, on nous confirme que le Quartier General de la MONUSCO-BENI est situé à moins de 2 km du lieu où le colonel Ndala a été abattu. Cependant, les Casques bleus y sont arrivés les derniers. Une attitude indolente constatée également en 2007 lors de l’attaque de la résidence du sénateur Jean-Pierre Bemba par les éléments de la garde républicaine commandés par le général Moundos[1] (de son vrai non Mohindos, un Hunde du Nord- Kivu) auxquels le bataillon simba de Numbi est venu en renfort. Là aussi, la MONUC qui était casernée à Ndolo, à moins de 7 Km de la résidence de Bemba, traina ses pieds pour s’interposer . Cela amena un analyste à s’exclamer : « Même un dromadaire serait arrivé plus vite que la MONUC ».
Un témoin, habitant dans la commune de Mulekera dans la ville de Beni, qui a assisté à l’attaque du véhicule de Ndala, affirme avoir aperçu, le 2 janvier 2014 vers 11 heures locales, une jeep aux couleurs de la MONUSCO à l’entrée de la « réserve » (nom d’une concession) en provenance de Beni.
La jeep s’est arrêtée à moins de 100 mètres, en deçà du lieu de l’attaque du véhicule de Ndala, pour débarquer un homme vêtu en uniforme militaire-FARDC, portant une roquette. Puis l’individu progresse au bord de la route et se cache dans le feuillage. « Le véhicule MONUSCO avance et pour aller stationner à une centaine de mètres au-delà du lieu d’impact.
Pendant qu’il poursuivait son chemin, à moins de 100 mètres au-delà du lieu d’attaque, il déclare avoir entendu une détonation qui ressemblait au bruit d’une crevaison de pneu d’un véhicule. A cet instant, il voit venir devant lui une Jeep-FARDC de couleur blanche avec pneu crevé essuyant des tirs de balles en rafale. C’était la Jeep du Colonel MAMADOU qui y était avec son chauffeur et derrière, à découvert, il y a deux militaires.
Le témoin réalisant que les tirs provenaient de la direction de sa progression, il se résolut de faire demi-tour. C’est à ce moment là qu’au moment où il était à environ de 50 mètres de l’incident, que la Jeep-FARDC fut attaquée de nouveau. C’est ainsi que paniqué, le témoin s’enfuit en direction de Oicha. Il précise que la roquette est lancée à moins de 20m du lieu ou s’était caché l’homme qui était déposé par le véhicule aux couleurs de la MONUSCO. Et pendant ce temps, la Jeep-MONUSCO conduite par des sujets blancs (ou clairs de peau) était toujours en attente à moins de 100 mètres.
En se relevant, il essaie de foncer dans la brousse mais aperçoit une dizaine d’hommes tirant vers la jeep bombardée et avançant vers la cible ; la plupart s’exprimaient en kinyarwanda et d’autres en lingala. Ayant aperçu le témoin, les assaillants tentent de lui tirer dessus, mais il parviendra à s’échapper miraculeusement en empruntant l’autre bord de la route. Là, le témoin aperçut encore que les assaillants se dirigent vers la Jeep-FARDC sur laquelle ils tirent, visiblement ils viennent d’achever le Colonel MAMADOU NDALA, déclare-t-il. Son chauffeur aurait réussi à sauter de la Jeep vers le bord gauche de la route, juste après la roquette tombée du coté du Colonel.
A cet instant, deux ou trois assaillants s’aperçoivent que le témoin caché sur l’autre bord de la route tente de relever sa tête pour les observer. Ils le poursuivent de nouveau en tirant sur lui. Le témoin réussira à s’enfuir jusqu’à plonger dans une rivière située dans la proximité pour atteindre l’autre rive le menant dans le Quartier KALINDA.
Mamadou Ndala déjà la cible d’un attentat manqué
Des autres témoignages parvenus à DESC des habitants de Kisiki et May-Moya, corroborés par certains militaires, le 27 décembre 2013, une embuscade planifiée contre MAMADOU avait échouéevers 17h30 locales :
« Ce jour là, le Commandant du 808e Régiment, le Colonel THOMAS MURENZI, un ancien officier du CNDP avait simulé une attaque des ADF-NALU contre sa position de KISIKI, entre OICHA et MAI-MOYA. Ce dernier qui venait d’être instruit de sa relève au profit des Unités de Réaction Rapide du Col MAMADOU avait dans sa mascarade tiré plusieurs coups de balles, lancé plusieurs roquettes jusqu’à arrêter de chez-lui le Capita (chef) du Village KISIKI (Mr MUTAMBA TAMBA).Après avoir arrêté ce chef du village, il se met à appeler le Col MAMADOU, prétextant qu’il venait de capturer quelques NALU qui ont attaqué sa position, mais qu’ils avaient besoin de lui à titre de renfort et en vue de récupérer les capturés pour interrogatoire. Feu MAMADOU qui était en meeting populaire pour rassurer les habitants à MAI-MOYA (non loin de là) réalise qu’il s’agit d’un guet-apens et il se méfie de cet appel ; et il en échappe. »
Il y a lieu de signaler que dans l’enquête menée par les autorités congolaises,le Colonel TITO BIZURU, Commandant du 1er Bataillon du 808e Régiment est actuellement détenu comme étant le principal suspect dans l’assassinat du Col MAMADOU. Or ce dernier a pour chef hiérarchique direct le Colonel THOMAS MUREZI. Tous les deux sont des Tutsi issus du CNDP. On doit rappeler que leur ancien chef, le Col RICHARD BISAMAZA (Commandant 1er Secteur-FARDC, tutsi, ex-CNDP) avait fait défection vers le M23 en août 2013. Cependant, ses régiments et ses bataillons sont restés avec les mêmes Commandants et les mêmes hommes de troupes. On s’interroge pourquoi les autorités de Kinshasa pouvaient laisser cette zone sous contrôle des éléments qui restaient en contact avec le colonel BISAMBAZA et d’autres anciens Commandants qui avaient fait défection et qui gardaient toujours leur influence sur ceux qui sont restés. On se rappelle qu’en début 2013, le colonel Albert Kahasha, surnommé Foka Mike, qui commandait un régiment des FARDCdans la région de Béni au Nord-Kivu avait fait défection avec une trentaine d’hommes, des armes et des munitions. Il avait rejoint le groupe de miliciens Mayi-Mayi Lafontaine qui combattait contre le régime de Kinshasa, après avoir précédemment rejoint le M23.
C’est ici que certains analystes soupçonnent Kinshasa dans le plan de l’élimination de Ndala, même si la prudence reste de mise. Ce, d’autant que même si Col Dieudonné MUHIMA a été nommé comme commandant du 808ème bataillon en remplacement du colonel déserteur RICHARD BISAMAZA, la réalité du terrain, selon certains militaires qui ont requis l’anonymat est qu’il fait de la figuration.
Plusieurs sources avancent que la présence de menaçait l’existence des régiments monoethniques à base Tutsi, voire l’affairisme qui régnait dans cette zone chez certains hauts gradés de l’armée et agents de la MONUSCO.
Certains militaires déployés dans la région déclarent que le colonel Mamadou avait conçu et proposé à la MONUSCO un plan de manœuvre de mener les opérations contre les ADF-Nnalu pendant une période d’environ deux semaines. Cela n’aurait pas plus à ses collègues Commandants des FARDC et ceux de la MONUSCO qui ont tenté en vain de le persuader de planifier des opérations pouvant s’étaler sur une période de un an, voire 2 ans au maximum alors que la capacité opérationnelle conjointe FARDC-MONUSCO permettaient de neutraliser les rebelles de l’ADF-NALU. Il s’agit là d’une piste qui pourrait intéresser les enquêteurs et l’opinion publique nationale et internationale.
A qui profite ce crime lâche ? Qui veut la fin de la guerre du Congo ?
Jean-Jacques Wondo
One Comment “L’Assassinat de Ndala : A qui profite le crime ? La piste Monusco-Fardc – JJ Wondo”
Antoine Kasongo
says:L’Escadron blindé de la DSP était doté de 10 Chars 62(canon de 85mm) et d’un seul char 59(canon de 100mm) Tous made in china